Attendue depuis plus de vingt ans, la mise en deux fois deux voies de la RN7 va enfin pouvoir s’achever sur le tronçon nivernais avec le déblocage par l’État des financements inscrits dans le plan État région. Avec ce redémarrage des travaux renaît l’espoir d’une Nièvre au cœur d’un axe Paris-Lyon dans les années à venir.
Si depuis Trénet, la Nationale 7 fait de Paris “un p’tit faubourg de Valence”, l’A77 en revanche (qui reprend une partie du tracé de la mythique route des vacances), n’était pas encore parvenue à faire de Nevers une étape médiane entre Paris et Lyon comme le rêvait le socialiste Pierre Bérégovoy, alors maire de Nevers (14 mars 1983 au 1er mai 1993). Cela pourrait changer : l’État vient d’annoncer qu’il va respecter ses engagements financiers, amorçant ainsi la relance des travaux.
RETARD MORTELLEMENT LONG
Tout voyageur quittant Paris pour rejoindre l’Allier connaît ce cauchemar routier autour de Nevers : après l’A77 ou “Autoroute de l’Arbre”, qui a ouvert ses barrières en 1996, il passe ensuite par un tronçon de RN7 – surnommée “couloir de la mort” – jusqu’à Tresnay. Cela fait des décennies que les élus locaux réclament, en vain, une mise en 2×2 voies qui permettrait de réduire l’accidentologie de cette portion de route où, comble de l’absurde, les ouvrages d’art sont depuis longtemps construits.
Si les collectivités ont depuis longtemps provisionné les crédits, l’État n’a pas versé en 2018 et 2019 les crédits du Contrat plan État région (79,55 millions, dont 5,2 de la région Bourgogne Franche-Comté et un apport de la Nièvre de 18,7 millions) aiguisant les colères, notamment celle du président du conseil départemental Alain Lassus (PS) qui, sorti déçu du ministère de la Transition écologique, avait réuni en mai dernier une centaine d’écharpes tricolores et bloqué la circulation… en vain.
Mais en décembre 2019, un nouvel accident mortel a fait monter les élus au créneau. Alain Lassus fait alors valoir sa profession de médecin et invoque la nécessité « vitale et sanitaire » de l’achèvement des travaux. La sénatrice centriste de la Nièvre Nadia Sollogoub a rappelé à Jean-Baptiste Djebbari (LREM), secrétaire d’État chargé des Transports, que « les Nivernais attendent cette mise en 2X2 voies de la RN7 depuis 1989 » alors que les ouvrages d’art sont achevés, les expropriations actées et que les marchés ont dû être annulés et relancés. Cela a semble-t-il enfin porté ses fruits : la ministre Elisabeth Borne (LREM) a confirmé que « L’État tiendra ses engagements » : une enveloppe de 11 millions d’euros pour 2020 et la relance des travaux, ainsi qu’une autre enveloppe de 16,3 millions d’euros pour 2021 (dont quatre du département de la Nièvre) ont été annoncés.
RENDEZ-VOUS MANQUÉ ?
La finalisation de la 2X2 voies, dans un contexte économique et écologique qui remet en cause les transports routiers peut-elle encore servir l’intérêt du département ? « De nombreux projets de développement existent au plan local, mais des entreprises ont renoncé à s’installer dans la Nièvre et par voie de conséquence à y créer des emplois, en raison de cette réelle difficulté qu’est la non-connexion de l’A77 avec une autre autoroute », estime Franco Orsi, président de la CCI qui espère néanmoins que l’achèvement des travaux : « accentuera les réseaux de coopération en matière de recherches (Magny-Cours), d’enseignement supérieur (Isat), le développement de parc d’activités et de filières structurantes en multipliant des synergies (agriculture, automobile, tourisme, numérique…) ».
Pour la sénatrice Nadia Sollogoub : « Les réactions enthousiastes des entreprises ont semble-t-il été immédiates à l’annonce de l’aboutissement tant espéré de ce dossier. » Selon Alain Lassus, l’achèvement est bien entendu « un accélérateur du désenclavement de nos territoires ruraux et du renforcement de la sécurité des usagers » et ne sera pas un rendez-vous manqué à condition que « la dernière tranche puisse définitivement relier la Route Centre Europe Atlantique (RCEA) sans report supplémentaire ». Pour Denis Thuriot, président de Nevers Agglomération qui regroupe 60 % de l’activité économique du département : « On paie la note aujourd’hui de retards trop tard comblés qui ont pénalisé la Nièvre pendant des décennies. Des entreprises ont renoncé à s’installer mais nous avons peut-être fini de manger notre pain noir. Le développement se fera dans un projet global qui prend en compte la modernisation des trains ou le renforcement de l’aéroport ». Moins optimiste, Hicham Boujlilat, conseiller régional confirme l’engagement de la région mais relativise : « Je regrette qu’il n’y ait pas de plan de développement économique connexe à la mise en 2×2 voies. La question est de connaître les flux supplémentaires générés. L’A19 nous a fait du mal puisque la traversée Est-ouest profite au Nord du département. Que les véhicules roulent et longent la Nièvre c’est bien. Mais il est mieux qu’ils s’y arrêtent!»