Mercredi 3 février ont été inaugurés les nouveaux équipements de méthanisation de la station d’épuration de Port Douvot à Besançon, pour un montant de 10 millions d’euros. Cet évènement s’est accompagné de l’ouverture effective de la vanne de gaz « vert » réinjecté dans le réseau de GRDF. Si d’autres unités régionales d’injection produisent actuellement du gaz renouvelable, la Métropole du Grand Besançon est la première à réaliser un projet de ce type sur la région Bourgogne Franche-Comté.
L’État français a été jugé par le tribunal administratif de Paris, mercredi 3 février, « responsable » de manquements dans la lutte contre le réchauffement climatique, décision « historique » pour les ONG qui attaquaient la France pour son inaction, soutenues par une pétition de plus de 2,3 millions de citoyens. Hasard du calendrier, c’est ce même jour que Grand Besançon Métropole (GBM) inaugurait les nouveaux équipements de méthanisation de sa centrale d’épuration de Port Douvot, par l’ouverture d’une vanne de gaz « vert », reliée au réseau GRDF. Une coïncidence que Marie-Guite Dufay, président de la région Bourgogne Franche-Comté et Anne Vignot, présidente de GBM, maire de Besançon, n’ont pas manqué de relever. La première évoquant « un retard à l’allumage au niveau de l’État » et la seconde attendant, suite à cette décision de justice « des actions et des investissements plus importants de l’État », tout en présentant l’évènement de Port Douvot, comme « un acte qui n’est pas anodin. C’est important, car cela apporte une réponse concrète au défi climatique et à l’urgence qui lui est corrélée. Selon les dernières études de Météo France, nous devrions connaître une augmentation de près de quatre degrés en France en 2100 ». Des propos légèrement pondérés par la présidente de région qui estime que « l’on ne mobilise pas en faisant peur, mais par la pédagogie… Et de poursuivre : La région pour avancer, pour aller au delà des petits pas, pour accélérer afin de devenir un Territoire à énergie positive pour la croissance verte (TEPCV) d’ici 2050, a besoin des territoires. La région ne fait rien en propre, elle accompagne les volontés territoriales. Et c’est le cas ici, à Grand Besançon Métropole, depuis bientôt un demi-siècle. Il s’agit d’un des territoires les plus avancés de la région sur cet enjeu. » La méthanisation est ainsi une réalité à Port Douvot depuis plus de 40 ans. Elle a pour but de stabiliser les boues produites à chaque étapes du process du traitement des eaux usées et d’en réduire le volume d’environ 40 %, mais également d’obtenir un biogaz constitué de 60 % de méthane (voir ci-dessous). La méthanisation, qui voit la transformation des déchets en ressources, est en cela un parfait exemple d’économie circulaire et de transition énergétique. « La nouvelle méthanisation de Port Douvot s’inscrit dans une démarche générale visant à prendre le vrai virage de la transition énergétique. Sur le site de la station d’épuration cette ambition prend également la forme de panneaux photovoltaïque installés sur les toits des principaux bâtiments », précise Anne Vignot.
DIX MILLIONS D’INVESTISSEMENT
Cette démarche exemplaire pour la transition énergétique se construit dans la durée avec deux contrats conclus par Grand Besançon Métropole pour les 15 années à venir. Le premier avec GRDF pour contrôler la qualité du biométhane produit par les nouvelles installations avant leur injection dans le réseau. Le second avec Engie qui va racheter le biométhane injecté à hauteur de 100.000 euros HT par mois à Grand Besançon Métropole. Au-delà de cette source de revenu conséquente, les 110 m3/h de biométhane vont permettre de chauffer l’équivalent de 2.200 logements basse consommation avec de l’énergie renouvelable. La métropole est mobilisée avec GRDF et les acteurs du territoire pour accélérer la production de gaz renouvelable. Des projets menés, à partir d’intrants agricoles, devraient permettre de porter à 10 % dès 2023 la proportion de gaz « vert » dans la consommation de la métropole, alors qu’elle est aujourd’hui de 0,8 %. Une telle montée en puissance offrirait à la collectivité la possibilité d’atteindre les objectifs fixés par la loi TEPCV à l’horizon 2030, avec sept ans d’avance. « La première fois que je suis venu sur Besançon , c’était dans les années 2000, pour la mise en place de bus au gaz… Vous avez la chance d’être sur un territoire remarquable. Ici, vous êtes capable d’aller plus vite qu’au niveau de l’État, en travaillant tous ensembles sur des projets concrets qui donnent confiance en l’avenir », appuie Frédéric Martin, directeur adjoint de GRDF.
Le montant global de l’opération de rénovation de la station, qui doit se poursuivre jusqu’à l’automne, est de dix millions d’euros HT (8,3 millions d’euros pour le marché des travaux et 0,9 millions d’euros pour le contrat de maîtrise d’œuvre). GBM a pu compter sur les financements de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, la région Bourgogne Franche-Comté et l’Ademe pour des montants respectifs de 500.000 euros HT d’aide directe et de plus de trois millions d’euros d’avance remboursable, 420.000 euros HT et 165.000 euros HT.
La méthanisation des boues : comment ça marche ?
Les boues produites à chaque étapes du process des eaux usées sont chauffées à 37 degrés et envoyées dans deux cuves de 3.000 mètres cubes chacune, où elles vont séjourner une vingtaine de jours. C’est pendant cet intervalle que des bactéries naturellement présentes vont se charger de consommer une grande partie de la pollution carbonée qu’elles contiennent. En résultent un volume réduit de boues d’un côté et, de l’autre, un gaz (le biogaz) qui va devoir être épuré. Le traitement consiste à le faire passer par un filtre à charbon actif qui va le débarrasser de ses plus petites impuretés. Puis, ce biogaz va passer par des membranes qui permettront de ne récupérer que le seul méthane. Quasi pur, celui-ci est alors confié à GRDF qui en contrôle la qualité et l’odorise (pour faciliter sa détection en cas de fuite), avant de l’injecter dans le réseau. Il faut également préciser que le chauffage des boues utilise la chaleur fournie par les eaux traitées de la station, via le recours à deux pompes à chaleur. Ce qui représente une économie énergétique des deux tiers environ sur ce poste, c’est ainsi 30 % de biogaz épargné et autant de biométhane supplémentaire pouvant être injecté dans le réseau.