Ingénieur commercial dans le domaine aéronautique, il a décidé de prendre un virage professionnel à 45 ans pour se consacrer à deux passions : la gastronomie et l’image. La web tv « C’gourmand » lui permet de mettre en valeur le patrimoine culinaire du Lot et du Sud-Ouest mais aussi de découvrir le métier d’entrepreneur.
Vincent Coudre est plutôt difficile à joindre. Quand il n’est pas en rendez-vous, il est en voiture entre deux rencontres, et sur les charmantes petites routes du Lot, le réseau est souvent capricieux. Le patron de C’gourmand, la web tv qui va prendre la suite de Quercy Gourmand, court dans tous les sens. Il faut ça pour monter seul un tel projet, surtout quand c’est une première dans le domaine de l’entrepreneuriat. « Cela prend plus de temps que prévu, et il y a un décalage entre ce que j’avais imaginé au départ et la forme que ça va prendre en fin de compte. » Mais après une vie en tant que salarié, Vincent Coudre prend enfin ses propres décisions et voit le bout du tunnel : le lancement officiel de C’gourmand d’ici la fin avril.
L’idée, c’est de mettre en valeur le patrimoine gastronomique du Lot et du Sud-Ouest avec des vidéos courtes et bien léchées. Des chefs de bonnes tables présentent recettes et gestes techniques dans le studio cuisine de l’entreprise à Cahors. Dans la même vidéo, maraîchers, bouchers, pâtissiers ou encore vignerons sont invités à mettre en avant leurs produits. Les formats sont courts, pour coller au mode de consommation sur le web: 2 minutes 30 à 3 minutes avec des teasers de quelques secondes pour les réseaux sociaux. Vincent Coudre dispose d’une bibliothèque de 150 vidéos tournées pendant les trois années d’existence de Quercy Gourmand, une base qu’il est en train d’élargir pour le lancement de la nouvelle version de la web tv. Le quadragénaire a de bons retours pour le moment, et même s’il a pris du retard sur son planning, le projet avance. « C’était un pari un peu fou au départ, parce que le produit n’était pas viable. Mes amis me demandaient “Qu’est-ce que tu fais ?”. Mais maintenant, la structure est beaucoup plus cohérente et paraît totalement viable. »
Le Quercy et la gastronomie, Vincent Coudre les a dans la peau. S’il n’est pas né dans le Lot, mais à Paris, c’est bien à Cahors qu’il a grandi. Son accent peut en témoigner. Tout comme son amour pour la bonne bouffe, qui l’a souvent identifié auprès de ses collègues comme l’homme avec qui parler cuisine et restaus. C’est pourtant loin des plaisirs de la table que le futur patron de la web tv C’gourmand a commencé sa carrière. Après un DUT en maintenance industrielle obtenu à Perpignan en 1991, il est embauché par la société toulousaine dans laquelle il a fait son stage de fin de formation. « J’ai décidé de ne pas poursuivre vers une école d’ingénieur, je me suis dit qu’acquérir de l’expérience pendant un an ou deux était intéressant avant de continuer les études. » Il bosse dans un bureau d’études, où il fait des analyses techniques pour des systèmes de détection d’incendies et planche sur des appels d’offres. Au bout d’un an, l’employé qu’il remplaçait rentre du service militaire. Dans la même entreprise, Vincent Coudre multiplie les contrats à divers postes pendant plusieurs mois, et notamment au service achats.
« J’ai rencontré des commerciaux d’une autre société, où, m’ont-ils dit, ils cherchaient du monde. Le commerce, ce n’était pas ma formation, mais ça m’intéressait. Et je suis allé travailler pour cette entreprise qui vendait des luminaires italiens. J’y ai passé cinq ou six ans en tout, j’ai vu des chantiers magnifiques et rencontré des gens passionnants. » La fin du millénaire approche et Vincent Coudre sent qu’il a fait le tour de ce boulot. « C’était juste avant les années 2000, plein de choses intéressantes arrivaient sur le plan technologique, je me sentais déconnecté. »
Pour recoller à son époque, il décide de suivre une formation d’ingénieur en cours du soir au Cnam et de préparer la partie théorique du brevet de pilote de ligne, lui qui est passionné d’aéronautique et a appris à piloter de petits avions. « Je préparais un diplôme d’ingénieur tests et mesures. Un de mes meilleurs amis était employé par une boîte américaine qui était spécialisée dans ce secteur. Il m’a dit de postuler, et j’y suis rentré. » Vincent Coudre lâche les cours du soir, déménage à Paris et commence comme technico-commercial.
En 2002, il intègre le bureau toulousain de cette société d’outre-Atlantique et gravit peu à peu les échelons. Ingénieur commercial, puis responsable commercial, et enfin responsable grands comptes. Il aide à mettre en place des stratégies. Mais après 19 ans de bons et loyaux services, une partie de ses attributions lui est retirée. Il est poussé vers la sortie. « Ça se passe de manière assez subtile dans les boîtes américaines, c’était un départ volontaire finalement. »
Le 7 mars 2018, Vincent Coudre se retrouve sans emploi. Le moment est peut-être venu : son entourage le pousse à ouvrir son restaurant. « Depuis tout petit, je suis passionné de cuisine. Quand j’étais gamin, pendant les mariages je ne jouais pas avec les autres, j’allais en cuisine pour donner un coup de main. » Il se renseigne sur les formations, parle avec des amis qui tiennent des restaurants. « Cela m’a paru un peu trop challenging, et compliqué pour la vie familiale. » Un copain, qui tient une entreprise de communication à Cahors, lui parle alors de la web tv. Vincent Coudre planche sur un projet de reprise, créé sa propre société puis rachète Quercy Gourmand en octobre.
Le modèle économique de C’gourmand mise sur trois éléments. D’abord, une participation des acteurs à la création de la vidéo qui les met en valeur, à hauteur de 15 % du coût réel. Ensuite, sur la vente de petits films commerciaux réalisés pour des personnalités ou structures du monde de la gastronomie, et enfin sur des partenariats avec des entités institutionnelles, des chambres inter-professionnelles, etc.
La période est un peu délicate, d’autant que Vincent Coudre espérait mettre en ligne en janvier. Mais la matière est enthousiasmante : « il y a vraiment plein de choses à faire dans la région : terroir, tables, vignerons, et l’activité touristique est foisonnante. » Et le jeune entrepreneur apprécie ce qu’implique d’être à son compte : « j’ai toujours été force de proposition dans mon parcours professionnel. Mais là, je peux avoir des idées et décider de ce que j’en fais. »
