La filière aérospatiale, dynamique mais sous tension

Les PME fortement dépendantes de la filière.

L’Insee vient de livrer son étude annuelle sur l’état de la filière en Nouvelle-Aquitaine et Occitanie.

Alors qu’Airbus doit annoncer le 13 février ses résultats financiers pour l’année 2019, l’Insee vient de publier son enquête annuelle sur la filière aéronautique et spatiale dans le grand Sud-Ouest, un secteur qui pèse lourd dans l’économie des deux régions, Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, puisqu’il représente près de 159000 salariés. À lui seul, le secteur aérospatial concentre 6,1 % de l’emploi salarié marchand et un cinquième des emplois industriels du grand Sud-Ouest.

Selon cette étude, la filière a connu en 2018 une belle dynamique. Les effectifs ont en effet crû de 3 % en un an (après +2,7 % en 2017), soit 4 600 emplois supplémentaires. La construction aéronautique et spatiale, qui représente la moitié des emplois industriels de la filière, a gagné en un an 1200 emplois supplémentaires tandis que les activités tertiaires en comptaient 2 100 de plus.

La chaîne d’approvisionnement, constituée des sous-traitants, prestataires de services, motoristes, petits constructeurs, et fournisseurs des grands constructeurs et donneurs d’ordre, qui représente, 75 % des effectifs globaux de la filière, a vu ses effectifs progresser de 3,3 %, gagnant 3 800 emplois sur l’année, soit 119 000 salariés enregistrés à fin 2018. C’est du reste, note l’Insee, dans les PME que les créations d’emploi sont les plus nombreuses puisqu’elles gagnent 1 400 emplois supplémentaires, contre +1 200 dans les grandes entreprises et ETI.

Les entreprises de la chaîne d’approvisionnement ont vu leur chiffre d’affaires, soit plus de 16,6 Mds€ au global, croître « plus modérément » en 2018, indique l’Insee, progressant de 3,9 % en un an, dont +3,4 % dans l’aéronautique et +13,4 % dans le spatial.

DÉPENDANCE À L’ÉGARD DU MARCHÉ AÉRONAUTIQUE

L’étude menée par l’Insee auprès de 2 400 entreprises du grand Sud-Ouest confirme leur « forte dépendance économique au marché aéronautique ». Malgré des efforts de diversification, les entreprises de la chaîne d’approvisionnement réalisent encore 70 % de leur chiffre d’affaires dans les activités aéronautiques et spatiales. Cette dépendance atteint 81 % dans l’industrie contre 48 % dans le tertiaire. Plus préoccupante est la dépendance de bon nombre d’entreprises de la chaîne d’approvisionnement à un seul client. « En moyenne, indique l’enquête de l’Insee, le chiffre d’affaires réalisé avec le client principal représente 35 % du chiffre d’affaires total ». Trois entreprises sur 10, qui représentent plus de 38 000 emplois, réalisent plus de 50 % de leur activité sur le marché aéronautique avec leur client principal…

Cette situation de dépendance économique fragilise les entreprises de la chaîne d’approvisionnement, sensibles aux fluctuations de l’état de santé économique des donneurs d’ordre. À l’image de la crise qui secoue actuellement le constructeur américain Boeing pour lequel travaillent plusieurs entreprises du grand Sud-Ouest. Parmi elles Figeac Aéro, dont le PDG Jean-Claude Maillard, a prévenu dans une lettre aux actionnaires datée du 4 février que ces difficultés « auront un impact sur l’exercice en cours ».

APPAREIL PRODUCTIF SOUS TENSION

L’Insee pointe une autre forme de dépendance liée aux processus de production. Ainsi parmi les entreprises spécialisées dans la fabrication de composants directement intégrés au produit final, fonction qui concerne dans l’aéronautique 44 % des entreprises, la moitié, précise l’enquête, le fait entièrement « selon les plans et spécifications du client », une sur cinq n’ayant qu’une « autonomie partielle sur le processus de production ». Cette faible maîtrise des modes de fabrication, qui concerne en premier lieu les PME, a des incidences : moins innovantes, ces entreprises ont aussi moins de projet d’implantation ou d’acquisition.

L’enquête de l’Insee met en exergue d’autres points noirs : notamment un taux d’utilisation des capacités de production très élevé puisqu’il atteint 86 % en moyenne dans les entreprises de la chaîne d’approvisionnement. Trois entreprises sur 10 font dès lors appel à la sous-traitance et parmi celles-ci 40 % ont recours à la sous-traitance étrangère, invoquant comme principal argument la volonté de réduire les coûts. Dans ce marché très dynamique, sept entreprises sur 10 évoquent par ailleurs des difficultés de recrutement.