La cuisine locale sur un plateau

Alain Breton a installé une cuisine dans ses locaux au printemps pour démarrer son activité fin juillet 2020.

Née à Muizon à l’occasion du confinement, l’entreprise marnaise Tout un plato s’est spécialisée dans la préparation et la livraison de déjeuners à base de produits frais et locaux pour les entreprises et les particuliers.

Tout un plato, c’est l’histoire d’une entreprise née à l’occasion du Covid. Spécialistes de la cuisine événementielle grand public avec AB Restauration, Alain et Corinne Breton ont été directement et durement impactés par le confinement et la crise sanitaire, qui a mis à mal toutes leurs perspectives de croissance. En effet, depuis 10 ans, ils se sont fait une spécialité de l’organisation de la restauration d’événements grands publics : matches de football, basket, Cabaret Vert, festival de Selestat… (voir ci-dessous). « Nous avions prévu de doubler notre chiffre d’affaires en 2020, pour atteindre plus de 4 millions d’euros, notamment en décrochant le marché du FISE. Mais en raison du Covid et de l’arrêt de tous ces événements, nous ne ferons que 400 000 euros ». Un coup d’arrêt brutal qui, loin de décourager le couple, lui donne l’occasion de concrétiser un projet mis en sommeil depuis plusieurs années.

« C’est un projet auquel nous pensions déjà quand nous étions encore installés à Champigny (jusqu’en 2018, NDLR). À l’époque, nous n’avions pas de cuisine dans nos bureaux et nous en avions assez de déjeuner des sandwiches, les quiches ou des plats préparés la veille à la maison. Nous avions alors imaginé créer une cuisine mais nous ne l’avions pas fait, faute de temps », souligne Alain Breton. Le temps, c’est la crise du Covid qui le leur a apporté, tant par le confinement que par l’arrêt soudain de leurs activités de restauration grand public.

FAIT MUIZON

« L’idée, c’est de permettre aux collaborateurs d’entreprise des parcs d’affaires rémois et des alentours de pouvoir manger de bons plats comme à la maison, variés et frais », souligne Corinne Breton, qui propose un conditionnement en lunch box ou en plateau repas, à base d’emballage cartonné made in France. « Dans l’assiette aussi nous mettons les produits locaux au cœur de notre démarche pour mettre en valeur les produits de nos campagnes. D’ailleurs les recettes sont élaborées et les plats cuisinés à partir de produits de saison issus de producteurs locaux ».

Les dirigeants transforment alors leurs locaux de Muizon et y installent une cuisine complète destinée à préparer des plats à livrer. Un investissement de 50 000 euros qui accompagne le recrutement d’un chef et l’acquisition d’un véhicule électrique pour assurer les livraisons dans l’agglomération rémoise. Chaque semaine, le chef élabore cinq entrées, cinq plats et trois desserts variés ainsi que des valeurs sûres qui restent à la carte une bonne partie de l’année en raison de leur succès, comme le parmentier de canard, les aiguillettes de volaille ou la crème caramel.

Entrées, plats, desserts, livrés seuls ou en formule, le site toutunplato.fr présente chaque plat, son prix, les ingrédients et les éventuels allergènes. Les clients peuvent passer leurs commandes du lundi au vendredi jusqu’à 11 heures et être livrés entre 11h30 et 13 heures le jour-même ou passer les chercher avant 17 heures. « Nous travaillons localement avec des producteurs et des fournisseurs régionaux : la cueillette de Muizon et la ferme de Courville pour les fruits et légumes, Aux Graines de Lettrée (à Dommartin-Lettrée) pour l’huile, la farine ou les pois chiches… tout est français voire même ultra-local », souligne Corinne Breton, qui se fournit aussi en miel, yaourts et chocolat à quelques kilomètres de Muizon.

L’activité a débuté le 20 juillet dernier et monte progressivement en puissance. Avec une cinquantaine de repas commandés chaque jour en moyenne, le site a atteint ses premiers objectifs de rentrée. « Nous avons déjà reçu 1500 visiteurs sur notre site, nous en visons 20 000, dont 4 000 réguliers ». L’entreprise a communiqué via des panneaux d’affichages, des flyers et les réseaux sociaux, avec un slogan très local qui fait mouche : « Cuisine fait Muizon », pour rappeler l’origine de leur entreprise et de la majeure partie de leurs approvisionnements. « Mais notre meilleur vecteur de communication aujourd’hui c’est le bouche à oreille », apprécie Alain Breton.

Les entrepreneurs ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin et voient plus loin, puisqu’ils envisagent déjà, en cas de succès, le recrutement d’un second chef et le développement du service de livraison. Et pourquoi pas le déploiement du concept sur d’autres territoires.

Un savoir-faire grand public unique en France

AB Restauration intervient sur les grands événements tels que les matches de football et de basket professionnels pour assurer la restauration du public, comme ici à Strasbourg.

Dès sa création, AB Restauration s’est spécialisée dans les grands événements. Fort d’une expérience de quatre ans, entre 2006 et 2010, au sein du Stade de Reims où il gérait les espaces de restauration pour les supporters, Alain Breton a monté sa propre société qui lui a permis de continuer à intervenir auprès du club rémois jusqu’en 2018. Entre temps, l’entreprise fait ses armes et ses preuves puis commence à travailler avec d’autres clubs et organisateurs d’événements.

En 2015, AB Restauration décroche le marché du RC Strasbourg pour gérer les stands de restauration des supporters de football alsaciens. « Quand nous sommes arrivés, les buvettes du stade de la Meinau faisaient un chiffre d’affaires de 80 000 euros. Dès la première année nous avons créé 13 buvettes et il y en a 36 sur tout le stade aujourd’hui, avec des espaces ouverts trois heures avant le match et aussi après la rencontre », explique le spécialiste rémois qui a été désigné vainqueur du classement des meilleures restaurations de stades en 2014 avec le Stade de Reims et en 2018 avec Strasbourg.

INVENTION D’UN MÉTIER

Il faut dire qu’Alain Breton a bousculé les habitudes dans le secteur de la buvette où les supporters devaient souvent se contenter de sandwiches fabriqués à l’avance, de frites molles et de boissons pas toujours fraîches. « Nous avons inventé le métier », précise-t-il. « Nous nous approvisionnons en pain frais et nous fabriquons les sandwiches au dernier moment dans nos propres laboratoires et nous proposons des frites fraîches. Aujourd’hui, le cahier des charges demandé par les clubs correspond à ce que nous faisons à Strasbourg ».

Le patron d’AB Restauration a même établi un outil de gestion ultra-précis pour déterminer, en fonction du jour et de l’horaire du match, de la température extérieure et de l’adversaire, les besoins en boissons fraîches et en nourriture, afin d’éviter les ruptures de stock et les pertes. Un logiciel qu’il ne peut utiliser à sa pleine puissance depuis le mois de mars et la réduction des jauges à 5000 spectateurs dans les stades, qui limitent forcément l’activité des buvettes les soirs de match.

Tout un plato mise sur ses plats “comme à la maison” pour séduire les consommateurs marnais.