La communication, une question de survie pour les vignerons et les viticulteurs

Pour les marques, petites ou grandes, l’heure est plus que jamais venue de tirer leur épingle du jeu.

Globale et multisectorielle, la déflagration économique engendrée par la crise sanitaire de COVID-19 nous invite à repenser nos modèles. À commencer par les secteurs du marketing, de la communication et de la distribution en pleine mutation pour l’univers vin et champagne.

En Champagne comme ailleurs, notre vignoble connaît actuellement une profonde transformation mise à mal par l’onde de choc pandémique de COVID-19. Au départ sanitaire, la crise atteint maintenant la sphère économique, exacerbant le jeu des pouvoirs. Les relations intra-vignoble se révèlent et ne laissent plus d’autre choix aux vignerons ou aux viticulteurs qui veulent perdurer que de passer par des actes forts. Ceci afin de créer de la valeur mais également de limiter les interdépendances avec les autres acteurs ou encore de réviser leur stratégie marché. Vigneron, viticulteur, récoltant-coopérateur, coopérative et négociant-manipulant, tous les professionnels du secteur sont concernés, sans exception.

JE COMMUNIQUE DONC JE SUIS

Communiquer alors même que l’on est invité à limiter ses déplacements et tout contact physique avec l’extérieur… Une situation contradictoire et ô combien complexe qui taraude de nombreux dirigeants, de grandes comme de petites entreprises. Et pourtant, c’est dans les temps de crise qu’il est plus important encore de se montrer présent auprès de son public. Pour le rassurer comme pour créer et conserver un lien. En effet, vous pouvez disposer du meilleur produit ou proposer le meilleur des services, personne n’aura l’idée de venir à vous si vous ne le faites pas savoir. L’affirmation de votre identité est votre première publicité.

Les statistiques parlent d’elles-mêmes. Parmi nos clients vignerons, ce sont les marques les plus actives en termes de marketing direct qui ont réussi à limiter la casse commercialement, en réalisant, par exemple, des campagnes mailings ou emailings. Assez logiquement, celles qui ont choisi de ne pas mener d’actions particulières sont celles qui n’ont observé aucune réponse en retour et elles s’en mordent aujourd’hui les doigts.

SE RÉVÉLER À SOI ET AUX AUTRES

Pour la cible des clients professionnels de la filière comme celle des particuliers, le constat est sans appel. C’est bien par son aptitude à fidéliser sa clientèle qu’une marque de champagne ou de vin arrive à garder le cap économique. Car ce qui fait clairement la différence sur le marché, c’est la réceptivité instaurée par une relation de qualité.

L’heure n’est donc pas au repli sur soi mais au contraire à la visibilité. Mettre sa marque en mots et en images lui donne vie sur le marché et lui permet de revendiquer ses valeurs comme autant de forces. La création ou la refonte d’une marque de champagne ou de vin ne doit pas s’envisager seulement sous l’angle de l’habillage de ses bouteilles. La réflexion doit être exhaustive et globale. Qu’est-ce qui constitue l’essence même de ma marque ? Quelle stratégie commerciale adopter ? Quelle en sera l’articulation sur les marchés français et internationaux ? Voici quelques-unes des questions auxquelles vignerons et viticulteurs doivent se tenir prêts à répondre pour révéler leur caractère unique qui les distinguera sur le marché à long terme.

SÉDUIRE POUR CONVAINCRE

L’ADN de la marque – son identité, sa capacité à être différente, reconnaissable d’entre tous, par tous – prend ici toute sa puissance : c’est là que l’on sent qu’elle porte ses fruits sur la fidélisation client, la séduction dans l’acte d’achat, le relationnel client. De même pour la politique commerciale : lorsqu’elle est bien en place et liée à une segmentation client, soit l’adaptation des tarifs et des offres aux profils des clients et à leurs attentes de consommation, on peut alors s’y référer pour être réactif sans perdre ni ses marges ni sa construction de positionnement marché. Sous-entendu, sa zone de prix, comme son niveau d’image.

Prudence toutefois. L’identité de marque est une étape décisive qui se doit d’être soignée et qui ne laisse pas la place au « bricolage maison » d’où la nécessité de se faire accompagner par de vrais professionnels. Aussi prometteur soit-il, un discours de marque sera vite desservi par une image bancale ou une politique commerciale inappropriée… Or n’oublions pas que le client se doit d’être séduit et non désorienté.

La plus grande erreur serait de tomber dans une politique de prix cassés qui déconstruirait tous les efforts menés en matière de segmentation de marché et stratégie de distribution. Rappelons que l’univers vin et champagne offre une formidable dimension expérientielle qui doit être valorisée à son juste prix. Il serait dommage et contre-productif d’en rompre le charme tout comme la promesse en bouche. L’occasion de rappeler que toute marque (de vigneron mais pas que) doit avoir fait son travail de stratégie avant même la crise. C’est-à-dire connaître son client, ses marges et son objectif de marque pour avoir écrit au préalable sa stratégie commerciale et n’avoir alors en temps de crise « qu’à » activer l’une des offres ou l’un des services commerciaux que l’on a pensé en amont, en conformité avec l’ensemble de la stratégie de la marque.

AGIR MAINTENANT OU JAMAIS

Ne pas renvoyer aux calendes grecques ce qu’il est possible de construire dès à présent. Parce que demain est déjà presque trop tard et que c’est aujourd’hui qu’il faut agir. Une vérité des plus évidentes mais qui demande souplesse et agilité à ses initiateurs. Car si les derniers événements ont mis en lumière notre relative impuissance face à la maîtrise totale des facteurs économiques de notre activité, ils ne doivent pas être une excuse pour nous y soustraire. C’est au contraire être proactif et agir au plus juste, nos actions d’aujourd’hui orientant nos engagements de demain. En somme, préparer les prochaines crises à défaut de les prévenir totalement, en anticipant ce qui peut l’être.

L’UNION FAIT LA FORCE

La place n’est pas au fatalisme, on l’aura compris. Cette crise doit nous alerter plus encore sur la nécessité de faire émerger une union solidaire. S’écouter, échanger et partager pour se reconnecter aux autres et faire poids sur les décisions de demain, c’est unifié que le vignoble français pourra avancer. Ce n’est rien de le dire, on est toujours plus fort ensemble. Les bonnes initiatives méritent d’être encouragées, d’autant que de nombreux outils propices au partage d’informations se sont largement démocratisés. Autant de moyens aptes à fluidifier votre communication, vous assurer une bonne visibilité, renforcer votre capital sympathie et au-delà, générer de nouvelles opportunités de marchés.

Par Virgile Lacroix et Julie Marano, co-gérants de l’agence Cidéo

* Cidéo est une agence de communication marketing et business, prenant pied à Aÿ-Champagne, village Grand Cru, aux côtés des vignerons et viticulteurs depuis près de 20 ans.