Jacques LambertItinéraire d’un enfant du cinéma

L’enseignement, l’édition, le cinéma : ses passions ont toujours dirigé Jacques Lambert, dans ses entreprises et ses voyages.

À travers la présidence de « Terres Ardennaises » et du Festival des enfants du cinéma, Jacques Lambert a pu assouvir sa passion pour l’histoire et le septième art.

Il est né à Nouzonville « parce qu’il était d’usage pour une future maman d’aller accoucher dans la commune de ses parents », mais a passé toute sa jeunesse à la campagne au fil de l’évolution de carrière de son père, instituteur. « J’ai ainsi vécu à Evigny où je demeure aujourd’hui, Raillicourt et Launois-sur-Vence, des villages où papa a enseigné tout en étant le plus souvent secrétaire de mairie, ce qui lui permettait d’avoir un rôle social ». Jacques Lambert garde un souvenir attendri de cette enfance en milieu rural. « Je mesure la chance formidable d’avoir habité à la
campagne dans les écoles-mairies où mon paternel exerçait. Cela m’a permis
de lire et écrire à un âge précoce car ma chambre se situait au dessus de la salle de classe où il m’arrivait de m’immiscer discrètement. Je me suis aussi initié très vite au cinéma grâce aux projections de film 15 mm que mon père animait avant que les bobines partent ailleurs dans le camion du laitier. Des moments indélébiles »
.

TRENTE-ET-UN ANS DANS LE MÊME ÉTABLISSEMENT

À l’âge du passage en sixième, Jacques connaît sa première expérience urbaine au lycée Chanzy de Charleville-Mézières. Avant de rejoindre le collège de Signy-l’Abbaye, en troisième, parce que cet établissement comptait une classe préparatoire à l’École Normale où il fut reçu en 1963. « Pour moi, ce fut tout de suite un espace de liberté en même temps qu’un lieu de culture. L’EN m’a permis d’affirmer ma personnalité. Avec d’autres collègues de promotion, j’ai créé mon premier ciné-club, joué au volleyball en participant deux fois au championnat de France UNSS, côtoyé des garçons comme Pierre Déom, le créateur de La Hulotte, Jean-Pierre Braquet, le futur président de la Ligue de l’Enseignement et Pierre Clouet qui devint un pilier de la MJC Calonne à Sedan ». Au sein de l’École Normale, Jacques Lambert aura aussi la chance d’avoir Henri Manceau comme professeur d’histoire-géo, « ce qui confortera mon envie d’être enseignant ».

Après sa réussite au bac philo, l’obtention de son CAP d’instituteur et sa sortie à la place de troisième de sa promotion, il décline une nomination au collège de Monthermé et hérite d’un poste en classe pratique à Jean-Macé où, après être devenu prof de lettres, histoire et géographie en 1977, il passera trente ans en ayant consolidé son bagage par le passage de deux autres CAP. « J’aurais passé trente ans de ma vie dans ce bahut où j’ai lancé des chantiers de construction au Sénégal à travers deux voyages scolaires de dix jours, je me suis occupé du Foyer socio-éducatif et du ciné-club et j’ai fait connaissance d’Anne, ma première épouse ».

Gravement malade, celle-ci décède en 1998. Une tragédie pour Jacques qui choisit alors de rompre avec ses attaches.

CAP SUR LA NORVÈGE

« À 50 ans, je n’ai pas voulu me retrouver à la charge de mes deux filles. J’avais besoin de casser avec toutes mes habitudes. J’ai alors demandé au rectorat d’être mis en disponibilité pour une mutation à l’étranger. Au Sénégal ou au Burkina-Faso ». Mais c’est au lycée français d’Oslo que Jacques va connaître sa deuxième expérience professionnelle « dans des conditions idéales : une classe d’une quinzaine d’élèves composée d’enfants d’ambassadeurs, d’industriels, banquiers ou cadres supérieurs ayant beaucoup voyagé et souvent trilingues ».

Rejoint par Elisabeth, une amie de longue date qui deviendra sa nouvelle compagne, le Nouzonnais vivra six ans en Norvège avant d’être rattrapé « progressivement par l’idée d’un retour au “pays” ».

En 2004, il repasse donc par la case Ardennes pour occuper de façon éphémère un poste de professeur, à cheval sur Liart et Signy-le-Petit, regroupés dans un collège multisite. À 58 ans et après 42 années de cotisation, il prend sa retraite qui va être active car il a vite repris le collier à la tête de deux associations qu’il avait fondées en 1982 et 1991.

RETROUVAILLES AVEC SES DEUX PASSIONS

D’abord, la revue trimestrielle d’histoire et de géographie locale « Terres Ardennaises » qui existe sans discontinuer depuis 37 ans. « Avec Jacky Turquin, Jean-Pierre Pénisson, Jean Clerc et Simon Cocu qui, à 94 ans, illustre encore nos ouvrages, nous avons démarré en juin 1982 au sein de la Ligue de l’Enseignement avec un numéro consacré à la Semoy qui remporta un succès aussi immédiat qu’inespéré. Ensuite, on a étoffé notre comité de rédaction avec d’autres signatures comme celles, entre autres, de Gérard Giuliano, Robert Cecconello, Jean Diel, Alain Chapelier, Marie-France Barbe, Michel Tamine et Jacques Théret ».

Portée au départ par une vingtaine d’amis fiers des Ardennes, restés fidèlement unis et qui ne comptent pas leur temps en tant que bénévoles, cette revue qui s‘apprête à sortir son 147e numéro tient une place à part dans le champ de l’édition régionale. D’autant qu’elle a aussi contribué à l’animation locale en ayant été à l’origine du marché de Noël et de Saint-Nicolas et de la fête gastronomique « Lire, boire et manger » à Launois-sur-Vence laquelle inspira les différents marchés paysans de Jandun, Ven- dresse et Renwez. Autant de manifestations ayant contribué à faire subsister « Terres Ardennaises » qui, après avoir connu quelques belles réussites avec la réédition des Mamert de Jean Rogissart, et plus récemment de « Mourir le 11 novembre », subit un indéniable déclin de ses ventes.

« Si on dispose encore de réserves financières, on doit faire face à une diminution de nos tirages, à une baisse des abonnements passés de 900 à 400 et à une érosion de nos écrivains-militants. “Terres Ardennaises” mourra de sa belle mort d’ici quelques années », reconnaît Jacques Lambert, un brin amer mais fataliste.

Lui restera une autre passion : le Festival des enfants du cinéma, qui, lui, devrait perdurer plus longtemps… « Le cinéma me fascine depuis l’enfance. J’ai vu mon premier film à l’âge de 4 ans et partout où je suis passé, j’ai fondé des ciné-clubs dont celui du « Lézard rouge », spécialisé dans les films politiques. Ensuite, avec Jean-Pierre Braquet, j’ai créé, en 1991, le festival des enfants du cinéma en proposant des films dans lesquels les héros sont des enfants ou adolescents ».

Ce festival qui rayonne désormais dans une grande partie du département a réuni 650 000 spectateurs depuis sa mise en place. Avec un pic à 34 000 entrées dont 21 000 scolaires, en 2001. « Cet événement m’a permis de faire de belles rencontres : Jean- Claude Dardenne, double palme d’or à Cannes, Thomas Bardinet et Yves Ringer ».

Pour le trentième anniversaire du Festival, Jacques Lambert prévoit la sortie d’un numéro spécial de « Terres Ardennaises » sur le sujet, afin de mutualiser les plaisirs.

Parcours

1947 Naissance le 25 août à Nouzonville
Mai 1968 "Un moment très fort qui a ouvert des perpectives"
1982 Création de l'édition "Terres Ardennaises"
1991 Naissance du Festival des Enfants du Cinéma
1998 Départ des Ardennes pour le lycée français d'Oslo en Norvège
2020 30e festival des Enfants du Cinéma