« Il faut arrêter d’appauvrir les entreprises »

Alors que le gouvernement devrait trancher cette semaine pour une possible réouverture des commerces de proximité, Geoffroy Secula, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises de Côte-d’Or, revient sur cette période compliquée pour les entreprises et exprime les attentes de l’organisation patronale. 

Après un premier confinement de près de deux mois, la France s’est de nouveau confinée le 30 octobre. Quel constat peut-on tirer de ces huit derniers mois ? 

Geoffroy Secula, président de la CPME 21. Entre ces deux confinements, un certain nombre d’entreprises a pu reprendre au moins partiellement le travail. Malgré tout, les entreprises se sont clairement affaiblies. Avant l’annonce du deuxième confinement, parmi les adhérents de la CPME, un chef d’entreprise sur deux (47 %) déclarait craindre pour la pérennité de son entreprise. Pour illustrer plus clairement ce chiffre, nous avons 55 % de nos adhérents qui ont eu recours à un prêt garanti par l’État. Parmi eux, 28 % confiaient, avant l’annonce du deuxième confinement, ne pas pouvoir le rembourser et 34 % redoutaient d’avoir des difficultés à le faire. Aussi utiles soient-ils, tous les dispositifs d’aide mis en place sont ni plus ni moins que des dettes à rembourser. Et pour pouvoir les rembourser, encore faudrait-il pouvoir travailler, réaliser du chiffre d’affaires et facturer ses clients. 

Que penser de ce nouveau confinement ?

 Il est clairement différent du premier puisqu’il y a plus d’entreprises qui travaillent et heureusement. Je pense notamment à toute l’activité du BTP… Le gouvernement a annoncé qu’il attendait de ces entreprises qu’elles puissent continuer à travailler parce qu’ils se sont rendu compte qu’en poursuivant leur activité, le BTP générait plus de travail. On voit que le nombre de dérogation a aussi augmenté. Maintenant, la fermeture des commerces de proximité est incompréhensible, injuste et sera lourde de conséquences. On devrait laisser travailler ces entreprises mais j’ai le sentiment que le gouvernement ne souhaite pas revenir sur sa décision pour des questions de principe… La CPME s’est mobilisée pour communiquer et encourager les maires à prendre des arrêtés municipaux, même s’ils ont été cassés, cela montrait la volonté des élus de terrain de soutenir les petits commerçants. Le Sénat avait d’ailleurs adopté à l’unanimité la possibilité que le pouvoir de décision d’ouverture revienne aux préfets, dans une logique territoriale. Cette proposition de texte n’a pas été adoptée à l’assemblée nationale et malgré la sollicitation par la CPME Côte d’Or de l’ensemble de nos députés Didier Martin et Didier Paris ont voté contre cette proposition et les trois autres députés de Côte-d’Or Yolaine De Courson, Fadila Khattabi et Rémi Delatte n’ont pas participé au vote. Là encore, nous aurons un effet boomerang qui n’impactera pas que les commerces de proximité fermés mais aussi les industriels qui les fournissent. 

Que demande la CPME ?

 Nous demandons à ce que les annonces soient suivies de faits. Dans la mesure où on interdit à certaines entreprises de travailler, on ne doit pas les appauvrir. Aujourd’hui, les aides qui sont proposées à l’ensemble des entreprises impactées ne sont pas suffisantes parce qu’elles ne permettent pas à toutes les entreprises concernées de couvrir la totalité de leurs charges alors qu’elles sont, pour certaines, totalement à l’arrêt. Sans même parler des délais de déblocage des fonds… Et c’est un véritable problème, parce que jusqu’à présent, les entreprises survivaient sur leurs fonds propres, mais aujourd’hui, elles ne peuvent plus. Le sujet des loyers reste, par exemple, un sujet important. Il y a un premier pas qui a été fait avec l’instauration d’un crédit d’impôt pour les propriétaires à hauteur de 50 % de la réduction de loyer réalisée. Nous sommes contents de ce premier pas, mais nous demandons à ce que la totalité de la réduction soit faîte en crédit d’impôt de manière à inciter tous les propriétaires qui le peuvent à le faire. 

La date d’un possible consensus au 13 novembre est passée…

Nous sommes clairement déçus de ne pas avoir réussi à faire rouvrir les petits commerces et les rayons dits “non-essentiels” de la grande distribution. Dans l’annonce du premier ministre, nous avons une nouvelle date, au conditionnel des indicateurs que nous ne maîtrisons pas. Je pense que c’est pour essayer de donner des perspectives à ces petits commerçants et de nous calmer. D’ailleurs, on parle d’une possible réouverture le weekend après le “Black Friday ”. . . C’est juste un non-sens commercial qui illustre le fait qu’on ne soit pas capable de prendre des décisions logiques. 

Quelles sont vos attentes et vos craintes pour les prochaines semaines ?

Aujourd’hui, à l’heure où l’on se parle, chaque jour perdu pour un petit commerçant est gagné pour les géants du e-commerce. La secrétaire d’État à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, disait qu’il y a aujourd’hui « moins d’entreprises en défaillance que l’année dernière ». C’est logique puisque toutes ces mesures de report de dettes apportent du cash, or, c’est quand il n’y a plus de cash que les entreprises déposent le bilan. Mais les chiffres qui sont en baisse aujourd’hui exploseront indiscutablement dès l’année prochaine. Comment veut-on bénéficier du plan de relance alors qu’on ne nous permet pas de retravailler… En revanche, dans les mesures importantes, il y a les aides directes des communes et de la région et l’aide à la digitalisation. Le contexte actuel ne fait qu’illustrer la nécessité absolue pour les entreprises de se structurer et de s’organiser pour pouvoir se digitaliser. Ce qui est certain, c’est que nous manquons de décisions simples et claires, mais aussi de réactivité entre les annonces et les faits. 

La CPME 21 lance “Mon commerce online”

Depuis la page d’accueil de son site internet, la CPME 21 propose son nouveau service “Mon commerce online”. « L’idée est de proposer à nos adhérents un référencement et une visibilité sur tous ceux qui, malgré la contrainte de fermeture administrative, continuent à faire de la livraison ou de la vente à emporter », explique Martin Six, secrétaire général de la CPME 21. Pour cela, l’organisation patronale récupère les informations telles que la localisation du commerce de proximité, les modalités d’achat et le support de vente, pour agréger l’ensemble sur une carte interactive. « Lors du premier confinement, nous avions déjà réalisé des flashs infos “bons tuyaux”, pour permettre aux adhérents de proposer des gestes solidaires notamment. Cela concernait davantage des initiatives d’entreprises sur les mesures d’hygiène et de sécurité. Les choses s’étant relativement structurées entre les deux confinements, nous avons préféré, pour cette nouvelle période, mettre davantage en avant nos adhérents qui proposent des services de vente en ligne, de retrait ou de livraison, pour pouvoir continuer à faire vivre le commerce local malgré les circonstances qui les contraignent », complète Geoffroy Secula, président de l’organisation patronale. 

cpme-21.fr 

Facebook s’associe à la CPME

Alors que 82 % des internautes français achèteraient en ligne, seulement 15 % des TPE françaises vendent en ligne. À l’heure où les Français sont reconfinés, le numérique est un outil vital pour permettre aux commerces de maintenir le lien avec leurs clients, et pour certains, de poursuivre leur activité dans le respect des règles de distanciation sociale. Face à ce constat, Facebook et la CPME ont allié leurs forces autour d’un dispositif d’urgence pour accélérer l’adoption de solutions digitales par les commerçants français. L’ensemble de ce dispositif sera diffusé au sein du réseau CPME, qui compte aujourd’hui plus de 150.000 entreprises et près de trois millions de salariés. Entre autres services communs, la CPME met en place un vaste programme d’accélération de la digitalisation des commerces sur Facebook qui touchera deux millions d’entrepreneurs au cours des six prochains mois. Une semaine de formations flash a été conçue pour les commerçants, pour basculer en urgence vers des solutions digitales, et a été diffusée la semaine dernière auprès des 150.000 entreprises adhérentes de la CPME. Un outil de diagnostic sera aussi proposé aux commerçants pour obtenir un plan d’action numérique. Enfin, pour mobiliser les Français sur Facebook et encourager la promotion des commerces de proximité, le #JeLikeMonCommerçant a été créé.