Nicolas PehlivanianHôtelier d’artistes

Après avoir entièrement rénové deux établissements à Reims, l’hôtelier rémois prépare l’ouverture d’une nouvelle enseigne pour la rentrée 2019.

Arrivé à Reims en 2005 pour prendre la direction de l’hôtel Mercure Parc des expos (zone Farman), Nicolas Pehlivanian imaginait-il que ce qui n’était encore qu’une nouvelle étape professionnelle au sein du groupe Accor le conduirait à s’installer aussi durablement dans la Cité des Sacres ? Sans doute pas. Pourtant, ce Parisien pur jus élevé dans l’agitation de la Capitale est devenu un des ambassadeurs de sa ville d’adoption, multipliant les mandats et les initiatives au service du territoire. « Je suis Rémois. Dès mon arrivée, je me suis tout de suite senti bien dans cette ville, dont je suis tombé amoureux très rapidement. J’ai aussi cru très vite au potentiel et notamment à l’effet TGV ». Un attachement qui explique également la ferveur avec laquelle Nicolas Pehlivanian s’est lancé dans le projet de rénovation complète de son hôtel.

IMPLICATION LOCALE

Entré un peu par hasard à l’école hôtelière à l’issue de sa troisième, il y passera son bac et son BEP. Après avoir été notamment réceptionniste de nuit puis assistant chef de réception dans plusieurs hôtels parisiens, le jeune homme part faire son service militaire à Fribourg (Allemagne). À son retour, son ancien patron lui propose de prendre la direction d’un hôtel rue de la Banque. « J’avais seulement 22 ans, c’était une expérience formidable qui m’était proposée ! J’ai accepté tout de suite et ça a duré quatre ans ».

En 1994, il saisit l’opportunité d’intégrer le groupe Accor en tant que chef de réception dans un établissement aux Ulys (région parisienne). Il y découvre une autre facette du métier, notamment avec la clientèle d’affaires, un hôtel situé en plein cœur d’un parc d’activités et le contact permanent avec les chefs d’entreprise. Quatre ans plus tard, il prend à nouveau la direction de deux puis quatre hôtels dans Paris, avant de saisir l’opportunité d’une nouvelle expérience hors de Paris. « En mars 2002, je suis arrivé à Troyes pour diriger le Novotel. J’ai découvert un monde économique, une culture et une relation de proximité avec le client que l’on ne trouve pas à Paris ». Une manière d’exercer le métier totalement différente qui ravit Nicolas Pehlivanian qui tisse très rapidement autour de lui un dense réseau amical et professionnel dans l’Aube, où il contribuera activement à l’organisation des premières Assises du Tourisme. Jusqu’à son départ trois ans plus tard vers Reims où le groupe Accor lui confie la direction du Mercure Parc des expos (zone Farman).

Il y retrouve des similitudes avec son ancien hôtel des Ulys et s’implique très vite dans la vie locale. Président de l’association de la zone d’activité Ecores pendant neuf ans, président du Club hôtelier pendant deux ans, il ne manque pas une occasion de rappeler à quel point il est attaché à sa ville d’adoption.

Et après 12 ans d’exploitation, le cadre dirigeant s’est lancé dans un projet de rénovation aussi ambitieux qu’inédit en 2018. 2,5 millions d’euros de travaux pour remettre au goût du jour et surtout aux normes actuelles de confort un hôtel construit en 1974 et qui est entré dans le giron du groupe Grape Hospitality en 2016 tout comme l’hôtel Ibis Centre Gare qui a été entièrement rénové et inauguré en mars 2018. Nicolas Pehlivanian assure également le suivi de la construction d’un Ibis Budget de 62 chambres, accolé à son hôtel de la zone Farman et qui ouvrira à l’automne 2019. « Au total, ces trois opérations de rénovation et de construction représentent un investissement de 8 M€ », souligne- t-il.

« Le Mercure Farman est un peu le vaisseau amiral de notre groupe à Reims. D’où l’importance de ce programme de rénovation qui s’est déroulé sur quatre ans. L’année 2018 a été très chargée côté travaux avec la rénovation des chambres entre avril et décembre, le rez-de-chaussée, les services généraux et la partie restauration dès le mois d’août ». Le tout sans fermer l’établissement et en continuant à assurer une continuité commerciale.

MAISON D’ARTISTES

Et le résultat est plutôt saisissant : le guichet d’accueil classique a disparu – les clients étant invités à s’identifier grâce à leur smartphone – et la décoration s’apparente à celle d’un atelier d’artiste, avec un ameublement vintage constellé d’œuvres artistiques visibles et parfois cachées. C’est dans la lignée de la réalisation d’une fresque sur la devanture de son établissement par l’artiste Rémoise Anne-Sophie Velly en 2017, que Nicolas Pehlivanian a mis en place un comité artistique pour réfléchir à la manière dont l’hôtel pourrait être animé à l’issue des travaux. « L’intérêt de la démarche c’était de ne pas se cantonner à refaire uniquement la décoration : Reims possède un riche vivier d’artistes, qui contribuent à donner une identité à cette ville. C’était important de leur donner aussi un lieu d’expression », insiste ce passionné d’art contemporain et de photographie qui a confié certains murs aux artistes rémois Iemza, Kusek et Charles Neubach.

Neuf chambres ont également été entièrement réservées à des artistes, en majorité locaux, qui ont eu carte blanche pour la décoration et l’aménagement. Parmi eux, Julien Duvivier, Maison Vide, Cez Art, Dinterieur, Ksy Boomkies ou Florian Schneider. « Tous ont eu le même cahier des charges et le même budget, avec une seule consigne : conserver le lit et la télévision », sourit le directeur. Il souhaite désormais que son établissement vive en cohérence avec sa nouvelle enveloppe intérieure : « L’idée générale est de faire vivre ce lieu en lien avec son image grâce à des artistes en résidence, des performances ou des concerts, par exemple ». Il s’agit aussi de surfer sur cette nouvelle identité pour faire évoluer le modèle économique de son établissement, avec une ouverture des salles de réunion, habituellement orientées sur les rendez-vous d’affaires, vers les événements de famille ou de loisirs. Même démarche côté restaurant où la décoration originale s’est invitée à la table des convives. « C’est une brasserie maison qui fonctionne bien sur la clientèle d’affaires, nous voulons maintenant la développer auprès de la clientèle de loisirs », explique Nicolas Pehlivanian qui a même spécialement créé une nouvelle marque, l’Artdoise.

Bref, un concept global qui colle globalement à sa ville et à l’évolution qu’elle a connue ces dernières années. « Notre pari c’est de faire vivre une expérience décalée et différenciante à nos clients ». Pari tenu.

Parcours