Green New Deal régional : vers une vague verte ?

Alimentation, santé, transports, consommation… les 52 priorités retenues à l’issue de la Convention et de la votation citoyennes organisées par la Région depuis septembre, forment le socle de ce plan de transformation en profondeur du territoire.

 Les quelque 300 propositions de la Convention citoyenne pour l’Occitanie qui a réuni entre la mi-septembre et début octobre cent citoyens de la région tirés au sort, auront-elles plus de chance d’aboutir que les 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat initiée par le président de la République et que les projets de loi successifs n’ont eu de cesse de détricoter ? L’avenir le dira mais pour l’heure, la votation citoyenne organisée dans la foulée (du 16 octobre au 6 novembre) par le Conseil régional, à laquelle plus de 20 600 personnes ont participé, pourrait le laisser penser, qui a permis d’identifier 52 mesures prioritaires. C’est donc sur ces travaux de concertation que l’exécutif régional a décidé d’asseoir les fondements de son Green New Deal – qu’on pourrait traduire par un moins sexy nouvelle donne verte –, son plan de transformation et de développement écologique et social puisqu’il vise à la fois à répondre à l’urgence climatique et à la nécessité de rééquilibrer les territoires au sein de la grande région. 

MODÈLE EUROPÉEN

Un plan initié avant la crise sanitaire puisqu’il découle du Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), intitulé Occitanie 2040, adopté en décembre dernier par la collectivité au terme de deux ans de travaux mais que la Covid-19 n’a pas remis en cause. « En début d’année 2020, nous nous sommes fortement intéressés au dispositif de Green Deal mis en place par la Commission européenne (qui vise à rendre l’UE climatiquement neutre en 2050, NDLR) et approuvé par plusieurs métropoles du nord de l’Europe, a ainsi rappelé le 19 novembre Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, lors de la présentation du Green New Deal occitan. Nous nous sommes dès lors interrogés sur la pertinence de le faire à l’échelle d’une région. Sur la base des travaux menés dans le cadre d’Occitanie 2040, nous avons jugé que c’était vraiment le bon moment de lancer notre Green New Deal, du fait de l’urgence de la crise climatique, à laquelle s’ajoutaient une crise sociale, illustrée par de nombreux mouvements sociaux, et une crise démocratique, révélée par le niveau d’abstention notamment lors de la dernière élection présidentielle. » 

DIX PLANS EN UN

Sur la base de ces 52 propositions jugées prioritaires, ce Green New Deal décline 10 plans d’actions dans les domaines aussi variés que l’alimentation, le bien-être, la santé, l’économie, le tourisme, la formation, l’innovation ou encore la mobilité. Une sorte d’inventaire à la Prévert dont l’ambition est d’assurer « la bascule de nos modes de production et de consommation », assure Agnès Langevine, vice-présidente du Conseil régional en charge de la Transition écologique et énergétique, de la biodiversité, de l’économie circulaire et des déchets.

Reste à savoir comment se traduiront concrètement ces objectifs sur le plan budgétaire, ce Green New Deal devant constituer la « colonne vertébrale » du futur budget de la collectivité pour 2021. L’ambition de l’élue régionale est de faire de l’Occitanie la première à adopter une classification de ses dépenses « sous le prisme de la transition écologique et du climat ». Une « nouvelle grille de lecture » censée rehausser les exigences régionales s’agissant « des actions mises en œuvre » et de « sa politique d’achat » et conditionnant plus fortement l’attribution des aides aux porteurs de projet à la réalisation de ces objectifs climatiques.

La votation citoyenne a permis de dégager un certain nombre de priorités dont la conversion accélérée vers l’agriculture bio, le développement des circuits courts, la lutte contre le gaspillage, le développement des mobilités douces, la rénovation énergétique des logements, le maintien d’une offre de soins de proximité, la relocalisation de filières économique…

De fait, l’environnement apparaît bien comme une préoccupation majeure chez les votants. Interrogés sur l’opportunité d’organiser de grandes consultations régionales dans le courant de l’année 2021 et le choix des thématiques qu’elles pourraient aborder, celles arrivées en tête concernent les énergies renouvelables, la gestion de la ressource en eau, avant la protection des populations, troisième source d’inquiétude citée. 

L’ALIMENTATION, PRIORITÉ DES PRIORITÉS

Dans le domaine alimentaire, après l’adoption en 2019, d’un Pacte régional pour l’alimentation durable, le Green New Deal reprend certains de ces objectifs dont la mise sur pied d’une filière légumineuse ou la création d’ici fin 2020 d’un fonds sur le foncier agricole. Il doit favoriser l’installation de jeunes agriculteurs et encourager leur conversion en bio, un dispositif qui viendra compléter le Plan régional installation transmission et le contrat emploi formation installation grâce auxquels la Région finance déjà les projets d’installation de nouveaux agriculteurs.

Pour appuyer l’objectif affiché de rendre d’ici 2040 la région autonome en protéines végétales, la collectivité veut également réduire les importations, via les ports d’Occitanie de Sète-Frontignan et de Port-La-Nouvelle, de soja OGM destinés à l’alimentation animale à travers la mise en place dès l’an prochain d’une tarification spécifique, une mesure dont on ignore encore les contours. 

RELOCALISATION, RECYCLAGE…

Ce Green New Deal entérine également la création d’une agence régionale des investissements stratégiques. Annoncée en juillet dernier à l’occasion du vote du plan de Relance de l’emploi, elle aura pour mission notamment d’accompagner ces projets agroalimentaires mais aussi d’œuvrer à la relocalisation d’activités jugées essentielles, mission pour laquelle la Région prévoit de mobiliser 17 M€.

Autre mesure annoncée : la création, d’ici la fin de l’année prochaine, d’un éco-chèque réparation qui vise à éviter la mise au rebut des appareils ménagers et ainsi la production de déchets. La mesure ciblera les ménages les plus modestes. La collectivité poursuit en parallèle une stratégie zéro déchet plastique avec le lancement de deux appels à projet qui viseront à favoriser le développement de la vente en vrac et de la consigne. 

Dans le secteur de l’énergie, d’autres pistes sont abordées telle la rénovation énergétique des structures touristiques sur le littoral languedocien, le déploiement de formations liées aux métiers de la dépollution ou au développement de l’hydrogène vert que la Région entend largement promouvoir via son plan de soutien à la recherche doté de 150 M€. 

TRAIN + VÉLO

En matière de transport, la Région s’est fortement engagée à favoriser le train avec un nouveau Plan Rail doté de 800 M€ qui vise à atteindre 100 000 voyageurs quotidiens d’ici 10 ans, soit 34 000 de plus qu’aujourd’hui. Dans le cadre du Green New Deal, elle entend promouvoir également le fret ferroviaire. La collectivité prévoit ainsi de lancer à l’échelle du territoire régional, dès l’an prochain une étude en vue d’expérimenter le transport combiné par trains et cars régionaux et développer le fret urbain. Elle espère également faire circuler dès 2022 le premier prototype de train hybride, puis dès 2023 le train à batterie rechargeable et enfin en 2024 le train à hydrogène.

Toujours en faveur des mobilités douces, la Région, qui soutient déjà, via une aide jusqu’à 400 €, l’acquisition d’un vélo à assistance électrique, veut aller plus loin en accompagnant les collectivités dans le développement des itinéraires cyclables sécurisés. Elle pourra ainsi financer jusqu’à 50 % du montant de ces nouvelles infrastructures.

« Nous sommes convaincus, que l’Occitanie peut être le fer de lance d’un nouveau modèle de développement qui soit moins consommateur d’énergie, de terres agricoles, qui donne plus de sens à la consommation, sachant qu’Amazon est le contre-modèle de ce que nous voulons faire », a conclu la présidente régionale qui a signé la semaine dernière, comme plusieurs autres élus de l’Hexagone, une pétition en faveur d’un « Noël sans Amazon ».