Foire de Châlons annulée, l’heure des comptes

Une Foire de Châlons à nouveau ouverte aux exposants et aux visiteurs, c’est désormais l’objectif vers lequel se tournent les organisateurs pour 2021.

2ème foire agricole la plus importante de France après le Salon de l’Agriculture, la Foire de Châlons-en-Champagne accueille chaque année 750 exposants et 250 000 visiteurs en dix jours.

«L’impensable s’est produit », résume Bruno Forget à propos de l’annulation de la Foire de Châlons. L’édition 2020, 74e du nom n’aura pas lieu. Le commissaire général de l’événement pensait pourtant avoir tout prévu. Tout d’abord en retardant d’une semaine l’inauguration, traditionnellement prévue le dernier vendredi d’août. Repoussée dans un premier temps après le 1er septembre pour coller aux exigences gouvernementales, elle n’aura pas résisté à l’annonce de Jean Castex, le 11 août, prolongeant l’interdiction des rassemblements de plus de 5000 personnes au 30 octobre. Malgré la présentation de deux scénarios successifs auprès du Préfet de la Marne, Bruno Forget n’aura pas réussi à obtenir la précieuse dérogation et a dû se résoudre à annoncer l’annulation de la Foire une semaine plus tard. Ironie du sort, le destin de la Foire a été scellé par celui qui devait l’inaugurer le 4 septembre.

ENTRE 2000 ET 3000 PERSONNES IMPACTÉES

L’annulation est « une catastrophe » pour l’organisateur, « effondré par la situation » et pour qui l’événement est « victime du diktat de la technostructure parisienne ». Une administration qui, rappelle-t-il, « a décrété l’interdiction des rassemblements de plus de 5000 personnes lors des foires, mais pas dans les centres commerciaux, dans les parcs de loisirs, dans le métro ou les Champs Elysées », évoquant au passage les scènes de liesse qui ont suivi la qualification du PSG en finale de la Ligue des Champions.« Il est possible de rendre compatible l’économie et la santé », assure-t-il, soulignant avoir mis en place un protocole sanitaire très strict pour assurer la sécurité des exposants comme des visiteurs.

L’économie justement, c’est bien elle que Bruno Forget souhaitait défendre avec la tenue de la Foire. Pour les 750 exposants pour qui l’événement engendre parfois jusqu’à 30% du chiffre d’affaires annuel, pour les nombreuses initiatives économiques ou sociétales prévues au programme, pour les emplois générés pendant la dizaine châlonnaise (entre 2000 et 3000 personnes travaillent au quotidien sur la Foire) et pour l’avenir de l’UCIA, son organisatrice. Cette dernière qui réalise un chiffre d’affaires annuel de 4,5 millions d’euros grâce à l’organisation de salons et événements, la Foire en étant la principale manne financière. « La Foire finance notre fonctionnement toute l’année : loyer, salaires des équipes, charges… Aujourd’hui nous sommes en situation de dépôt de bilan », annonce le commissaire général, qui, avec ses équipes, a commencé le chiffrage des pertes liées à cette annulation. Difficulté supplémentaire pour les organisateurs : les assurances ne couvrent pas les risques liés aux épidémies.

DES OPÉRATIONS EN RÉFLEXION

Comme son commissaire général, Ludovic Vachet, le président de l’UCIA, réfléchit lui aussi déjà à la manière dont l’union des commerçants va pouvoir accompagner commerçants et exposants, qui comptaient sur la Foire pour remonter la pente après un printemps à l’arrêt et assurer leur chiffre d’affaires annuel. « Nous réfléchissons à la mise en place d’opérations spéciales qui pourraient les aider à compenser en partie l’annulation de la Foire et limiter la casse ».

Deux rendez-vous pourraient ainsi être organisés : le premier pendant les dates de la Foire initialement prévues (du 4 au 15 septembre), le second en octobre, avec deux formats différents, encore à définir. « Nous avons interrogé les commerçants et la plupart y sont favorables », note Ludovic Vachet qui espère que l’Etat et les collectivités locales sauront accompagner l’UCIA dans l’organisation de ces opérations. « Nous allons rebondir très vite en travaillant d’ici les prochains jours sur la 75e Foire », annonce-t-il, ajoutant un brin fataliste : « Mais avec quels exposants ferons-nous cette Foire 2021 ? D’ici là, nous craignons que certains d’entre eux restent au bord de la route ».

Mais avec Bruno Forget, l’effondrement ne dure jamais longtemps, il cède rapidement la place à l’optimisme et à l’engagement, citant Nietzsche : « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. Nous allons réfléchir à cette prochaine édition et fédérer les énergies. Nous serons plus forts ensemble pour réussir la 75e Foire ».

JEAN ROTTNER RÉAGIT

Président de la Région Grand Est, Jean Rottner a réagi à l’annulation de la Foire : « C’est un coup dur pour les 750 exposants de ce salon, dont certains y réalisent une grosse part de leur chiffre d’affaires annuel ! J’ai une pensée toute particulière pour Bruno Forget, commissaire général de la Foire, et pour l’ensemble de ses équipes qui travaillaient depuis des mois pour garantir la réussite de ce rendez-vous dans des conditions inédites. J’adresse également tout mon soutien à la profession agricole, déjà durement touchée par la crise. Véritable catalyseur de l’activité économique, la Foire de Châlons est un événement aux retombées importantes pour notre région et je regrette qu’il ne puisse se tenir. Nous en subirons de plein fouet les conséquences.»