Financer l’innovation sur tout le territoire

Isabelle Augrain est directrice des marchés particuliers et professionnels, du marketing, du multicanal et de l’innovation au sein du Crédit Agricole Champagne-Bourgogne. (Photo : Journal du Palais)

S’appuyer sur une forte présence territoriale afin de financer l’innovation : c’est le pari que fait le Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne avec sa caisse locale de l’innovation.

L’innovation est un fait économique et entrepreneurial indubitable mais qu’on a trop souvent tendance à associer aux secteurs fortement urbanisés. Ces derniers étant perçus, à tort ou à raison, comme recelant tous les éléments permettant d’accompagner les capacités innovantes, au premier rang desquels figurent les outils de financement. C’est avec la volonté de faire évoluer cette approche que le Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne, en l’occurrence pionnier en France sur la question, a lancé une caisse locale de l’innovation, pour laquelle il a débloqué une enveloppe de cinq millions d’euros.
« Même si nous sommes impliqués dans l’accompagnement de l’innovation avec notre Village by CA à Dijon, précise Isabelle Augrain, en charge de ce secteur au sein de la banque, l’ensemble de nos administrateurs ou correspondants sur les quatre départements que nous couvrons ( Yonne, Côte-d’Or, Aube et Haute-Marne) nous faisaient remarquer qu’il se passait des choses sur tous les territoires. En créant, au printemps 2018, notre caisse locale de l’innovation, nous avons voulu irriguer cet accompagnement sur l’ensemble du territoire et dans deux sens : d’une part avec les innovations propres à notre banque pour ses clients et ses collaborateurs, et de l’autre, en ayant des « capteurs” du territoire ».

DES OREILLES PARTOUT

Le Crédit Agricole s’appuie donc sur des « référents innovation » dans chacune de ses 84 caisses locales. Leur mission est d’être ouvert à ce qui se passe sur leurs territoires, faire remonter des informations et en partager. Le conseil d’administration de cette caisse locale particulière, constitué de représentants de la vie civile mais investis dans l’innovation, n’est pas parti de rien. Il a cherché des sources d’inspiration, notamment en se rendant à la Station F, le campus de start-up créé à Paris par Xavier Niel, dirigeant de Free. Ils ont aussi rencontré les équipes de l’Université de technologie de Troyes (UTT), en rapport avec leur chaire Silver Tech. « Le but était de se faire une culture sur l’innovation aujourd’hui », souligne Isabelle Augrain. Les 12 premiers mois d’existence de la caisse locale d’innovation ont été consacrés à un travail d’organisation, de précision des missions.

Aujourd’hui, lorsqu’un référent a connaissance d’un projet d’innovation provenant de son secteur, il en réfère au conseil d’administration ou au directeur de sa caisse locale. « Au sein de la caisse locale d’innovation, nous avons créé un comité de prêts qui permet d’étudier les demandes de financement des entreprises innovantes et de donner un avis en matière de financement bancaire classique. Nous ne sommes pas dans du capital-risque mais bien dans du financement bancaire ». Depuis l’automne dernier, six comités de prêts, qui ont examiné plusieurs projets à chaque fois, ont été réalisés et un peu moins d’une dizaine d’entreprises bénéficient à présent de financements par ce biais. «Nous avons financé des entreprises sur des sujets extrêmement variés, précise Isabelle Augrain. Les projets qui nous sont présentés sont basés sur des modèles très différents de ceux que nous avons l’habitude d’accompagner dans la banque traditionnelle. Cela nous oblige à avoir une approche différente et, dans ce contexte, s’appuyer sur des administrateurs qui sont parfois, par ailleurs, des business angels, ou, plus largement, à qui l’innovation parle, nous apporte une expérience et une vision des marchés différentes et en lien avec les cibles des projets et leur potentiel ». Les projets en question ne sont pas forcément implantés en milieu rural mais ils viennent de tout le périmètre couvert par la banque. La caisse locale de l’innovation a encore besoin de se faire connaître mais les personnes qui souhaiterait y avoir recours peuvent se renseigner au sein de leurs caisses locales. Pour 2019, l’objectif avoué est de permettre au réseau de référents innovation qui a été constitué d’atteindre son rythme de croisière. « Nous allons aussi les inviter à participer à nos cafés de la création, organisés régulièrement sur notre territoire, afin de les inciter à rester ouverts sur ces sujets » conclut Isabelle Augrain.