Exem scrute les niveaux d’exposition aux ondes électromagnétiques

Guilhem Astre a fondé la PME Exem en 2010.

La PME toulousaine développe un observatoire des ondes, en vue d’instaurer plus de transparence dans le débat.

Le déploiement à pas comptés de la 5G en France suscite autant d’enthousiasme que d’inquiétudes. Qu’elles soient fondées ou non, la PME toulousaine Exem souhaite éclairer le débat en offrant à tout un chacun la possibilité de mesurer l’évolution de son niveau d’exposition aux ondes électromagnétiques. C’est le propos de l’Observatoire des ondes qu’Exem vient de lancer. Il s’agit d’un dispositif de supervision de l’exposition aux ondes électromagnétiques basé sur le déploiement d’un réseau de capteurs connectés, issus de la R&D d’Exem. Ce service permet de consulter en temps réel les niveaux d’exposition via un site grand public : www.observatoiredesondes.fr.

Le dispositif est déjà testé par plusieurs collectivités. Dans le cadre de ses missions de surveillance de l’exposition du public aux ondes électromagnétiques, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) a en effet décidé, en prévision de l’ouverture commerciale de la 5G, de déployer la solution développée par Exem dans différentes villes telles que Bordeaux, Marseille, Nantes et Paris. Depuis le 8 décembre à Bordeaux, ces capteurs ont été placés dans des lieux particulièrement fréquentés, à proximité d’une antenne 5G. Les capteurs réalisent des mesures de manière périodique le jour comme la nuit. « Ces capteurs large bande mesurent l’exposition des ondes électromagnétiques induites par tous les équipements dans les bandes allant de 80 MHz à 6 GHz, incluant la radio FM, la télévision terrestre, le Wi-Fi ou tous les types de téléphonie mobile », précise l’ANFR.

Créée en 2010, la PME, qui emploie 21 collaborateurs et réalise un chiffre d’affaires de 2,2 M€, est spécialisée dans le contrôle des niveaux d’exposition du public et des travailleurs aux ondes électromagnétiques. Accréditée par le Cofrac, elle réalise depuis sa création des contrôles réglementaires – elle est l’un des leaders en France sur ce marché, mais à partir de 2017, l’idée est venue à son fondateur, Guilhem Astre, de diversifier son activité. « Nous avons conçu une solution complémentaire de supervision pour répondre à un sujet qui imprégnait de plus en plus le débat sociétal, avec les questionnements des collectivités territoriales et des citoyens vis-à-vis du déploiement du numérique, de la 4G puis de la 5G, explique-t-il. L’idée était d’aller un peu plus loin dans la transparence sur le sujet. Nous avons donc développé en interne une technologie de capteur de champ électromagnétique, finalisée fin 2019. Puis nous avons commencé à déployer des pilotes de cet Observatoire des ondes avec l’ANFR. » Depuis, l’entreprise vend une prestation de service d’accompagnement de supervision électromagnétique basé sur le déploiement d’un réseau de capteurs. « Les collectivités – mais aussi les entreprises, qui souhaitent mettre en place ce dispositif, souscrivent un abonnement à ce service de supervision. Elles ont alors accès à une plateforme qui leur permet de consulter les données en temps réel et au-delà de cette plateforme, nous nous engageons avec elles dans une démarche de transparence qui prend la forme de ce site grand public sur lequel sont affichés les résultats des capteurs déployés dans les différentes villes », détaille Guilhem Astre.

En plus des quatre villes déjà citées, grâce aux fonds de l’ANFR, Mulhouse devrait elle aussi être dotée d’une poignée de capteurs. Mais pour dépasser le stade du pilote, ce sont plu-ieurs dizaines d’exemplaires qu’il faudra installer. « Leur nombre dépend de la volonté de la collectivité, mais l’idée est de mailler le territoire, ajoute Guilhem Astre. Ce maillage est indexé sur le nombre d’émetteurs radioélectriques présents sur le territoire. Après étude de l’environnement électromagnétique, nous proposons un plan de déploiement adapté pour superviser de manière cohérente de l’environnement. La ville peut aussi axer sa stratégie en fonction d’une forte demande, de la présence de populations sensibles, telles les crèches. C’est également un choix cohérent. En revanche, nous refusons tout déploiement qui viserait à minimiser une exposition en déployant les capteurs de manière non pertinente. »

Dans les villes où l’Observatoire des ondes est déjà en place, « la perception est très favorable », assure Guilhem Astre. « Dans ce débat sur les expositions électromagnétiques, les gens manquent d’éléments concrets. Ce que nous souhaitons, en tant qu’expert de l’exposition, neutre, indépendant et purement technique, c’est d’apporter de la donnée. Les collectivités s’en sont saisies de manière positive. À tel point qu’aujourd’hui nous déployons nos premières villes en direct. » L’entreprise installe actuellement de nombreux capteurs dans le territoire de Bordeaux Métropole et d’autres collectivités devraient faire de même. En région toulousaine, la ville de L’Union devrait elle aussi se doter en avril de son propre réseau de capteurs développés par Exem. Que se passerait-il si, à l’occasion des mesures effectuées, les capteurs détectent un seuil atypique d’exposition ? « Il n’y a pas, dans ce cas, de levier direct pour agir auprès de l’opérateur. Il faut faire effectuer une mesure de contrôle réglementaire par un organisme accrédité dont le rapport, lui, est opposable. En revanche, le capteur est un indicateur déclencheur. » De fait, rappelle l’ANFR, le dispositif de mesure et de surveillance des ondes « permet à toute personne, ainsi qu’à l’Etat, aux collectivités et aux associations agréées, de faire mesurer gratuitement l’exposition aux ondes créée par une antenne relais ou un objet communicant tel que Linky par exemple. La mesure peut être réalisée tant dans les locaux d’habitation que dans des lieux accessibles au public (parcs, commerces, gares…). » Un cas de figure de plus en plus fréquent selon Guilhem Astre. « Des personnes qui souhaitent acheter un appartement nous sollicitent aujourd’hui, pour faire effectuer une mesure réglementaire. Des notaires nous interrogent également à propos de l’ajout d’une clause dans le sous-seing privé à propos de l’exposition électromagnétique. Bref, le sujet est de plus en plus prégnant. »Pour faire face à un fort accroissement de son activité lié au déploiement de la 5G, Exem prévoit une dizaine de recrutements cette année. L’entreprise espère doubler son chiffre d’affaires cette année.