Éric Léandri, Don Quichotte du net

Invité par le Medef et l’UIMM de Côte-d’Or, Éric Léandri s’est plié aux questions de David Butet, président du Medef, et de Philippe Guérit, président de l’UIMM.

La dernière assemblée générale du Medef et de l’UIMM de Côte-d’Or fournissait l’occasion d’entendre Éric Léandri, fondateur du moteur de recherche français Qwant. L’homme développe une stratégie volontariste face aux géants du net.

Faire rimer internet et confiance : un sacré challenge à une époque où, régulièrement, on constate le piratage de données à grande échelle, où la cybersécurité devient un élément de base du fonctionnement de n’importe quelle entreprise et où les « fake news » se répandent à une vitesse folle. C’est pourtant l’ambition que nourrit Éric Léandri, fondateur du moteur de recherche français Qwant. Il était l’invité de la dernière assemblée générale du Medef et de l’UIMM de Côte-d’Or à Dijon. Pour lui, qui a lancé Qwant en 2013 (70 millions d’utilisateurs par mois aujourd’hui), la confiance est simplement la condition qui permet de faire du business sur internet. Sans elle, plus rien de possible ! Alors comment la restaurer ?

« 8 ANS POUR COMPRENDRE »

« Cela passe, expliquait-il face à David Butet, président du Medef 21 et Philippe Guérit, son homologue de l’UIMM, par la sécurisation d’énormes masses de données. Il y a 15 ans, l’intelligence artificielle et les algorithmes étaient déjà là, ce qui manquait alors, c’était la puissance. Chez Qwant, nous avons passé huit ans à essayer de comprendre comment faisait Google pour avoir autant de pages indexées. On réfléchit là sur des échelles énormes : la France, à elle seule, compte environ quatre milliards de pages… » Aujourd’hui, Qwant, dont les actionnaires sont la Caisse des Dépôts et le groupe Axel Springer, indexe deux milliards de pages par jour. Et le point qu’Éric Léandri met particulièrement en avant c’est, qu’au contraire d’autres moteurs de recherche, le sien respecte la vie privée des utilisateurs. « Nous protégeons les gens, poursuivait-il, face au Real time bidding (RTB ou enchères en temps réel), l’endroit où l’on revend les données. Un site comme Booking livre chaque année à Google l’équivalent de 1,6 milliard d’euros de données, Expédia, c’est 1,8 milliard. C’est contre cela que Qwant vous protège ». Un pari commercialement risqué : il était en effet difficile pour Qwant d’attirer des annonceurs tout en leur disant qu’ils n’obtiendraient pas de données mais, à l’inverse, les utilisateurs du moteur de recherche français ne vont pas ailleurs, puisqu’ils sont précisément en quête d’une sécurité par rapport à leurs données. Cette « clientèle assurée » fut donc l’argument des équipes d’Éric Léandri.

« MOMENT CHARNIÈRE »

Ce dernier peut se prévaloir aujourd’hui de la confiance de grands groupes tels que Safran, Thalès, de banques et de toute une constellation de PME.

« Nous sommes parvenus à un moment charnière, soulignait le fondateur de Qwant : nous voulons que l’administration bascule aussi sur notre moteur ». Fin mai, le secrétaire d’État à l’Économie numérique, Cédric O, a annoncé qu’une circulaire allait être adressée à chaque direction des systèmes informatiques de l’État et de l’administration pour les inviter à installer Qwant sur tous les appareils et à en faire le moteur de recherche par défaut (les utilisateurs pouvant en choisir un autre). Voilà le prochain défi du « petit » français face aux ogres américains.