L’exercice des droits de la défense au sein d’un établissement pénitentiaire ne saurait être subordonné à l’obligation, pour un avocat, d’attester sur l’honneur qu’il ne présente pas l’un des symptômes du Covid-19 et qu’il n’a pas été en contact avec une personne symptomatique. C’est ce qu’indique le tribunal administratif de Toulouse.
Le juge du référé-liberté, saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, peut, en cas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, ordonner toute mesure d’urgence de nature à faire disparaître cette atteinte et à sauvegarder, dans un délai de 48 heures, la liberté fondamentale menacée.
Le droit pour un accusé à l’assistance d’un défenseur de son choix est protégé par l’article 6 paragraphe 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 prévoit, en son article 22, que l’administration « garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L’exercice de ceux-ci ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements (…) », et son article 26 que « Les personnes détenues communiquent librement avec leurs avocats ».
L’état d’urgence sanitaire, déclaré par l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 et les mesures réglementaires qui ont été prises sur son fondement imposent des mesures d’hygiène et de distanciation sociale en tout lieu et en toutes circonstances afin de ralentir la propagation du virus. L’ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi du 23 mars 2020 ne prévoit aucune limitation à l’accès des avocats des personnes détenues aux établissements pénitentiaires.
En l’espèce, l’administration pénitentiaire de la maison d’arrêt de Seysses entendait subordonner l’accès de l’avocat d’un détenu à l’établissement, dans le cadre d’une audience disciplinaire prévue le 30 avril 2020, à la production par le défenseur d’une attestation sur l’honneur, orale ou écrite, qu’il n’était pas porteur d’un des symptômes du Covid-19 et qu’il n’avait pas été en contact avec une personne symptomatique. Le juge du référé-liberté a considéré que, si l’administration pénitentiaire est tenue de prendre toute disposition en vue de sauvegarder la santé du personnel et des personnes détenues de nature à prévenir les effets de l’épidémie de Covid-19, et le cas échéant, d’interdire l’accès à l’établissement à un avocat qui serait manifestement symptomatique ou ne respecterait pas les mesures d’hygiène nationalement prescrites, l’administration ne pouvait prendre la mesure en litige à l’encontre d’un avocat asymptomatique qui ne refusait pas de se soumettre aux règles d’hygiène en vigueur, sans porter une atteinte disproportionnée – et donc grave et manifestement illégale – aux droits de la défense.
Le juge des référés a donc ordonné à l’administration pénitentiaire de la maison d’arrêt de Seysses de dispenser l’avocat du détenu de produire l’attestation sollicitée.