Dormilaine valorise la laine de nos régions

L’entreprise tarnaise, installée à Saint-Amans-Valtoret, appartient à cette catégorie de petites pépites chères aux amoureux des beaux ouvrages. Depuis les années 90, Jean Rouanet fabrique des matelas avec la laine des brebis de race lacaune. Ses clients viennent de toute la France. Matelassier ou litier, il se définit comme un valorisateur de laine.

Fabriquer des matelas est une activité durable et responsable… Jean Rouanet, n’aime pas ces termes à la mode : « c’est dans l’air du temps, on redevient tendance. Pour moi, rien ne change, j’ai toujours travaillé avec des matières premières locales. »

Et, sa région, il la connaît bien. Son père était directeur d’une usine de lavage de laine près de Mazamet, dans cet ancien bassin de tradition lainière et textile. Tout naturellement, lorsqu’il a fondé l’entreprise en 1988, il s’est tourné vers la collecte de laine auprès des éleveurs du Tarn, du sud de l’Aveyron, de l’Aude et de l’Ariège. La laine était ensuite triée, revendue à des négociants puis exportée.

En 1991, un crack lainier a tout désorganisé, les cours se sont effondrés en raison d’une surproduction de l’autre côté de la planète.

« J’ai donc cherché une activité de transformation de la laine qui me permettrait d’utiliser ma laine, d’être autonome et de me passer de sous-traitants », explique Jean Rouanet. Les matelas, couettes et oreillers étaient nés.

DONNER DU SENS À SON ACTIVITÉ

La laine de brebis est bien adaptée aux matelas. « Je connaissais la matière, je me suis formé auprès de matelassiers. Je trouvais la démarche valorisante, à savoir créer un produit de A à Z, travailler en direct avec les éleveurs et les payer au juste prix », détaille Jean Rouanet. Il a continué à exporter de la laine, mais très vite, c’est l’activité manufacturée qui l’a emporté. En toute logique, il a enchainé sur la fabrication des couettes et des oreillers.

Le métier de matelassier est aux antipodes du négoce de la laine. « Il faut savoir qu’en France, 80 % des laines récoltées partent en Chine. »

Il faut 23 kg de laine lavée pour faire un matelas, soit 50 kg de laine brute. En moyenne, 25 kg d’impureté sont éliminés au lavage. Il faut compter huit heures de travail. Les bourrelets, le capitonnage se font manuellement. Les machines mécaniques servent à démêler la laine, à aplatir les fibres.

LE RETOUR DU NATUREL

Jean Rouanet a ouvert son premier site internet en 2005 et a lancé les ventes en ligne cinq ans plus tard. « Presque une obligation, nous sommes dans un environnement rural, il nous fallait une visibilité nationale ». Depuis quelques années, la clientèle a changé. « Je vois arriver beaucoup d’urbains qui remettent en question leur mode de consommation », ajoute Jean Rouanet. Un de principaux arguments de vente est le durable, Jean Rouanet l’a bien compris en créant un service de reprise des matelas chez les clients . « On recarde la laine, on change la toile et c’est reparti pour 10 ans… ».

L’entreprise emploie deux salariés et fabrique en moyenne 200 matelas par an, il faut y ajouter les couettes et les oreillers. Le CA est estimé à 160 K€.

Dormilaine adhère à l’association l’Atelier à Briançon, un réseau de 250 professionnels en Europe qui forme et assure la promotion de la filière lainière. « On sent que ça bouge, ajoute Jean Rouanet, nous sommes sollicités par des porteurs de projets qui veulent se lancer. Il n’y a plus en France qu’une seule entreprise qui assure le lavage de la laine. Nous sommes à une période charnière. »

Il n’y a pas de formation pour devenir matelassier, peut-être un métier à réinventer. Jean Rouanet aime faire découvrir son atelier et transmettre son savoir-faire. Il ne faudrait pas que l’entreprise disparaisse lorsqu’il partira à la retraite…