Théodore GeorgopoulosDionysos et Thémis à égalité

Théodore Georgopoulos mène ses activités et responsabilités entre la France et la Grèce.

Maître de conférence en droit, spécialisé dans celui de la vigne et du vin, il est aussi président du conseil de l’Institut Georges Chappaz. Théodore Georgopoulos partage sa vie entre la France et la Grèce, toujours mu par ses deux mêmes passions : le droit et le vin.

C’est de Grèce, dans son pays natal, mais avec en image de fond une vue automnale de la cathédrale de Reims, que Théodore Georgopoulos nous accorde un entretien. Ce petit détail a toute son importance car c’est bien entre ces deux endroits que le spécialiste en
droit de la vigne et du vin partage son temps. S’il passe une semaine par mois à Athènes, sa vie de famille ainsi qu’une grande partie de sa vie professionnelle se trouvent à Reims. Il avoue d’ailleurs joyeusement « maintenant connaître les hôtesses de l’air par leur prénom ». Celui qui se définit volontiers comme « un latin », tient à garder le lien avec la terre qui l’a vue naitre voilà 45 ans. Et s’il s’est dirigé vers le droit par passion, c’est presque malgré lui qu’il s’est spécialisé dans celui du vin.

« Après avoir effectué mon DEA et une thèse de doctorat en droit européen à l’Université d’Aix-en-Provence, j’ai postulé en 2004 pour un poste dans une université française et c’est celle de Reims qui m’a réservé le meilleur accueil. »Voilà pour ceux qui parlerait de la frilosité des habitants de la cité des Sacres. Pourquoi avoir choisi la France ? « Parfois, on est marqué par des rencontres avec des professeurs, et ceux que j’ai eu à Athènes étaient spécialisés en droit européen avec un fort sentiment de francophilie », explique- t-il.

Durant deux ans, Théodore Georgopoulos enseigne donc le droit européen à l’Université de Reims Champagne-Ardenne. Puis en 2006, il part en année sabbatique effectuer des recherches à l’Université de New-York. C’est là-bas, dans ce pays si strict sur la législation en ce qui concerne la consommation d’alcool, que reviennent régulièrement les questions de ses pairs sur la recherche en droit du vin. « Le champagne et plus largement LA Champagne sont très réputés au États-Unis, symbolisant à eux deux le vin français. Sans le savoir, les gens me posaient des questions sur quelque chose qu’il fallait développer », se remémore-t-il.

Le monde du vin le rattrape, lui qui a grandi dans un domaine viticole, dans un pays possédant l’un des vignobles le plus vieux de l’humanité, comme en témoignent les bas-reliefs de la Grèce antique.

De là s’ensuit tout un ensemble de démarches pour faire de la Champagne et de Reims, « un véritable pôle d’excellence en matière de droit de la vigne et du vin. » En 2007, il dépose ainsi un dossier à la Commission européenne pour être titulaire d’une chaire Jean Monnet, reconnue internationalement, sur la régulation européenne du secteur vitivinicole. « Cette chaire a pour objectif de promouvoir l’éducation et la recherche dans le domaine du droit européen du vin par le développement de nouveaux enseignements, c’est la première fois que cette accréditation est attribuée dans le domaine du droit du vin », se félicite-t-il. Une summer school annuelle est alors subventionnée à hauteur de 7 000 euros, par l’Union européenne. « Des spécialistes du droit international viennent travailler sur tout un ensemble de questions, de tous les endroits où ces problématiques peuvent avoir un sens : Californie, Australie mais aussi Espagne ou Italie. »

PRIX DE L’OIV

Depuis 2010, Théodore Georgopoulos a la double nationalité, facilitant ses activités sur les deux territoires. Récemment, le jury de l’Organisation internationale de la Vigne et du Vin a attribué le prix de l’OIV 2020 dans la catégorie Droit viticole, à l’ouvrage collectif dont il était à la direction, Marques vitivinicoles et appellation d’origine-Conflits, mimétismes et nouveaux paradigmes. Cette prestigieuse récompense, il la reçoit « humblement et fruit d’un travail collectif et rigoureux ».

Homme aux multiples casquettes – il dirige aussi une revue spécialisée distribuée internationalement – il préside en outre le conseil de l’Institut George Chappaz, dont il avait été nommé Chargé de mission au comité de pilotage en 2014, lors de sa création. « J’ai aujourd’hui un rôle, au sein de l’Institut, de représentation de l’école mais académique et de partenariat. Avec l’aide et l’appui du conseil nous fixons les objectifs pédagogiques et de développement. Nous organisons par exemple un webinar le 9 novembre avec l’Université de Berkeley, en Californie, pour croiser les données de l’impact du Covid sur la filière viti-vinicole. »

AVOCAT À ATHÈNES

Et si en l’espace de 20 ans, la législation a eu tout le loisir d’évoluer avec des directives venues d’Europe, mais aussi des organismes professionnels, de la réglementation sur la propriété intellectuelle, de l’organisation mondiale du commerce, ce n’est pas pour autant que Théodore Geordopoulos aime « la règle pour la règle ». « Le monde va vers plus de règles, oui. Mais il faut toujours que cela ait un sens. La législation doit être là pour servir un objectif social. » Ce bien public, qui lui tient à cœur, il l’exerce aussi en tant qu’avocat à Athènes dans un cabinet qu’il a monté en 2001, spécialisé dans le droit européen et le droit du vin. Dans le cadre de cette fonction, il est conseiller juridique de la Fédération hellénique des Vins mais aussi conseiller spécial de la République de Chypre pour les AOP. « La crise du Covid a changé la manière de voir les choses. Le consommateur est de plus en plus sensible aux questions de santé publique, à l’origine des produits, leur composition, mais aussi à tout ce qui touche au bio », relève-t-il. Ces fonctions, il les assure dans l’optique de garder un lien avec son pays, mais aussi, très concrètement avec le monde juridique. « Il y a une sorte de devoir personnel que je m’impose, mais aussi une nécessité d’être actif dans le monde du droit. Vis-à-vis de mes étudiants, je me dois aussi d’être sur le terrain, confronté aux affaires et pas uniquement dans la théorie. »

Maître de conférence, président de conseil, directeur de programme, chercheur, avocat, conseiller juridique, auteur… Théodore Georgopoulos multiplie les activités… Et l’épicurisme dans tout ça ? En bon latin, il ne l’oublie pas ! S’il essaie de ménager les susceptibilités, il concède « avoir du mal à boire un vin pétillant autre que le champagne et garder un faible pour les rouges de Bourgogne… sans doute une histoire de Pinot noir ! » analyse-t-il. Et si le droit laisse peu de place à la poésie, sa vision du vin en revanche en est emprunte, là encore, avec une signature toute latine : « Finalement, je pense que le meilleur vin est celui que l’on partage avec les personnes qu’on aime. Si l’on boit un grand cru avec une personne que l’on déteste, on ne l’appréciera pas à sa juste valeur. À l’inverse un vin sans grande qualité peut prendre du relief parce qu’il est partagé dans une ambiance amicale et chaleureuse. Le droit parle de justice, le vin parle de vie, je suis heureux au quotidien d’arriver à mêler les deux », conclut-il, philosophe.

Parcours

1975 Naissance à Athènes, en Grèce.
1999 Entame des études de droit communautaire à Aix-en-Provence.
2004 Maître de conférence à l’Université de Reims.
2015 Président-fondateur de l’Institut Georges Chappaz.
2020-2022 Président de l’association internationale des Juristes du droit de la Vigne et du Vin (AIDV).