« La seule recherche de la performance économique n’a plus de sens », cette déclaration illustre bien la finalité du rapport « Les 100 propositions du CESER pour une refondation économique, sociale et environnementale du Grand Est ». À cinq mois des élections régionales, l’Assemblée consultative livre aux futurs candidats, la vision de la société civile du Grand Est demain.
Pour le CESER, il s’agit de penser le monde d’après au moyen d’une refondation radicale plus ou moins urgente, basée sur des priorités à deux ans, trois ans, cinq ans et plus. Les 100 propositions de l’Assemblée consultative s’adressent au Conseil régional, aux acteurs locaux et territoriaux et à l’Etat. Elles portent fortement une transition écologique, toile de fond du développement humain, des performances économiques, du progrès social, de la préservation du patrimoine et des ressources naturelles. Leur adoption nécessite un changement de paradigme, l’humain au centre de la société et l’urgence climatique au centre des préoccupations.
Dans cette nouvelle présentation, après l’ébauche de l’été dernier, post premier confinement et réflexions autour du Business Act du Grand Est, le CESER aboutit à un document plus étoffé et très pédagogique qui s’articule autour de trois axes, « défis pour une stratégie de développement durable » : repenser les modèles de production et de consommation, réorganiser le vivre ensemble, réinventer les gouvernances et les pratiques démocratiques.
REPENSER LES MODÈLES DE PRODUCTION ET DE CONSOMMATION
Les préconisations de cet axe sont au nombre de 31 dont 11 s’adressant à l’Etat. Elles abordent en trois sous-chapitre les enjeux de la relocalisation et de la réindustrialisation, les investissements publics nécessaires à la transition et la relocalisation de la consommation. On trouve dans ce premier axe, la deuxième transformation du bois favorisant le développement d’une industrie de proximité créatrice d’emplois, le développement de l’hydrogène vert porté par des investissements en recherche et développement, la transformation en subvention des dettes issues du PGE, le Prêt Garanti par l’Etat, quand l’entreprise débitrice opte pour un développement vert, les contreparties écologiques, climatiques et sociale aux aides économiques régionales, des financements fortement incitatifs pour la rénovation énergétiques des logements ou la création de stations de distribution de gaz naturel, d’électricité ou d’hydrogène, mais également la mise en chantier d’un plan massif de rénovation du réseau de distribution d’eau.
RÉORGANISER LE VIVRE ENSEMBLE
52 préconisations figurent dans ce chapitre et 39 d’entre elles sont destinées aussi à l’Etat. Le CESER aborde ici les déplacements du quotidien, la lutte contre les inégalités, l’accès à l’éducation, à la culture et au sport.
La traction ferroviaire par l’hydrogène fait l’objet d’une remarque du CESER : « Des trains sont équipés depuis plus de deux ans en Allemagne, alors que l’expérimentation n’a pas commencé dans le Grand Est ». Le rapport revient sur les conditions du télétravail avec le développement nécessaire sur tout le territoire régional des tiers lieux, espaces de coworking, ainsi que sur le projet de taxe de transit poids lourds sur le réseau routier régional.
Le CESER suggère une expérimentation pour le Grand Est : « Lutter contre la précarité en expérimentant un Revenu de Solidarité Active pour les jeunes de moins de 25 ans particulièrement touchés par la précarité ». Figurent également dans ce deuxième chapitre un plan massif de formation des chômeurs de longue durée, la formation des écoliers et de leurs parents au numérique, ou encore la défense des services publics en milieu rural, via les Maisons France Services.
RÉINVENTER LES GOUVERNANCES ET LES PRATIQUES DÉMOCRATIQUES
Le troisième et dernier axe comporte 17 préconisations, dont une seule en direction de l’Etat. On pouvait s’y attendre, le CESER se pose ici en défenseur des assemblées consultatives. Sont donc abordés à ce stade des 100 propositions, la prise en compte du rôle et de la position des assemblées consultatives, la considération de la parole citoyenne et une éducation à la citoyenneté et à l’éco-citoyenneté tout au long de la vie. Trois préconisations tournent autour de la reconnaissance des assemblées consultatives : expérimenter de nouvelles modalités de travail entre le CESER et le Conseil régional, associer les assemblées consultatives aux réflexions de la Conférence Territoriale de l’Action Publique et confier au CESER la mise en place d’une conférence annuelle des citoyens.
Enfin, l’évaluation des politiques publiques est évoquée comme un élément central de la démocratie, de confiance et d’échange entre décideurs, experts, société civile et citoyens. Le CESER, sur ce thème, propose son expertise d’évaluation des dispositifs mis en œuvre dans le cadre du Business Act Grand Est.
En conclusion, le CESER imagine le Grand Est demain, à partir d’une refondation appuyée sur une approche globale du développement durable et d’une traduction opérationnelle des conditions de réussite à travers ces 100 préconisations et à l’arrivée redonner du sens à la notion de « Faire région ».
UNE SORTIE DE CRISE QUI NE SERA PAS QU’ÉCONOMIQUE
Si une mutation de ce type n’est pas simple à imaginer, le CESER insiste sur sa vision de l’avenir : « Parler de refondation implique davantage que des investissements au demeurant indispensables en faveur d’une économie verdie et plus durable. Il s’agit en réalité de changer en profondeur le rapport à soi, aux autres, à la nature, au temps, à la consommation et à la technologie ». Voilà donc la Bible du CESER Grand Est, à cinq mois des prochaines élections régionales, un timing loin d’être innocent et que la gouvernance de l’Assemblée consultative réclame sans ambigüité.
QUEL AVENIR POUR CES 100 PROPOSITIONS ?
La réponse à deux voix du CESER, celle de Marie-Claude Briet-Clémont, 1re Vice-présidente et Présidente du groupe de coordination du rapport, et celle de Patrick Tassin, Président.
Pour Marie-Claude Briet : « Nous allons faire connaître ce rapport au plus grand nombre, via les réseaux du CESER et en discuter avec le Président du Conseil régional et le Préfète de Région. A terme, nous ferons une évaluation de la prise en compte de nos propositions ».
Pour Patrick Tassin : « Il est important que le CESER s’intéresse à cette campagne électorale et que certaines de nos propositions entrent dans le débat et soient reprises par tel ou tel autre candidat. Nous souhaitons fortement que les sujets que nous avons mis en avant fassent partie du débat des régionales ».
Le Président du CESER confirme qu’il mettra fin à son mandat à fin janvier et que Marie-Claude Briet-Clémont assurera l’intérim de la présidence jusqu’à la prochaine élection.