Franck PellouxDes radios libres au numérique

Le 19 juillet dernier, Franck Pelloux et son équipe ont inauguré le tout nouveau Studio Hubert, en présence du président du Conseil supérieur de l’audiovisuel, Roch-Olivier Maistre. (Photo : JDP)

Après des années à évoluer dans de célèbres radios nationales et à côtoyer de grands noms, il a décidé de créer la sienne de toutes pièces. Aujourd’hui, à la tête d’une société de six collaborateurs, le chef d’entreprise reste avant tout un homme de radio. Un véritable couteau suisse qui ne manque pas d’idées pour développer toujours plus sa radio.

Franck Pelloux fait partie de ces hommes qu’on ne rencontre qu’une fois dans sa vie. Aujourd’hui chef d’entreprise, il est avant tout un homme de radio et le restera. Un passionné qui a choisi de vivre ses rêves en allant au bout de ses projets. Élevé au rythme de RMC qu’écoutaient ses parents à la maison, son histoire avec la radio commence dès 1981 avec l’explosion des radios libres suite à l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République. « À cette époque-là, j’avais 16 ans et je me dirigeais vers un bac technique en électrotechnique, se souvient-il. Avec seulement quatre radios en FM, faire de la radio était quasiment impossible, jusqu’à ce que Mitterrrand ouvre les fréquences ». Encore lycéen, il va alors frapper à la porte d’une des premières radios libres françaises, RVI – Radio des Vallées de l’Isère. Bon élève, il commence alors bénévole et manquera son baccalauréat de 60 points avant de se faire recruter à temps plein par cette même radio. « Après avoir pratiqué deux ans et avoir fait à peu près tout le tour de ce qu’on pouvait faire dans une radio libre, je suis rentré à Radio France, à Nancy. Une expérience qui a failli me dégoûter de la radio et qui m’a fait comprendre que je ne pourrai jamais travailler dans le service public ». Neuf mois de grille et trois grèves syndicales auront toutefois décidé le jeune passionné à arrêter la radio.

LES ANNÉES RMC

« Un matin, ma mère m’a appelé en me disant que Jean-Pierre Foucault venait d’annoncer à l’antenne que RMC cherchait de nouvelles têtes et de nouvelles voix ». Sans plus d’envie, il décide tout de même d’envoyer une cassette et un CV et se retrouve convoqué pour passer des tests à Paris. Passées deux phases de sélections, celui qui avait alors la tête de Christophe Lambert dans Subway, se retrouve convoqué à Monaco pour débuter avec trois autres nouveaux sa nouvelle vie à RMC. « Je me suis retrouvé sur la Côte-d’Azur, à Monaco, dans une boîte de 500 personnes. Mais j’étais à RMC et je travaillais avec Jean-Pierre Foucault, l’idole de mes parents ! ». L’enfant des radios libres évolue maintenant dans la cour des grands avec différents patrons comme Yves Mourousi, Hervé Bourges ou encore Jérôme Bellay, et se retrouve à faire de la radio avec Jackie Sardou. Voyageant alors à travers la France et dans le monde entier pour des émissions, à la rencontre d’artistes comme Michael Jackson et arpentant les allées des festivals de Cannes et d’Avoriaz, il découvre ce qu’est une grande radio et fait même un peu de télévisions sur TMC. « Et comme toute période superbe, au bout d’un moment, ça se termine. Durant sept années, j’ai connu le déclin de RMC, un peu comme ce que vivent aujourd’hui les salariés de Europe 1. J’ai donc choisi de partir et de monter sur Paris pour atterrir presque un peu par hasard dans le groupe Lagardère ». Le voilà embarqué au sein de Europe 2, l’ancêtre de Virgin Radio. Dernier animateur d’un morning sur une radio dite « jeune », il a aussi été le premier en France à faire de la radio sur Internet. L’émission s’appelait Radionet, une véritable prouesse technique en direct de 22 heures à 1 heure à la radio mais aussi en ligne et qui avait une réelle communauté alors que personne n’avait Internet à cette époque. « J’y suis finalement resté sept ans, avant l’arrivée des talks, puisque j’ai été remplacé par Arthur et son talk Arthur le matin. Et j’ai fini ma carrière d’animateur – journaliste en national à RFM sur une émission qui ne m’intéressait pas du tout. La radio, c’est un peu comme des cycles amoureux, c’est la septième année qui merde ».

À ce moment-là, le groupe Lagardère était en train de monter des antennes régionales et Franck Pelloux venait d’avoir des jumeaux à Paris. « C’est comme ça que j’ai atterri à Dijon pour monter une plateforme régionale qui existe toujours, à la Toison d’Or et qui héberge les studios dijonnais de Virgin Radio », confie-t-il. « J’ai fait ça quelques années et j’ai à nouveau eu marre de la radio. J’ai arrêté en 2005 pour créer ma première société, une boîte de communication qui s’appelait Alderaan, en hommage à Star Wars. Pour la petite histoire, la SARL qui est derrière K6FM porte aussi le nom d’une planète dans Star Wars, Naboo ».

CRÉER UNE RADIO DE CATÉGORIE B

Finalement, Franck Pelloux reviendra une dernière fois à la radio en la créant. « Le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel, ndlr) lançait un appel à candidatures pour une fréquence qui s’était libérée sur Dijon. Je venais de croiser mon ex-équipe que j’avais recruté à l’époque de Europe 2 et les trois souhaitaient quitter Dijon », explique-t-il. Finalement, l’idée monter une radio de catégorie B a été perçue dans un premier temps comme une blague avant de se concrétiser quelques mois après sous le nom K6FM. « Il n’y avait pas d’autre radio purement locale dans cette catégorie. Le CSA nous a accordé la fréquence en juillet 2007 et on a eu six mois pour monter une radio de A à Z ». Le 17 janvier 2008, K6FM émettait pour la première fois, faisant de très bonnes audiences assez rapidement, avec 5 000 auditeurs dès la première année. En pleine crise des subprimes, la radio a prouvé son potentiel et réussi à survivre pour souffler l’an dernier ses dix bougies. « On a failli mettre la clé sous la porte dès la première saison parce qu’on avait pas mis assez de sous sur la table mais on a survécu grâce à des business angels, l’association Bourgogne Angels, et à notre ténacité ».

Aujourd’hui, Franck Pelloux gère sa société comme un chef d’entreprise et non plus comme un homme de radio. Les auditeurs sont au rendez-vous – 75 000 par semaine – et la société fait même du résultat depuis trois ans. Avec un chiffre d’affaires de 600 000 euros, la société a même pu investir dans un tout nouveau studio en début d’année. « Nous avons investi 10 % de notre chiffre d’affaires dans la technique pour mettre le studio aux normes, le numériser et le transformer pour répondre aux nouveaux codes de la radio. Je n’avais qu’une consigne, je ne voulais plus voir un seul fil ». Inauguré le mois dernier, le studio Hubert – en hommage à l’homme de radio qu’était Hubert Wayaffe, décédé cette année – permettra à K6FM de connaître une nouvelle évolution en passant au numérique. La radio qui fait aujourd’hui partie du groupe « Les Indés Radios » continuera toujours d’émettre en FM sur sa zone historique, mais à partir de 2020, elle émettra aussi dans le nouveau format de diffusion DAB+. « Cela va nous permettre de multiplier notre potentiel d’audience par trois. Passant de 350 000 auditeurs potentiels à 1 100 000 à l’horizon 2024 », ajoute-t-il. Étendue dans un premier temps jusqu’à Chalon-sur-Saône et Beaune, jusqu’aux frontières avec le Jura, la radio émettra, à l’horizon 2024 de Chaumont jusqu’au bassin minier du Creusot-Montceau. Quant à ses projets pour l’avenir, Franck Pelloux entend créer un nouveau programme pour le numérique sous le nom Radio K6 et qui mettra davantage en avant des artistes locaux à raison d’un tous les quarts d’heure.

Parcours

1965 Naissance, le 29 mars du côté de Grenoble (Isère).
1982 Il touche pour la première fois à un micro dans une radio libre à Grenoble.
1984 Il intègre le groupe Radio France, à Nancy (Lorraine).
1987 Il réalise son rêve en rentrant à RMC, à Monaco.
1994 Il crée la première émission multicanal, Radionet, pour Europe 2.
2000 Il monte une plateforme régionale Europe 2, à Dijon.
2008 Il crée K6FM, à Dijon.