Des outils pour revitaliser les cœurs de ville

La convention a été signée entre la ville d’Épernay et les partenaires, État, Action Logement, Banque des territoires, CD51.

La ville d’Épernay qui a intégré le programme Action cœur de ville il y a un peu plus d’un an, renforce sa volonté d’action et de transformation de son centre-ville, en signant un avenant à la convention cadre adoptée en octobre 2018.

Voilà de nombreuses années que les habitants des villes moyennes assistent au dépérissement de leur centre-ville. Plusieurs causes à cela. « Bon nombre de villes moyennes sont confrontées à des difficultés de désertion commerciale sous l’impact de la crise économique, des changements de mode de consommation mais aussi de l’arrivée du commerce par internet », indique Franck Leroy, maire d’Épernay depuis presque 20 ans. La commune, riche de son activité viticole et de son attractivité touristique, garde quant à elle une relative bonne santé de son centre-ville, avec un équilibre commercial entre les enseignes nationales et les commerces indépendants ainsi que de nombreux événements et animations au cours de l’année.

Néanmoins, le dispositif touristique centré sur le champagne peine à inclure le cœur historique ; c’est ce qui ressort de l’étude menée dans le cadre de la convention. « Le cœur historique, facilement accessible aux piétons ne parvient pas à faire valoir une identité propre sur différents critères (attrait, sites de visites, activités). »

223 APPARTEMENTS LIBRES AU CENTRE-VILLE

Et si le commerce est une partie importante de l’attractivité, la problématique de l’habitat aussi constitue une grande part de la question du dynamisme d’un cœur de ville. « Le centre-ville présente certes des fragilités commerciales mais avec une situation enviable si l’on en juge par le taux de vacance des commerces », soutient Franck Leroy. « Il y a cependant un vrai problème d’habitat. Dans les années 60-70, beaucoup d’accès aux logements qui étaient au-dessus ou derrière des commerces ont été sacrifiés, de sorte qu’aujourd’hui, on a 223 appartements libres en centre-ville alors que la zone est relativement prisée. » Or aujourd’hui, ces appartements, quantifiés très précisément grâce à un cabinet spécialisé, sont ou vétustes ou des passoires énergétiques ou tout simplement inaccessibles.

DROIT DE PRÉEMPTION

C’est sur ce sujet notamment que l’avenant à la convention prend tout son sens, car il permet à la mairie de préempter un immeuble pour le revendre à des investisseurs qui s’engagent à le valoriser ou à des bailleurs sociaux. « Avec cet avenant, nous allons pouvoir conserver la vocation première du bâtiment avec du commerce en rez-de-chaussée et des logements à l’étage. On va pouvoir exproprier des immeubles en état d’abandon pour les racheter ou les faire racheter par des organismes logeurs en les remettant dans le circuit de la location », explique celui qui est également président de la communauté d’agglomération Epernay, coteaux et plaine de champagne.

L’avenant permet en outre d’intégrer la notion d’ORT (Opération de revitalisation du territoire). Créée par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Elan) du 23 novembre 2018, l’ORT est un nouvel outil à disposition des collectivités locales pour porter et mettre en œuvre un projet de territoire. « Le statut d’ORT permet de bénéficier d’un droit de préemption plus facilité, d’éviter les implantations commerciales en périphéries plus facilement qu’avant, de se doter d’interventions juridiques plus fluides, plus faciles à mobiliser », soutient le maire d’Épernay.

« La dernière grande politique en direction des villes moyennes c’est 1973. Historiquement le maillage de la France, est un maillage de ville moyenne et donc il est apparu nécessaire en raison des évolutions démo- graphiques et économiques, de redynamiser les cœurs de ville. L’Etat a voulu aller plus loin avec la loi Elan. Mais il y manquait des moyens juridiques, de préemption, ce n’était que dans des zones tendues », souligne pour sa part Denis Conus, préfet de la Marne. Grâce aux ORT, la politique de la ville en sera grandement facilité, d’autant que le financement est en partie apporté par l’État et par Action Logement, qui grâce à son programme national d’1,5 milliards d’euros sur cinq ans, soutient le programme d’Action cœur de ville.

Localement, deux grands projets devraient permettre la transformation du centre-ville d’ici cinq ans. Tout d’abord, la création d’un tout nouveau quartier baptisé Berges de Marne. Ce dernier devrait voir le jour en lieu et place des anciens ateliers SNCF sur une friche de 12,5 hectares et sur laquelle seraient édifiés logements, activités de service, commerces et équipements publics.

Ce quartier serait rendu accessible par le second projet, celui d’une paserelle reliant l’ancienne friche au cœur de ville, élargissant et redynamisant ainsi toute cette zone.

Nastasia Desanti

OPÉRATIONS DE REVITALISATION DES TERRITOIRES DANS LES ARDENNES

Dans le cadre de la fiche action 113 du Pacte Ardennes dédiée à la promotion et la mise en place d’opérations de revitalisation des territoires au sein de huit établissements publics de coopération intercommunale, le Préfet des Ardennes, Jean-Sébastien Lamontagne a d’ores et déjà signé, le 20 janvier, des conventions ORT avec les présidents d’ Ardenne Rives de Meuse, des Portes du Luxembourg et de Vallées et Plateau d’Ardenne. Suivront ensuite, dès février : Ardenne- Métropole, l’Argonne Ardennaise, Ardenne Thiérache et le Pays Rethélois. Ce dispositif doit permettre de retrouver ou développer une offre de logement attractive, par réhabilitation ou restructuration, renforcer l’attractivité commerciale et favoriser un développement économique équilibré en améliorant l’accessibilité, la mobilité et les connexions. Dans les Ardennes, les inter-communalités ont réalisé, avec les communes concernées, un travail qui va se concrétiser dans les prochaines semaines. Pour les communes retenues au titre du programme « Action cœur de ville » (Sedan et Charleville Mézières), la fin de la phase d’initialisation de la convention cadre va se concrétiser par la signature d’un avenant qui vaudra homologation en convention ORT et engagera les villes et leur intercommunalité.

Pascal Rémy


Un nouvel ADN pour Châlons

Si le départ de son régiment militaire en 2014 puis, dans la foulée la perte de la préfecture régionale avec l’avènement de la Région Grand Est, n’ont rien arrangé aux affaires châlonnaises, il ne s’agit pas des seules problèmes auxquels est confronté le commerce local. « Globalement, il y a une paupérisation du centre-ville, qui est intimement liée au logement : les jeunes cadres ont plutôt tendance à faire le choix d’acquisitions immobilières dans les faubourgs ou dans les communes péri-urbaines plutôt que de faire le choix de logements anciens à rénover », indique Ludovic Chassignieux, adjoint au maire. Selon lui, pour répondre à une problématique commerciale il ne suffit pas de mener des actions purement commerciales. La Ville a donc choisi d’agir sur l’immobilier dédié à l’habitat pour donner envie aux habitants de revenir en centre-ville dans des conditions favorables et avec des logements rénovés. Elle a aussi investi sur l’immobilier commercial pour donner des perspectives aux porteurs de projets commerciaux, grâce à des cellules en bon état et aux loyers raisonnables. « Il faut trouver une cohérence entre le montant des loyers et le potentiel de chiffre d’affaires des commerces qui veulent s’installer. » Pour la Ville, la politique commerciale passe d’abord par une politique d’aménagement urbain dans sa globalité. « C’est dans cette perspective que nous réalisons les travaux du quartier Saint-Dominique (photo) où deux-tiers des logements sont en cours de démolition.

Nous y réaliserons une école et nous sommes en réflexion sur le type de logement à y reconstruire. Notre idée, c’est toujours d’apporter une nouvelle population en ville, plutôt une population de consommateurs ». Un projet à 25 millions d’euros, dont un quart pour la collectivité.

Benjamin Busson