Des alternatives pour capitaliser son exploitation

Capitaliser les exploitations agricoles et viticoles reste indispensable pour continuer d’investir dans la mécanisation.

Le cabinet d’expertise comptable et de conseil Cerfrance cherche des solutions pour pallier la baisse des fonds propres.

C’est un constat que dresse le réseau associatif de conseil et d’expertise comptable Cerfrance : fonds propres et capitalisation des entreprises rurales, et notamment des exploitations agricoles, sont affaiblis par divers éléments.

« Comme le démontrent les chiffres, les résultats économiques des exploitations, y compris dans des secteurs habituellement performants comme la plaine d’Arcis, régressent régulièrement laissant apparaître des problèmes de fonds propres », constate Philippe Champignolle, président de Cerfrance Aube. Les causes sont multiples. Les aléas climatiques, de plus en plus fréquents, impactent directement les rendements. Ainsi, 2020 aura été marquée par une troisième sécheresse estivale consécutive. En même temps, comme cela aura été le cas pour les betteraves, la pression insecte est en forte augmentation avec l’interdiction de certaines molécules pour les traitements. Le secteur viticole aura été pour sa part fortement impacté par la chute des ventes de bouteilles de champagne consécutivement à la crise sanitaire. Difficile dans un contexte aussi changeant de rester sur des modèles classiques de financement.

LA FIN D’UN MODÈLE

« Il est de plus en plus évident que nous arrivons à la fin d’un cycle et que les modèles de financement doivent évoluer et s’adapter aux changements », ajoute Yannick Fassaert, président délégué du groupe Cerfrance Nord Est Ile-de-France (CNEIDF). En d’autres termes, sans remettre en question le système bancaire, il faut trouver d’autres sources complémentaires et alternatives de financement. « Nous réfléchissons avec divers partenaires comme les collectivités locales mais aussi les banques à la mise en place de financements obligataires faisant appel aussi bien à l’épargne populaire qu’à la capacité d’investissement des entreprises », précise-t-il.

Un dispositif qu’il a actionné pour permettre au Gîte Loisirs de Méry-sur-Seine, le centre équestre avec structure d’hébergement qu’il gère, de surmonter la crise sanitaire qui a fortement impacté les activités. L’association a lancé une campagne de souscription de titres associatifs, l’équivalent des obligations pour une entreprise classique, rémunérés à 2 %, auprès de particuliers, des entreprises, notamment partenaires, mais aussi des banques et des collectivités.

La structure de tourisme et de loisirs espère collecter 300 000 euros pour passer le cap d’une année 2020 difficile. Ce type de financement de proximité pourrait intéresser les agriculteurs, mais aussi les artisans, les commerçants et les services qui constituent 50 % des clients de Cerfrance contre 45 % d’agriculteurs et de viticulteurs.

Pour ces derniers, Cerfrance va proposer de nouvelles solutions pour accroître la valeur ajoutée de leurs productions. « Dans un contexte de pression sociétale, les collecteurs et transformateurs sont disposés à payer davantage des produits agricoles bénéficiant d’une labellisation environnementale », fait remarquer Philippe Champignolle. Cerfrance va se mettre en ordre de bataille pour accompagner agriculteurs et viticulteurs dans une démarche HVE (haute valeur environnementale) de niveau 2. Une première étape qui peut conduire ensuite en partenariat avec d’autres acteurs agricoles, à la HVE3, voire l’agriculture biologique.

De l’énergie à revendre

La production énergétique pour améliorer les résultats économiques des exploitations agricoles.

Réfléchir à une telle politique de territoire autour de l’eau et de l’énergie, par exemple autour de la méthanisation et du photovoltaïque, font partie des résiliences potentielles. L’objectif est de trouver des revenus de diversification alors que les aléas climatiques et les décisions environnementales pèsent de plus en plus sur les résultats des exploitations agricoles.

C’est encore plus vrai dans les terroirs moins favorables aux grandes cultures. Les chambres d’agriculture de l’Aube et de la Haute-Marne ainsi que ses partenaires, Groupama Nord Est et Cerfrance ont travaillé à un outil de diagnostic permettant la résilience des exploitations. Le dispositif “Oser en Barrois” a mis en évidence la nécessité, ici comme ailleurs, de ne plus mettre tous ses œufs dans le même panier. La production d’énergie renouvelable apparaît de plus en plus comme une solution viable et sûre pour créer de nouveaux revenus. Ainsi, selon les données de l’observatoire Cerfrance, une installation photovoltaïque en couverture d’un hangar agricole engendre un résultat moyen de 7 000 euros par an.

Une rentrée non négligeable lorsqu’on sait que dans le Barrois, le revenu moyen sur la période 2013-2018 d’une exploitation agricole est de 35 €/ha en Haute-Marne et 81 €/ha dans l’Aube. Plus lourde en termes d’investissements, la méthanisation assure également des revenus qui peuvent se révéler encore plus intéressants que le photovoltaïque.

UN TIERS D’EXPLOITATIONS DIVERSIFIÉS

« Nous accompagnons nos clients tout au long du processus dans leurs projets énergétiques sur les volets financement, juridique conseil et même collectif lorsqu’il s’agit de méthanisation par exemple », conclut Philippe Champignolle, le président de Cerfrance Aube. Une diversification énergétique qui, au-delà des aspects financiers a d’autres retombées positives, par exemple en terme de développement durable puisqu’il s’agit d’énergies renouvelables. Dans le cas de la méthanisation, les exploitations agricoles peuvent également utiliser des sous-produits comme engrais organiques remplaçant avantageusement les intrants chimiques. De toute façon, la diversification, qu’elle soit agricole ou énergétique, s’installe durablement. Près d’un tiers des agriculteurs aubois se sont déjà engagés dans une voie de diversification de leurs activités et donc, de leurs revenus.

Le photovoltaïque au champ connaît un développement certain dans l’Aube.