L’heure du bilan pour le Medef Marne

Les secteurs d’activités dressent un bilan hétérogène de l’année 2020 avec des interrogations réelles pour 2021.

Près de trois mois après la fin de l’année 2020, le Medef Marne regarde dans le rétroviseur pour dresser le bilan de l’année écoulée avec un peu plus de recul et moins d’émotions. Sans surprise, le monde informatique s’est retrouvé au cœur des transformations (numériques en l’occurrence des entreprises l’année dernière), souligne Jérôme Sévéan, éditeur de logiciel (Novadis) et président de l’antenne de Châlons-en-Champagne. « Nous avons connu énormément d’activité au début de la crise sanitaire pour accompagner les entreprises dans la mise en place du télétravail. Depuis septembre 2020, les entreprises poussent à la digitalisation de leurs processus pour tenter de gagner des marges supplémentaires ou identifier des points de blocages suite aux nouvelles contraintes qui pèsent sur elles. On sent chez elles une envie d’aller se projeter et la digitalisation fait partie du processus d’identification et de transformation ». Parmi les secteurs qui se digitalisent le plus, celui du bâtiment se montre particulièrement actif, conscient de son retard et surtout extrêmement sollicité depuis un an.

Fabien Petit, spécialiste en gestion de patrimoine (Kaolin associés) note de son côté que son activité fait partie de celles qui ont été épargnées notamment par les mécanismes de protection existant. « Ces mécanismes mis en place lors des crises de 2008 pour le système bancaire et de 2011 pour l’endettement des Etats ont bien fonctionné et ont permis de rassurer les investisseurs. Les banques centrales ont joué leur rôle de rachat de dette et ça a rassuré les marchés qui ont fortement rebondi jusqu’en juin 2020 ». Globalement, les valeurs liées au développement durable et les nouvelles technologies ont fortement évolué. L’immobilier a, lui, « plus que bien tenu » en 2020 après un point haut en 2019. L’activité de conseil en gestion de patrimoine a quant à elle été plutôt épargnée par la crise et par les différents confinements malgré une baisse des encours de près de 12%.

Si l’industrie est un secteur suffisamment vaste pour recenser un panel de situations extrêmement diverses, Christian Brethon, président de l’UIMM et du Medef Marne s’inquiète d’une stabilisation de l’activité sur un plateau inférieur. « Toute l’agro-industrie fonctionne. Les travaux ont été réalisés mais les nouveaux projets sur 2021 sont retardés car tout le monde navigue à vue ».

Il alerte sur les situations particulièrement préoccupantes de l’aéronautique (avec un bout du tunnel à 2024- 2025) et de l’automobile quasiment à l’arrêt depuis un an. « En automobile, le marché neuf s’écroule : les clients ne savent plus quoi acheter », s’inquiète-t-il en évoquant les niveaux de taxation extrêmement élevés de certains modèles. « Quand on voit des malus de 38 000 euros sur un véhicule on atteint des sommets ubuesques ». L’avenir de l’automobile est plus que jamais lié à la visibilité des consommateurs et des constructeurs, les problèmes étant davantage sociologiques et politiques que technologiques.

LES TP DANS L’INQUIÉTUDE

Manuel Reman, Pdg de MHCS (branche des activités Champagne du groupe LVMH) et représentant de l’Union des Maisons de Champagne au sein du Medef Marne dresse quant à lui un bilan plus positif que prévu de l’année 2020. « Avec un peu de recul sur l’année écoulée on est moins dans l’émotion et en reprenant une analyse avec un peu plus de calme, on se dit que pour une année aussi difficile on s’en est plutôt pas mal sorti. C’est un signe assez positif de la maturité de la filière », souligne-t-il. Les volumes ont baissé d’à peu près 18% alors qu’on a eu trois mois de confinement assez strict ». Le représentant du Medef dresse donc un bilan 2020 riche de plusieurs enseignements pour son secteur d’activité : « Le champagne est un produit qui reste très attractif pour les consommateurs. La désirabilité de notre produit c’est ce qui va nous faire durer dans le temps et c’est un premier point positif ». Le deuxième point positif c’est la capacité qu’a eu le champagne à pouvoir basculer de la consommation en on-trade (restauration, boites de nuit, hôtellerie) vers le off-trade (achat pour consommation à domicile : hypermarchés, cavistes). « Réorienter les volumes vers un autre canal c’est facile à dire mais difficile à faire. Avoir réussi à la faire ça, cela démontre une certaine agilité et tous les secteurs des vins et spiritueux n’ont pas été capables de le faire ». Troisième élément, selon lui, terminer l’année avec le même niveau de stock que celui avec lequel elle l’avait commencée. Une performance réussie grâce aux décisions « difficiles mais courageuses » de la filière qui ont évité le sur-stockage.

« Par ailleurs, les Maisons ont trouvé des accords de temps partiel et de congés pris avec leur personnel pour éviter au maximum le chômage partiel qui est coûteux pour les salariés et pour l’Etat ». Autre élément positif pour le champagne, l’absence de panique sur les marchés et de vente à la casse. « 2020 a été très difficile mais la crise a fait l’objet d’une bonne gestion », note Manuel Reman. Sur des marchés comme l’Australie et sur quelques Etats américains, certains opérateurs se sont retrouvés sans champagne à la fin de l’année. Pour l’UMC, il est encore un peu tôt pour faire des prédictions sur l’année 2021 mais si les mois de janvier et de février ne représentent en moyenne que 10% des volumes annuels, ils sont représentatifs d’une tendance : « Quand ils ne sont pas bons, c’est une mauvaise tendance. Là ça n’est pas le cas, nous sommes à -10% par rapport à l’année dernière sachant qu’on n’était pas encore dans les mesures strictes de confinement sur l’Europe et les Etats-Unis qui représentent les deux tiers de notre marché ».

Un optimisme qu’aimerait partager Laurent Malolepsza, chef d’agence Colas Nord-Est et représentant de la filière Travaux Publics au Medef Marne : « L’activité 2020 s’est soldée par une baisse de -10% et les carnets de commandes des entreprises sont impactés par la chute de la commande publique (-35% par rapport à 2019) ». Le volume des appels d’offres publics étant toujours en retrait, de nombreuses entreprises sont encore en activité partielle et les collaborateurs s’inquiètent. « On attend les effets du plan de relance dont les aides sont principalement ciblées vers la rénovation thermique des bâtiments. On est très impatients de voir l’activité repartir », avoue le représentant des TP.