Le marché des cadres en forte contraction

La crise n’a pas épargné le recrutement des cadres en Occitanie. L’Apec a rendu le 6 mai dernier un bilan fortement marqué par les effets de la pandémie. Le résultat est sans appel : avec 11 210 recrutements réalisés en 2020 en Occitanie, l’année s’est soldée par une contraction de -29 % par rapport à 2019, soit 10 points de moins qu’au niveau national avec 228 700 recrutements au total. Si l’Ile-de-France souffre d’un recul de 19 % (soit 50 % du bassin des cadres en France), le territoire régional est, sans conteste, le plus touché de l’Hexagone en 2020, devant la Normandie et les Hauts-de-France, compte tenu de l’immobilisation du secteur aéronautique, grand pourvoyeur de cadres ingénieurs, particulièrement fragilisé. « C’est la première fois que nous accompagnons autant d’ingénieurs de l’aéronautique fraîchement diplômés alors qu’ils sont normalement chassés dès les bancs de l’école. Certains pans d’activités sont totalement à l’arrêt », commente Jean-Sébastien Fiorenzo, délégué régional Apec Occitanie.

Ainsi, seule la Bretagne tire son épingle du jeu avec une tendance baissière nettement moins marquée (-0,5 %) notamment grâce aux secteurs de la cybersécurité et de l’informatique qui recrutent massivement, ainsi qu’à l’agroalimentaire qui a mieux résisté.

2 950 POSTES CRÉÉS

Tandis qu’une dynamique était en marche en 2019 sur l’ensemble du territoire national atteignant près de 300 000 recrutements cadres, du jamais vu, et que les entreprises sondées prévoyaient une belle progression, la Covid a provoqué un coup de frein massif. « Pour autant cette baisse s’avère moins brutale au regard des estimations réalisées au sortir du premier confinement, qui prévoyaient une baisse de 30 à 40 % en région », souligne Jean-Sébastien Fiorenzo. D’ailleurs pendant le premier confinement, les offres d’emploi publiées sur le site de l’association ont chuté de 60% et de 22 % lors du deuxième confinement. Cependant, en dépit du ralentissement de l’activité économique, 2 950 nouveaux postes de cadres ont été créés à l’échelle régionale, tandis qu’on dénombre 3 380 promotions internes au statut cadre.

TOULOUSE : VIVIER DE CADRES

Sans surprise, la Ville rose et Montpellier arrivent en tête, avec un bassin d’emplois plus dynamique, concentrant ainsi 73 % des offres. Toulouse reste pour l’heure particulièrement attractive avec une part de 51 %, tandis que Nîmes et Perpignan atteignent respectivement 4 % et 3 % des offres publiées. « Cependant avec l’émergence du télétravail, la cartographie des cadres qui résident en Occitanie va changer dans les mois à venir, avec des migrations vers des territoires plus ruraux. C’est un fait de société qui va prendre de l’ampleur et qui sera beaucoup plus visible chez les cadres que les non-cadres. Ce qui aura ainsi un impact sur l’emploi local en dehors de Toulouse », avance-t-il.

Comme les années précédentes, le secteur des services à forte valeur ajoutée est le plus pourvoyeur d’emplois cadres en Occitanie. Il représente, à lui seul 41 %, légèrement en deçà du niveau national qui atteint 42 %. L’ industrie recrute, quant à elle, 23 % des cadres du secteur privé, contre seulement 18 % au global en France métropolitaine. Les autres services et le commerce représentent, eux, respectivement 19 % et 13 % des recrutements. S’ensuit, loin derrière, le secteur de la construction avec seulement 5% de cadres recrutés. Si pour l’heure, les entreprises de plus de 250 salariés recrutent davantage de cadres, représentant 53% du total, la tendance devrait s’inverser en 2021. Les PME devraient ainsi totaliser 73 % des recrutements. « La baisse des recrutements cadres résulte également du fait que le tissu local n’est pas homogène, avec une part majoritaire de grandes entreprises qui ont particulièrement été touchées par la crise ».

PERSPECTIVES À LA BAISSE POUR L’OCCITANIE

L’horizon 2021 va-il s’éclaircir pour les cadres occitans ? Avec 11 060 embauches attendues en 2021, la région Occitanie se situe au 7e rang des recrutements de cadres pour 2021, derrière les Pays de la Loire et devant le Grand Est. Une stabilisation par rapport à 2020, mais encore loin des niveaux de 2019. « Les intentions d’embauche progressent de 8 % au niveau national alors qu’en région, elles accusent encore un léger recul, soit -1 %. Entre 2019 et 2021, la baisse prévue atteindrait 12 %. » Les secteurs des services et de l’industrie concentrent la plus grande part des embauches de cadres attendus, avec respectivement 72 % et 18 % des recrutements. Les cadres informatiques et/ou ingénieurs restent par ailleurs les fonctions les plus recherchées par les entreprises du territoire.

JEUNES ET SENIORS EN RETRAIT

Dans le détail, 47 % des recrutements concernent des cadres de moins de cinq ans d’expérience en 2021, un signal encourageant alors même que les jeunes diplômés sont particulièrement impactés par les effets de la pandémie. « En temps de crise, ce sont toujours la catégorie des jeunes et des seniors qui sont les plus touchées, souligne le délégué régional. Nous continuons donc nos différents plans d’action notamment à travers la solution “1 jeune, 1 solution” dont nous sommes partenaires. Nous avons intensifié le nombre d’ateliers pour faire face à cette vague de jeunes diplômés qui nous contactent. De septembre 2019 à septembre 2020, nous avons multiplié par quatre les demandes de rendez-vous ». En effet, en 2021, un quart de la promotion 2019 est toujours en recherche d’emploi. La situation reste également préoccupante pour les seniors de plus de 15 ans d’expérience. Seuls 12 % des recrutements concernent cette catégorie. Pour tenter de faire face à cette problématique, l’Apec lancera un nouveau service en octobre prochain baptisé « Talent Seniors », soit 50 cadres seniors parrainés à Toulouse et Montpellier. Malgré ces difficultés, Jean-Sébastien Fiorenzo conclut sur une note d’optimisme. « Avec la reprise, il est possible que les recrutements soient plus importants que prévu ».