Comment s’en sortent les collectivités occitanes ?

27 collectivités régionales ont été interrogées dans le cadre de l’enquête menée par la Cour des comptes à laquelle a participé la chambre régionale d’Occitanie. De quelle manière les budgets des collectivités ont été affectés par la crise sanitaire, avec quelles conséquences sur leur équilibre budgétaire et leurs réserves ? Tour d’horizon.

L’heure des comptes a sonné pour les collectivités locales – intercommunalités, métropoles, départements et régions. La pandémie a-t-elle eu raison des budgets locaux et à quel degré a-t-elle affecté les collectivités occitanes ? Quelles conséquences sur les réserves budgétaires des collectivités ? C’est à ces trois questions que tend à répondre le second fascicule du rapport annuel sur les finances publiques locales de la Cour des comptes à laquelle a participé la chambre régionale d’Occitanie. 

Une démarche dont le président André Pezziardi a souligné le « caractère innovant » lors d’une conférence de presse à Toulouse le 15 décembre, pointant toutefois les limites de l’enquête puisqu’elle ne prend pas en compte le deuxième confinement, les données financières s’arrêtant au 30 septembre. Au total, 27 collectivités régionales comprenant 13 départements, huit communes (Béziers, Montauban, Montpellier, Narbonne, Nîmes, Perpignan, Sète et Toulouse) et cinq intercommunalités (Métropole de Toulouse, Montpellier, Communautés d’agglomération du Grand Alès, du Muretain, Communauté urbaine de Perpignan) sont passées au crible pour dresser un premier tableau à demi-teinte. 

Comme les 322 collectivités interrogées à l’échelle nationale qui représentent 60 % de la dépense publique locale, les entités régionales ont plutôt bien encaissé le début de la crise, dû au résultat de la contractualisation avec l’État (Loi du 22 janvier 2018). « Depuis trois ans, elles ont réduit leur endettement, reconstitué leur autofinancement et développé leurs dépenses d’investissements. Mais l’impact de la crise creusera des disparités, les collectivités locales n’ayant pas la même nature de recettes et de dépenses », relève André Pezziardi. Une situation financière « saine » en 2019, qui a de fait limité les dégâts. Cependant si les budgets ne sont, pour l’heure, pas démesurément impactés par la crise, les effets se feront sentir d’ici deux ans. 

DÉPARTEMENTS FRAGILISÉS 

Les collectivités qui dépendent, pour leurs recettes, du niveau d’activité d’économie sont ainsi plus fragilisées. C’est le cas des départements. Ces derniers décrits comme les « collectivités les plus sensibles », selon Sonia Penela, conseillère à la Chambre régionale, accuseront davantage l’impact de la crise en raison d’un effet ciseau entre des recettes en berne (effondrement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises [CVAE], baisse des droits de mutation à titre onéreux [DMTO] qui devrait perdurer) y compris en 2021 et des dépenses en hausse. Notamment l’augmentation de 10 % des bénéficiaires du RSA à la fin 2020. Dans ce contexte, les départements anticipent une baisse de leur épargne brute de 45 %, soit une perte de 4,2 Md€, ce qui conduirait à une dégradation de leur capacité de désendettement, passant globalement de trois à six ans, « ce qui toutefois reste encore loin du seuil d’alerte fixé à 10 ans et laisse une marge », souligne le président de la chambre régional. Bien que fragilisés, les départements auraient toutefois la capacité d’absorber les effets de la crise, en faisant notamment appel pour certains dont l’Aude, le Gard et l’Hérault, à un dispositif d’avances sur DMTO. 

Le tableau semble, en marge, s’assombrir pour le bloc communal avec une chute prévisionnelle de 30 % de l’épargne brute. Ce recul résulte notamment de l’interruption des recettes, étroitement liées à la fiscalité économique : en particulier les communes touristiques ou les collectivités confrontées à des pertes brutales liées aux équipements culturels, sportifs ou de loisirs, ou encore au transport collectif, à la taxe de séjour, etc. Ces pertes perturbent inévitablement des investissements potentiels, malgré un dispositif de compensation partielle mis en place par l’État. 

Selon le rapport, les régions devraient être un peu moins affectées. Alors qu’elles sont intervenues lourdement auprès des acteurs économiques, leur niveau de dépenses d’investissements devrait se maintenir à la hausse. L’accord de méthode États-régions du 30 juillet 2020 devrait aussi renforcer leurs ressources en 2021 et accroître leurs actions en faveur de la relance économique. 

Sans surprise, les deux fleurons de l’activité économique de la région, le tourisme – qui représente 11 % du PIB régional et 110 000 emplois – et l’aéronautique fortement affectés par la crise ont particulièrement mobilisé des aides de l’ensemble des entités publiques. Régions et départements ont agi de concert, une première à l’échelle nationale, avec notamment le fonds L’Occal, qui mobilise la Région, 12 départements et 145 intercommunalités à hauteur de 75 M€ et crée ainsi « un effet de levier massif ». L’Occitanie est l’une des trois régions françaises à avoir le plus soutenu les acteurs économiques. 

Pour autant, André Pezziardi s’interroge : « La perte de la compétence générale par les régions et les départements est-elle justifiée ? Faut-il exclure les départements de l’aide économique ? Faut-il territorialiser davantage les politiques publiques pour qu’elles puissent répondre davantage aux besoins des collectivités ? ». En substance, savoir également ce que le passage en statut de métropole a changé… En attendant, la chambre régionale présentera le premier trimestre 2021, une enquête actualisée sur l’impact de la crise sur les collectivités occitanes et une synthèse sur les aides apportées.