Démocratiser l’art expérientiel

Nataliya Velykanova. À travers son projet Gate22, elle souhaite lancer le concept de musée 2.0 et fédérer une communauté d’artistes internationaux.

Une expérience à la croisée des chemins entre l’art traditionnel, le cinéma et le jeu vidéo, est en substance le projet de Nataliya Velykanova. À l’aube de la quarantaine, cette Ukrainienne d’origine, installée à Toulouse depuis 2006, a toujours baigné dans le monde artistique, inscrite aux Beaux-Arts en parallèle de sa scolarité depuis l’âge de huit ans. Après un double diplôme en architecture et une première aventure dans le milieu, elle se lance en tant que designer. Un jour, elle décide, pour s’amuser, de réaliser des créations 2D. « Il existe beaucoup d’artistes dans l’art digital qui n’ont pas le moyen de valoriser leurs créations et c’est dommage. La réalité virtuelle en est un, contrairement aux réseaux sociaux sur lesquels trop d’images affluent, ce qui n’est pas valorisant pour l’art. L’évolution numérique peut aussi se traduire par l’art. » Autour d’elle, l’idée trouve un écho, la réalité virtuelle (RV) étant rarement exploitée dans cet univers qui « peut pourtant gagner en force grâce cette technologie inventive ». Surtout que la RV a été pour elle un véritable coup de foudre, « une expérience cosmique qui m’a subjuguée par ses capacités illimitées ». En septembre 2019, elle intègre le pré-incubateur de la Mêlée, Le Starter, afin de réaliser une étude de marché plus approfondie. « La RV demande encore de la pédagogie surtout auprès des plus de 50 ans, même si certaines personnes âgées adorent le concept ! Pour les digital native, bien que ce ne soit qu’un écran parmi d’autres, je souhaite leur apporter une nouvelle compréhension de l’art », souligne cette mère de famille.

Le projet Gate22 est ainsi multifacette. « L’idée est de proposer au public une évasion dans un monde fictif. Concernant les artistes, nous souhaitons leur donner un terrain de jeu et fédérer une communauté à l’échelle internationale car la VR nécessite une kyrielle de compétences. Et l’idée est de créer plusieurs expériences adaptées à des publics différents. » Pour l’heure, 90 artistes provenant de 45 pays sont inscrits. Depuis octobre, Gate22 a lancé une opération de crowdfunding sur la plateforme Ulule, espérant récolter 7 000 €. « Ce financement aidera à boucler notre première expérience de 14 minutes baptisée Introspexion, qui sert de prototype. Six artistes planchent dessus. » Dès 2021, la jeune pousse souhaite lancer ses premiers appels à projet et espère convaincre un financeur pour démocratiser le concept de musée 2.0. « 2 M€ seraient nécessaires pour lancer la machine et rémunérer les artistes. »

Cette expérience intégrera différentes dimensions : des lieux culturels où des casques seront à disposition, une structure sous forme de « musée mobile » mais aussi des plateformes de contenus de réalité virtuelle et enfin un site web, pour ceux qui n’ont pas de casques, où les expositions seront visibles en vidéos 360°. Le projet aurait séduit le Quai des savoirs, la Cartoucherie et le Musée des Augustins. Un projet de subvention de l’Eurorégion en partenariat avec un musée à Barcelone est également en cours. Cet art expérientiel semble avoir de beaux jours devant lui.