« Dans l’automobile, l’activité ne pourra pas redémarrer sans un coup de starter »

Comme tout le volet commercial, le service automobile souffre. Ce début de déconfinement est reçu avec une extrême prudence par le président du Conseil national des professions de l’automobile (CNPA), Francis Bartholomé.

RésoHebdoÉco. Qu’attendait-on de l’année 2020 pour vos professions?

Francis Bartholomé. Nous nous préparions à une année un peu compliquée, malgré une relative stabilité. Les évolutions côté véhicules neufs, avec de nouvelles normes environnementales, faisaient planer quelques incertitudes sur les entreprises, mais sans inquiétude particulière. Une année-charnière en termes technologiques, pour une clientèle un peu déstabilisée.

Le constat, au milieu du gué et de la crise sanitaire ?

Il faut distinguer l’industrie et les services. Il faut d’abord noter que les deux secteurs essaient aujourd’hui de collaborer au mieux, en intelligence, pour qu’un plan de relance cohérent puisse être efficient. À quoi servirait de produire si on ne vend pas ? D’où la mise en place d’un comité stratégique sur l’ensemble de la filière automobile, qui siège à Bercy. Côté services, de la vente à l’entretien en passant par la déconstruction, la crise est profonde, et ce depuis le premier jour du confinement, avec la fermeture des établissements recevant du public et la désertion totale des ateliers dès le 16 mars. Sur les chiffres d’affaires, la vente est à zéro ou presque, et les autres activités impactées à 90 %, sur tous les métiers, même la distribution de carburant (-80 %). D’où l’importance d’une reprise bien préparée.

Comment ?

Nous y travaillons, à travers un plan de Relance Rapide et Responsable, trois R, particulièrement discuté, pour préparer tous nos métiers au déconfinement, en relation avec le ministère de l’Économie. Sur le plan commerce, des ventes en neuf ou occasion, nous avons pu repartir dès le 11 mai, tout en sachant qu’à l’instar d’autres activités commerciales, la reprise ne sera pas immédiate. Nous espérons donc des aides spécifiques et une réflexion sur la politique d’offre à mettre en place vis-à-vis de la clientèle pour inciter la demande. Avec l’aide des pouvoirs publics, qui pourraient autoriser des leviers d’action sur la TVA par exemple, ou accorder des sur-amortissements sur les véhicules de société. Ce sont des pistes pour réamorcer l’acte d’achat. Bien sûr, il ne faut pas abandonner le volet environnemental avec l’électrique ou l’hybride, mais il faut aussi épauler les véhicules traditionnels, thermiques, pour réussir la reprise et retrouver très vite de la trésorerie. Il faudra aussi adapter les offres marketing sur la réparation/entretien, pour que les ateliers travaillent.

Du côté de l’emploi, des inquiétudes ?

Nous avons une « chance », c’est que le dispositif du chômage partiel continue sur le
mois de mai, ce qui n’a pas obligé l’ensemble des collaborateurs à revenir dans des conditions dégradées. La reprise est progressive, et les contraintes sanitaires omniprésentes. L’ajustement du nombre de postes sur les différentes activités est nécessaire dans un premier temps. Et le chômage partiel individuel va nous aider, c’est une très bonne chose.

Et sur le volet industriel ?

Il faudrait je pense renforcer l’offre sur les véhicules électriques en priorité, notamment sur les flottes, pour relancer la machine. Et là-aussi, consentir à un effort du côté des différentes taxes en vigueur… Nous y travaillons, y compris avec Bruno Le Maire, avec qui nous sommes en contact tous les lundis. De notre côté, nous avons déjà préparé ce que nous appelons le Guide de moyens, répondant à nos obligations vis-à-vis de nos salariés, validé par les ministères du Travail et de la Santé, à disposition de l’ensemble de nos métiers, pour décliner toutes les possibilités pour reprendre l’activité en s’exposant le moins possible au virus. Il faut rester extrêmement prudents, pour ne pas que demain, une autre crise nous fasse replonger dans le confinement. On le voit en Allemagne, il y a quelques retours de cas… Il faut sécuriser au mieux nos activités.

Propos recueillis par Isabelle Auzias, Tribune Côte d’Azur, pour RésoHebdoÉco, association regroupant 27 titres de presse hebdomadaire économique régionaux en France. reso-hebdo-eco.com