Créer un nouveau modèle agricole

Cet ancien ingénieur réinvente l’agriculture en milieu urbain en alliant les techniques du hors sol et de la permaculture.

Apporter un nouveau modèle économique agricole en juxtaposant les techniques du hors-sol et la permaculture, agrémenté d’une traçabilité 3.0 afin de répondre aux exigences des consommateurs étouffés par la « malbouffe » et croulant, en parallèle, sous un florilège de labels : c’est le pari de Bastien Quadjovie, créateur de Biovafarm. « L’important est de savoir d’où proviennent les aliments et de respecter leurs valeurs nutritives. Je veux revenir aux bases », explique le dirigeant, qui a remporté le prix Spécial Métropole lors des Trophées de l’économie numérique en juillet dernier.

À l’aube de la trentaine, cet ingénieur des systèmes en aéronautique et spacial, qui a atteint le Graal en travaillant, entre autres, pour la Snecma, le réacteur nucléaire Iter ou les sous-marins Barracuda, a quitté en 2017 son poste au sein de la flotte navale nationale pour se lancer dans le travail de la terre en Occitanie. « J’ai d’abord eu une prise de conscience environnementale puis personnelle. C’est grâce à un ami que j’ai découvert la culture hors-sol. Le côté technique m’a plu, alors j’ai cherché une solution innovante ».

Des dizaines de livres avalés, l’entre- preneur a poussé sa réflexion sur la corrélation entre la culture hors-sol, très prisée à Singapour et la permaculture encore frileuse en France. « Le hors-sol est très énergivore. Le défi était de limiter les pertes énergétiques et d’optimiser la récupération des déchets. Aussi, la permaculture permet de limiter des pertes importantes en cas de sécheresse ». Par ailleurs, celui qui tient aux valeurs de la terre soulève une aberration contre laquelle il compte se battre : « il faut choisir des graines paysannes qui permettent de produire plus dans le temps, mais seul l’échange est autorisé en France ».

Plusieurs rencontres avec des agriculteurs plus tard, suivie de la création d’un logiciel qui « permet d’une part d’avoir un état général de l’exploitation mais surtout de réunir des critères via des capteurs, concernant la température de l’air, de l’eau, la pression atmosphérique et les solutions nutritives des plantes », deux projets sont ainsi prêts à sortir de terre : un espace à Toulouse qui servira de démonstration où l’entrepreneur sera seul pour faire fructifier l’entreprise, et une ferme d’un hectare à Ramonville, visant un CA de 90 K€ en collaboration avec la collectivité, sous forme d’une société coopérative d’intérêt collectif où il sera le chef d’orchestre. « Nous avons demandé un fond de 400 K€ à la Maif qui vient de débloquer 50 M€ pour tous les projets liés au développement durable. Les récoltes seront destinées à la collectivité, aux restaurants d’entreprise, aux particuliers, etc. »

Son objectif est double : être exploitant et convertir d’autres agriculteurs à une solution plus écologique et moins onéreuse. « La monoculture détruit tous les systèmes. Pour pérenniser, il faut de la diversité », conclut ce Togolais d’origine qui a donné à l’entreprise son cinquième prénom : « Biova signifie “assume son destin”, comme ma ferme ».