Covid-19 : quel plan pour soulager les PME ?

SOS Events

Le Collectif SOS event 31 : (de gauche à doite) Emmanuel Hilaire, propriétaire exploitant de deux hôtels indépendants, Thomas Fantini, président groupe Esprit Pergo, Olivier Thomas, directeur délégué Grape Hospitality, Jean-François Renac, fondateur de Miharu, Steve Gallais, fondateur de l’agence Verywell et Pierre Garrigues, fondateur de l’agence PGO.

Alors que l’Occitanie compte près de 150 cas de coronavirus, les chefs d’entreprise retiennent leur souffle. Selon eux et les instances patronales, les mesures annoncées par le gouvernement représentent une avancée mais restent insuffisantes face aux difficultés que rencontrent les entreprises, déjà affaiblies par la vague des Gilets jaunes et les grèves.

Une peur qui grandit, une activité économique déjà ébranlée, qui ralentit. Quelles mesures adopter pour endiguer la paralysie totale de certaines entreprises ? Alors que l’épidémie pourrait avoir un impact de 0,1 point sur la croissance française, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire a annoncé lors d’une conférence de presse le 9 mars, une batterie de mesures censées contenir l’inquiétude des chefs d’entreprise évoluant particulièrement dans les secteurs de l’industrie, de l’événementiel et du tourisme face au défaut d’approvisionnement, aux annulations ou reports d’événements et aux pertes colossales de chiffre d’affaires. Parmi ces mesures figurent l’étalement des charges sociales et fiscales, le renfort de la Bpifrance pour soutenir la trésorerie des PME et entreprises de taille intermédiaire, le rééchelonnement des crédits bancaires, la résolution des litiges entre clients et fournisseurs, le recours au chômage partiel et les dégrèvements d’impôt directs pour les entreprises menacées de disparition.

PLAN DE SOUTIEN MASSIF

En Occitanie, la réaction des instances patronales ne s’est pas fait attendre face à cette situation inédite. « L’objectif n’est pas d’alimenter ce climat de peur mais d’adopter les bonnes mesures », entend-on de part et d’autre, pour amoindrir les pertes d’activité des secteurs touchés de plein fouet par les conséquences de la propagation du Covid-19 et coller davantage à la réalité du terrain. Aux grands maux, les grands remèdes ? « 99,2 % des entreprises ont moins de 50 salariés, la plupart d’entres elles sont sous-traitantes ou sont sous capitalisées et n’ont pas la capacité financière de faire face à deux, trois ou quatre mois de difficultés. Il n’y a pas d’ombre sur le papier au point de bloquer l’économie et pourtant c’est le cas, toutes les entreprises gèlent leurs investissements. Les annonces du ministre sont intéressantes mais insuffisantes. Les entreprises pourront ainsi solliciter des aides par simple envoi de mail sans distinction; et reporter leurs charges, ce qui est totalement inédit. C’est un pas en avant mais si le business ne suit pas, avoir la possibilité de payer plus tard, c’est avoir la possibilité de mourir plus tard. », commente Samuel Cette, président de la CPME Occitanie qui compte près de 1 400 adhérents et formule le vœu d’une simplification maximale des process annoncés et l’injection immédiate de trésorerie par des prêts sur l’honneur sans constitution de dossier « pour éviter une surcharge de traitement des dossiers qui serait ingérable. Il y a urgence à ouvrir les vannes. Après on pourra punir les éventuels tricheurs » Et si cela apporte une bouffée d’oxygène aux entreprises, « reste qu’il faudra cependant rembourser ». La CPME Occitanie mène, par ailleurs, une étude sur l’ensemble de la région auprès des entrepreneurs afin de mettre en œuvre un plan d’action de continuité. Parallèlement, le Medef 31 qui soutient les entreprises impactées et joue un rôle de conseiller, pointe également les limites des premières annonces gouvernementales. « Ce sont des mesures beaucoup plus fortes et ambitieuses que nous attendons. Il faut un plan de soutien massif tel que le dégrèvement des charges sociales et fiscales, et la mise en place de fonds d’aides régionaux, nationaux ou européens. Les reports d’échéance valent uniquement quand il y a report d’activité. À l’échelle nationale, nous évoquons une prise en compte des charges d’exploitation par les assureurs qui pourraient eux-mêmes être soutenus par l’État, au vu de la situation. En ce qui concerne les marchés publics, il faudrait proroger un report de six mois pour que les entreprises puissent bénéficier d’une continuité de leur activité en 2021 », avance Pierre-Marie Hanquiez, président du Medef 31 qui évoque « une dichotomie entre la crise sanitaire et la dimension économique ». La situation étant en perpétuelle évolution, tout l’enjeu est d’ajuster les décisions aux réalités de l’ensemble des filières frappées par la crise sanitaire.

LES SERVICES DE L’ÉTAT SE METTENT AU DIAPASON

De leur côté, les services de l’État et les chambres consulaires travaillent de concert pour agir et incitent les entrepreneurs à employer au plus vite les solutions déjà mises en place pour amortir le choc. Lors d’une réunion de crise organisée par la CCI le 11 mars, tous les services de l’État ( préfecture, Direccte, Urssaf, direction régionale des Finances publiques et Bpifrance) se sont réunis au côté du président Philippe Robardey, pour rappeler les mesures à plus de 200 chefs d’entreprise présents. Les interrogations ont fusé dans la salle. Certains ont contenu leur colère à l’image d’un entrepreneur dans le secteur de l’événementiel qui demande d’imposer aux clients « qui annulent à la chaîne », de verser les acomptes. D’autres ont émis l’idée de supprimer les charges sociales plutôt que de recourir au chômage partiel. D’autres encore se demandent s’ils pourront bénéficier des dispositifs pour réduire l’impact, même si les chiffres ne montrent pas encore de signes négatifs. De son côté, la direction des Finances publiques a évoqué « un retournement foudroyant de l’activité en seulement quelques jours » et la Direccte a constaté « un nombre important de demandes de chômage partiel », la compensation forfaitaire passant d’ailleurs de 7,74 à 8,04 € pour les entreprises de moins de 250 salariés. Aussi, la chambre des métiers et de l’artisanat et la CCI ont activé une cellule d’appui. La chambre consulaire lance également une enquête auprès de ses ressortissants pour récolter des propositions et recenser les difficultés majeures du tissu économique haut-garonnais. Si Philippe Robardey craint que « la crise frappe tout le monde sur une durée indéterminée mais qui s’annonce longue », il invite cependant à rester vigilent. « Il ne faut pas surtransposer les situations » pour limiter la casse.

Parmi les plus touchés, le secteur de l’événementiel fait face à une chute de 60 à 95 % des commandes, et le secteur de la restauration et de l’hôtellerie annonce 10 à 20% de perte de chiffre d’affaires annuel. L’objectif pour l’État, les organisations patronales et les chambres consulaires est ainsi de limiter les dégâts et de redonner un peu de souffle aux entreprises, qui après une relance éventuelle de l’activité, devront pérenniser les emplois. Et tout le monde s’accorde à dire que la fermeture des écoles accélère sans aucun doute ces difficultés avec l’explosion du taux d’absentéisme au sein des équipes, le télétravail n’étant pas toujours la solution adéquate. Lors de son allocution le 12 mars, le chef de l’État, Emmanuel Macron s’est engagé à mettre en place des mesures « exceptionnelles et massives » de chômage partiel et à ce que l’État prenne « intégralement en charge » l’indemnisation de certains salariés. À suivre.

Collectif SOS event 31, une réponse à la crise ?

Redonner du souffle aux entrepreneurs et les accompagner vers la relance

Certains entrepreneurs s’unissent pour proposer des solutions et amortir les conséquences du coronavirus sur leurs activités. Le Collectif SOS event 31, qui réunit 200 entreprises de l’événementiel et 100 restaurateurs de la Métropole toulousaine, entend actionner des leviers et espère que l’État déclare un cas de force majeure. À sa tête, Jean-François Renac, fondateur de Miharu, une société spécialisée dans l’exploitation de lieux d’événementiel, souligne : « nous sommes dans un état de catastrophe économique. Nous atteignons 60 à 95 % d’annulations ce qui représente entre 40 et 60 % de CA à l’année. Il faut permettre aux assurances professionnelles de prendre le relais. Nous demandons aussi des mesures de dégrèvement ou d’exonération. Également, la mise en place d’un fonds de solidarité pour compenser une partie de la perte du chiffre d’affaires et en parallèle nous souhaitons que nos clients soient plus responsables concernant le versement des acomptes et le respect des conditions d’annulation et de report. Nous avons besoin de trésorerie pour exister dans six mois et répondre à leurs besoins. Certains annulent sans condition et parlent même de nous blacklister ». De son côté, Thomas Fantini, directeur du groupe Esprit Pergo qui, emploie une centaine de collaborateurs dont la moitié est actuellement en chômage partiel pour trois mois, déplore une perte de 700 K€ sur l’ensemble de son groupe et s’inquiète de l’avenir des entreprises.« Les reports vont cannibaliser les marchés qu’on aurait pu obtenir en automne, nous n’aurons de fait pas d’évolution de CA. Nous collaborons donc avec les grosses entreprises et les institutions pour accompagner les entrepreneurs vers une forte relance, protéger les emplois et soutenir leur moral car la plupart a envie de tout arrêter ».