COVID 19: l’activité malgré tout

Batiment

Le secteur du bâtiment continue de travailler et d’honorer ses chantiers comme il le peut, en maintenant la sécurité de ses salariés avec parfois “les moyens du bord”.

Bien que le confinement ait débuté il y a trois semaines, de nombreuses entreprises continuent leurs activités ou ont amorcé une reprise, afin de limiter les dégâts économiques.

Les mots du président de la République, Emmanuel Macron, lors de son allocution télévisée du 16 mars résonnaient tels des boulets de canons : « Nous sommes en guerre ». Martelés à de nombreuses reprises, ils faisaient écho non seulement à la situation sanitaire, mais aussi à celle sous-jacente, économique. Car, sur la durée, qui peut dire quelles entreprises seront encore debout ? Si de nombreuses aides ont été mises en place en urgence (voir numéros 7856, 7857, 7858), toutes les structures ne sont pas concernées par les mesures de soutien.

L’arrêté du 15 mars 2020, portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 précise : « Considérant que l’observation des règles de distance étant particulièrement difficile au sein de certains établissements recevant du public, il y a lieu de fermer ceux qui ne sont pas indispensables à la vie de la Nation tels que les cinémas, bars ou discothèques ; qu’il en va de même des commerces à l’exception de ceux présentant un caractère indispensable comme les commerces alimentaires, pharmacies, banques, stations-services ou de distribution de la presse ; qu’il y a lieu de préciser la liste des établissements et activités concernés et le régime qui leur est applicable en fonction de leurs spécificités. »

LE BÂTIMENT TOUJOURS SUR LE PONT

Le flou sur certains secteurs, notamment celui du bâtiment a donc poussé les entreprises à s’adapter, malgré la contradiction entre les discours officiels; celui de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, enjoignant les entreprises du BTP à poursuivre le travail, et de l’autre, ceux des responsables de santé, insistant sur le confinement et les gestes barrières…

Concrètement, les premiers jours ont été compliqués pour savoir la conduite à tenir. « La veille de la première déclaration du président de la République, mes salariés et moi étions sereins et optimistes. Mais dès le lendemain, nous avons reçu des mails de fournisseurs et de collaborateurs nous annonçant qu’ils mettaient leur activité à l’arrêt », raconte Guillaume Husson, directeur de l’entreprise de couverture Husson. Après s’être à son tour mise à l’arrêt, afin de respecter les mesures de confinement, l’entreprise redémarre son activité, suite aux déclarations de la ministre du Travail qui indique que le secteur du BTP doit maintenir ses chantiers. Car dans un premier temps, face aux difficultés, Guillaume Husson fait une demande de chômage partiel pour ses salariés. « Après avoir envoyé une demande d’autorisation de chômage partiel à la DIRECCTE, je me suis vu demander pourquoi je n’avais pas déjà mis tous mes salariés en télétravail ! Dans une entreprise de couverture, c’est une blague ? » fulmine le chef d’entreprise. Avec « les moyens du bord », les 3⁄4 des salariés ont donc repris le travail, « en se lavant régulièrement les mains, en allant sur les chantiers avec leur propre véhicule et en respectant les distances de sécurité». Pour le moment, l’entreprise de couverture ne déplore pas d’annulation de chantiers et en a même rentré deux nouveaux. En revanche, c’est l’approvisionnement en matières premières qui inquiète, certaines comme le zinc, venant d’Amérique du sud ou d’Afrique subsaharienne.

LE SECTEUR DE L’HORTICULTURE SE RACCROCHE AUX BRANCHES

D’autres secteurs considérés comme indispensables ont adapté leur activité, comme celui de l’animalerie. L’enseigne Maxi Zoo, par exemple, a réduit ses plages horaires d’accueil au public et régule le nombre de personnes présentes dans le magasin. « Nous sommes habituellement ouverts de 10 à 19 heures non stop, indique Jérémie Labat, directeur régional de l’enseigne pour une partie du Grand Est. Durant cette période critique nous avons réduit à 6 heures l’amplitude horaire d’accueil. Par ailleurs, nous avons aussi instauré un nombre maximal de clients présents à l’intérieur du magasin, fixé à cinq. Sur une surface moyenne de 400m2 cela permet aux gens de ne pas se croiser et d’être seul lors du passage en caisse. En outre, toutes les surfaces, l’espace caisse, les caddies, sont nettoyés toutes les heures. » Ces mesures ont été rendues nécessaires non seulement pour la sécurité des clients mais aussi pour celles des collaborateurs. « Nous avons également fermé les parties animalerie des magasins, car des personnes y venaient juste pour se promener », explique Jérémie Labat. L’enseigne a par ailleurs décidé de ne pas mettre ses salariés en chômage partiel, dans la mesure où certains sont déjà absents pour maladie ou garde d’enfant.

LE DRIVE COMME SOLUTION DE REPLI

D’autres enseignes, jusqu’à présent fermées mais voyant poindre un abysse financier, se sont engouffrées dans la brèche de l’ouverture autorisée sous certaines conditions. C’est le cas des jardineries comme Jardiland ou Floralie’s garden, qui ont rouvert une partie de leur rayonnage, notamment ceux où l’on trouve de l’alimentation animale mais aussi des graines pour potager. Un service de drive a en outre été mis en place, pour respecter les barrières de sécurité mais aussi pour écouler les stocks de jardinières, la filière horticole traversant en ce moment une grosse crise. Dans l’hypothèse où les ventes seraient suspendues trois mois, la Fédération nationale des producteurs d’horticulture (FNPHP) estime que la perte pour les producteurs pourrait aller jusqu’à 1 milliard d’euros. Si le travail dans les entreprises de production n’est plus possible, la moitié la plus fragile pourrait disparaître, jusqu’à 10 000 emplois pourraient ainsi être menacés (la production emploie un peu plus de 20 000 personnes en France). Les enseignes invitent donc les clients à se rendre sur leur site internet où tous les produits disponibles sont affichés. C’est aussi le cas pour les enseignes de bricolage comme Leroy Merlin, qui propose toute une gamme de produits essentiels, à venir chercher en drive selon des plages horaires attribuées. Avec l’effondrement de la fréquentation des boulangeries, parfois de moitié, certaines chaines ont aussi choisi de proposer des services de livraison à base de “package”, distribué par des livreurs.

Après trois semaines de confinement, parti pour durer encore au moins tout le mois d’avril et une partie du mois de mai, les entreprises s’organisent, aussi bien en réadaptant leurs production en faveur de « l’effort de guerre » – production en masse de masques, visières de protection ou sur-blouses (voir numéro 7857) – qu’en modifiant leur offres et modes de retrait d’achats. Quoi qu’il en soit, la récession économique est la plus importante depuis la seconde Guerre Mondiale. Le produit intérieur brut (PIB) français a chuté d’environ 6% au premier trimestre 2020, selon la dernière estimation, publiée par la Banque de France.

De plus en plus d’inscrits sur “Jesuisouvert”

Lancée le 2 avril, la plateforme www.jesuisouvert.fr recense et géolocalise les entreprises ouvertes et qui livrent ou proposent du drive. Créée à l’initiative des CCI, en collaboration avec les Chambres d’Agriculture et des Métiers et de l’Artisanat, elle s’enrichit au fur et à mesure des inscriptions. Ce site constitue désormais le point d’entrée unique permettant de connaître les coordonnées de tous les établissements ouverts sur les départements de la Marne et des Ardennes pendant le confinement. Pour connaître ces établissements, il faut se connecter sur le site, en ajoutant /et le chiffre du département. Dans la Marne, plus de 800 entreprises sont référencées dans des secteurs aussi variés que l’aide à la personne, les assurances, banques, commerce alimentaire, équipements, dépannage, services publics ou encore tabac-presse. Dans les Ardennes, 150 entreprises sont référencées.