CMA Grand Est : entre perspectives nouvelles et inquiétudes

Le siège de la CMA Grand Est est désormais à Metz.

Depuis le 1er janvier 2021, les CMA départementales du Grand Est sont devenues la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de la Région Grand Est. La séance d’installation s’est déroulée le 8 février à Metz, évoquant directions et dynamiques à donner à cette nouvelle entité.

Long aura été le chemin pour arriver à la régionalisation de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat du Grand Est. Depuis la promulgation de la loi PACTE le 22 mai 2019, les CMA départementales doivent en effet se regrouper en établissements de région. Au niveau national, il y a donc désormais 13 CMA régionales. Localement, ce sont les Chambres de Métiers des Ardennes, de l’Aube, de la Marne, de la Haute-Marne, de la Meuse, de la Meurthe-et-Moselle et des Vosges qui constituent désormais la CMA Grand Est. À ces 7 départements sont associés les chambres d’Alsace et de Moselle, obéissant non pas au droit commun mais au droit local, c’est-à-dire avec une entité juridique ainsi qu’un budget propre.

POLÉMIQUES

Ces spécificités locales ont fait l’objet d’âpres débats et polémiques quant à leur implication et participation aux politiques des CMA (voir PAMB 7899). Michel Boulant, Président de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat de la Marne s’inquiétait par exemple du fait « que la Taxe pour Frais de Chambre de Métiers perçue (232 € par artisan) concernant les 7 départements de droit général est intégralement versée à la CMAR du Grand Est. Celle-ci ne perçoit des deux autres départements de droit local (Alsace, Moselle) que le montant de 10 € par ressortissant, ce qui représente en moyenne annuelle 320 000 €. (…) Ce montant est à mettre en perspective avec les 23 millions d’euros que représentera le budget de la CMAR Grand Est, et les 15 millions d’euros du budget de la CMA de Moselle et les 31 millions d’euros de la Chambre de Métiers d’Alsace », soulignait-il.

UNE CMA RÉGIONALE POUR 500 000 ARTISANS

« Depuis deux ans nous travaillons à construire cet établissement », insiste le Haut-Marnais Jean-Louis Mouton, Président de la CRMA Grand Est, bien conscient des désaccords existants mais précisant : « Aujourd’hui, nous avons réussi à trouver un compromis afin de représenter et accompagner au mieux les 500 000 artisans de notre territoire. »

« Concrètement, cette régionalisation nous la vivons depuis 1925, car avant même que l’on créé les CMA de droit commun, préexistaient celles de droit local. Nous ne sommes pas dans le changement mais dans la continuité », note pour sa part, Dominique Klein, vice-président et secrétaire général de la CMA Moselle. Mais le feu n’est pas pour autant éteint, et les inquiétudes demeurent : « On attend depuis des années un texte qui gère cette particularité de cohabitation entre le droit local et le droit commun », souligne Bernard Detrez, président de la CMA des Ardennes, prenant cependant acte de la constitution d’une entité régionale. L’élu, qui ne se réclame en revanche d’aucun mouvement « frondeur », appuie sur la nécessité de « clarifier les choses sur l’organisation et la participation des uns et des autres. » De même, il s’interroge sur la sortie du Premier Ministre Jean Castex, qui ouvrait la porte à un élargissement des « compétences de la collectivité européenne d’Alsace ». « En cas d’autonomie, quelle serait l’impact pour la CMA du Grand Est ? » Jean-Louis Mouton oppose la représentativité égale : la CRMA est ainsi représentée par 100 élus, 10 par département, dont 2 au bureau. « Notre priorité est d’accompagner et de soutenir les artisans dans cette période compliquée », souligne le Président. Pour cela, la proximité géographique et l’accueil élargi font partie des priorités, de telle sorte qu’un artisan « ne soit jamais à plus de 30 minutes d’une CMA. » « Un artisan de Saint-Dizier en Haute- Marne par exemple est à 70 km de Chaumont mais à 30 km de Bar-le-Duc, dans la Meuse. Avec la régionalisation, les CMA respectives seront dotées des mêmes outils et des mêmes missions. On s’affranchit des frontières administratives pour s’appuyer sur un socle de compétences et d’objectifs commun », plaide Jean-Louis Mouton, ancien président de la CMA de Haute-Marne. La CRMA promet donc une offre de services identique et enrichie, axée notamment sur la formation et les accompagnements, certains secteurs manquant cruellement de relève. Concernant le siège de la nouvelle entité, il a été décidé qu’il s’établirait à Metz, « position centrale dans la région et site validé par les 10 président en 2016 », plaide Jean-Louis Mouton alors que certains présidents de CMA (Marne et Ardennes notamment) lui préférait Nancy, lieu soumis au droit commun et non au droit local.

ÉCONOMIE

Le regroupement des CMA sera-t-il aussi l’occasion d’opérer des économies ? « On est sur une mutualisation des services et d’avoir également le poids économique des Chambres d’Alsace et de Moselle permet d’appuyer nos actions », annonce Dominique Klein. Partant de l’exemple de sa propre chambre, Jean-Louis Mouton précise : « La Chambre de la Haute-Marne rentrait des déficits et est aujourd’hui sauvée pour assurer tous ses services. » Le budget global a été approuvé à 75%, « on conforte des établissements qui étaient dans des autofinancements négatifs ». Si les frais de fonctionnement vont être réduits (abonnements internet et téléphoniques mutualisés avec des renégociations permettant de faire plus de 50% d’économie), tous les emplois sont sauvegardés, soit 280 agents.