Par Daniel Mingaud, avocat à la cour, spécialiste en droit du travail
N’en déplaise aux climato-sceptiques, cet été, et sans doute les prochains, s’annoncent caniculaires ! La période est donc toute trouvée pour évoquer les obligations de l’employeur en pareille circonstance… ce sujet n’est pas pour autant « un marronnier » au sens journalistique du terme, puisque le droit du travail, dans ce domaine aussi, évolue sans cesse !
Le ministère du Travail vient ainsi de publier sur son site le Plan national canicule (PNC) et de mettre en ligne l’instruction ministérielle du 11 juin 2018 relative aux règles en droit du travail à ce sujet.
Sur un plan général, ces textes précisent qu’il appartient à l’employeur de s’assurer de la mise en œuvre de mesures permettant de limiter les effets de la canicule sur les salariés, et ce dans le cadre de son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé des travailleurs (articles L 4 121-1 et suivants et R 4 121- 1 et suivants du code du travail).
L’accent est mis sur les « ambiances thermiques », dont le risque de « fortes chaleurs », que l’employeur doit prendre en considération dans l’élaboration de son Document unique d’évaluation des risques (Duer).
Sur le plan organisationnel, outre la surveillance de la température ambiante, l’employeur doit (pour se conformer à son obligation de sécurité) :
– mettre en place, si besoin, une organisation du travail permettant au salarié d’adapter son rythme de travail selon sa tolérance à la chaleur ;
– adapter les horaires de travail dans la mesure du possible (n’en déplaise aux lève-tard) et d’organiser des pauses en conséquence ;
– s’assurer que le port des protections individuelles est compatible avec les fortes chaleurs ;
– informer tous les travailleurs des risques, des moyens de prévention, des signes et des symptômes du coup de chaleur, au besoin via l’affiche très explicite, proposée en téléchargement sur le site du ministère du Travail.
Sur le plan matériel, il lui est vivement recommandé de :
– de prévoir des mesures correctives sur les bâtiments et dans les locaux exposés au soleil (stores, ventilation forcée de nuit, films antisolaires sur les vitres…) ;
– de mettre en place des protections pour éviter tout contact corporel avec les surfaces (notamment métalliques) sujettes à une éventuelle surchauffe.
Rappelons enfin que l’employeur doit veiller tout particulièrement à l’hydratation du salarié : les travailleurs doivent disposer d’une eau « potable et fraîche » selon l’article R 4 225-1 du code du travail… et à raison d’au moins trois litres par jour et par salarié sur les chantiers du BTP (C. trav. art. R 4 225-2 et R 4 534-143). Notons que ces dernières dispositions « quantitatives » sont valables en toute saison. Les risques d’hyperhydratation étant rares, mieux vaut se conformer strictement à ces exigences réglementaires, puisqu’au regard de la communication tous azimuts faite par le ministère du Travail cette année, il va sans dire que l’inspection du travail pourrait désormais se montrer sévère au moindre manquement de l’employeur.
Si l’arsenal juridique précité peut paraître excessif, il prête moins à sourire qu’en Angleterre par exemple, et plus précisément à Liverpool (plus connue pour les Beatles que pour ses températures caniculaires), où les femmes ont le droit de travailler seins nus, si – et seulement si – elles sont employées dans un magasin de poissons tropicaux !
… Reste à savoir si les intéressées usent de ce droit (ou plutôt de cet ovni juridique) sans éveiller les consciences féministes.