Bruno Saint-Yves, marbrier et Meilleur ouvrier de France

La réalisation de la cheminée est le résultat d’un long travail mêlant pratique professionnelle et exigence documentaire. (Photo : Journal du Palais)

À Ouges, au sud de Dijon, l’entreprise de marbrerie Trévix peut s’enorgueillir d’avoir dans ses rangs un Meilleur ouvrier de France, en la personne de Bruno Saint-Yves.

Elle trône là, en majesté, au beau milieu de l’atelier de la PME Trévix, sur la zone d’activité d’Ouges. Cette cheminée qui allie marbre rouge et blanc a permis à son auteur, Bruno Saint-Yves, d’obtenir le titre d’un des Meilleurs ouvriers de France (MOF) en catégorie Tra- vaux marbriers. Un motif légi- time de fierté pour ce salarié de 29 ans, entré dans l’entreprise il y a dix ans, et pour ses patrons, Agnès et Lionel Pommey. C’est à l’été 2017 que Bruno a proposer de tenter ce concours qui est l’image même de l’exigence. Le challenge, réel, n’était pourtant pas irréaliste, lui qui travaille dans une PME où l’on est habitué à réaliser des « moutons à cinq pattes ». De plus, l’homme est un récidiviste : en 2010, il avait déjà obtenu le titre d’un des Meilleurs apprentis de France. Pour l’épreuve de MOF, le sujet imposé était le suivant : la réalisation d’une cheminée Louis XVI en marbre de Carrare et marbre rouge du Languedoc. Pour commencer, Bruno Saint-Yves s’est donc documenté en se plongeant dans des livres de géologie et d’histoire. Il fait des recherches, accumule des données. « Avec l’obligation de travailler deux marbres différents, souligne-t-il, il fallait aussi des approches de travail différentes ». Il réalise donc un premier prototype en janvier 2018.

LE SEUL, AU FINAL

S’enchaînent ensuite des journées de travail très longues, ponctuées par les tâches à réaliser pour son employeur, puis l’entraînement aux épreuves du MOF et, le soir, la rédaction d’un mémoire. Finalement, la cheminée est terminée à l’automne dernier. L’objet de 150 kilos est envoyé à Paris, dans un lycée professionnel. C’est début décembre 2018 que Bruno Saint-Yves a reçu la bonne nouvelle. Celle-ci avait d’autant plus de saveur que l’ouvrier côte-d’orien est le seul à être aller au bout de son aventure, les trois autres candidats français de la catégorie ayant jeté l’éponge avant terme. Pour autant, être seul à présenter son travail n’est pas une assurance d’obtenir le titre de MOF. Celui-ci peut très bien ne pas être attribué si le jury estime que le travail achevé n’est pas satisfaisant et il faut obtenir au moins 18/20. Le 13 mai dernier, jour de son anniversaire, Bruno Saint-Yves est donc monté à Paris pour aller chercher sa médaille. Lui et les lauréats des autres catégories ont été reçus à l’Élysée, en présence d’Emmanuel Macron. Quant à Bruno, aussi talentueux qu’humble, il demeure dans l’idée qu’on a toujours à apprendre, titre de MOF ou pas. La réputation de qualité du travail de Trévix ne peut que bénéficier de cette mise en lumière et de la valorisation d’un tel savoir-faire car, comme dans beaucoup d’autres domaines, et comme le regrette Lionel Pommey, « le petit monde des métiers de la marbrerie pourrait bien disparaître si l’on n’y prend garde… »

De gauche à droite : Bruno Saint-Yves, Agnès et Lionel Pommey.