Fabienne RoulleauAu chevet des entreprises

Cette ancienne secrétaire administrative est déléguée générale de la CPME du Tarn-et-Garonne depuis une décennie. Elle propose aux adhérents du syndicat des informations sur les nouvelles réglementations, du conseil, du soutien et de l’accompagnement. Un rôle clé, essentiel en ce moment.

L’orage gronde à l’horizon, mais quand va-t-il frapper ? Les prévisions de croissance sont catastrophiques et l’apocalypse est promise aux entreprises. Mais pour le moment, une forme de flottement prévaut. « On est dans le flou, on ne sait pas trop où l’on en est », reconnaît Fabienne Roulleau, déléguée générale de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) pour le Tarn-et-Garonne. « C’est sûr que ceux qui étaient en difficulté avant ne vont pas mieux. » Mais pour l’instant pas de fermetures en série. « On a un peu peur de ce qui va arriver, on va voir. » Pas question d’attendre les bras croisés pour autant. Fabienne Roulleau a fait partie de ceux qui ont travaillé plus qu’à l’habitude pendant le confinement. « Je suis allée au bureau tous les jours. Il y avait régulièrement de nouvelles réglementations à décrypter pour les adhérents. J’envoyais des informations au jour le jour pour nos entreprises, mais aussi pour les autres. C’est important d’aider tout le monde.» À la mi-mai, quand la France s’est doucement remise à sortir et les opérateurs économiques à fonctionner, cette pétillante quinquagénaire a ressenti un gros coup de mou. « Je travaillais seule. Et tout à coup j’étais angoissée d’être confrontée aux autres de nouveau. » Quand son patron, Michel Darios, le président de la CPME 82, lui a demandé si tout allait bien, elle n’a pas pu lui mentir. « Il a pris le temps de m’écouter, il m’a expliqué que j’avais le syndrome de la cabane. Une fois qu’il a mis le mot sur ce que je ressentais, je me suis tout de suite sentie mieux. » Fabienne Roulleau a rapidement retrouvé son enthousiasme communicatif et sa capacité à positiver. « Le confinement a apporté une nouveauté chez nous : les webinaires, ces réunions virtuelles avec nos adhérents. Je trouve que c’est une bonne chose, cela nous permet d’être plus nombreux, d’avoir avec nous des chefs d’entreprise qui sont en déplacement par exemple. »

Cette aisance numérique n’est pas une évidence, puisque l’outil informatique a longtemps été son talon d’Achille. Née en Allemagne, où elle n’a vécu que deux ans, Fabienne Roulleau a grandi en Vendée. « Je voulais être prof d’anglais, alors j’ai fait une seconde littéraire. J’ai adoré, mais je ne m’y voyais pas. Je voulais apprendre un métier, pour pouvoir partir du cocon familial. J’ai changé pour faire un Bac G, secrétariat, mais j’étais la plus mauvaise élève de ma classe, je ne maîtrisais pas la sténo-dactylo ! » Ce retard dans la formation ne l’empêche pas d’obtenir son bac, en 1983, et d’être la première de sa promotion à trouver un job.

Elle travaille d’abord pour une boîte de textile où elle est opératrice de saisie, une expérience ennuyeuse. La future déléguée générale de la CPME intègre ensuite la Société industrielle Raison frères (SIRF), qui œuvre dans l’agroalimentaire et le surgelé, à la Châtaigneraie. Une structure familiale dans laquelle elle va s’épanouir. « C’était une entreprise très formatrice, très open, on était considérés. On a créé les premiers pôles de télévente, cela n’existait pas trop à l’époque. » Fabienne Roulleau reste neuf ans à la SIRF, gravit les échelons et passe du standard-accueil au service commercial, où elle est en charge de trois secteurs géographiques importants au moment de son départ.

En 1992, naît son deuxième fils, Charly. La famille part pour Évreux, nouvelle affectation du conjoint de Fabienne, qui sert dans l’armée. Puis en 1994, direction la base de Francazal au sud de Toulouse. « Je m’occupais des enfants. J’étais coincée entre la génération des mères au foyer et celle des femmes actives. Il n’y avait pas de modèle économique pour les mamans à l’époque. » En 2002, pour aider une amie et se faire un peu d’argent de poche, elle commence à travailler 75 heures par mois dans un tabac-presse. « Ce n’était pas énorme mais parfois je les faisais en une semaine ! J’ai compris les contraintes d’avoir un commerce. »

Nouveau déménagement en 2007, direction Montauban. Fabienne Roulleau veut un vrai boulot cette fois. « J’ai regardé ma tribu de mecs, et je leur ai dit que maintenant je voulais travailler ! » Elle s’inscrit à Pôle emploi et fait un bilan de compétences. Elle suit une formation en informatique et commence à passer des entretiens d’embauche. Alors qu’elle n’y croit pas trop, elle est prise à la CPME. Pour ce job, pas vraiment de fiche de poste. « Quand je suis arrivée en 2009, on m’a donné les clés du bureau, on m’a dit “t’es secrétaire générale, tu te débrouilles”. C’était un peu stressant sur le coup. »

Ses attributions sont variées. D’un côté, il faut organiser la vie du syndicat, préparer les réunions du bureau, l’assemblée générale annuelle, et s’occuper du recrutement de nouveaux adhérents. D’un autre côté, il s’agit de faire vivre ce réseau d’entrepreneurs. « Je dois comprendre les lois, les décrets, les décrypter, les mâcher et les rendre digestes pour les chefs d’entreprise. » Fabienne Roulleau organise également des réunions thématiques mensuelles avec des experts. La dernière portait sur la reprise économique après le confinement.

Épaulée par d’autres structures qui accompagnent les entreprises, comme la CCI, elle lance en 2010 l’Entrepreneuriat au féminin. « L’idée, c’était de faire du conseil et de l’accompagnement spécifique. » Les thématiques de ces rencontres portent sur l’estime de soi, la conciliation vie privée – vie professionnelle, et sur des points précis comme les démarches administratives ou financières. Ce réseau a porté ses fruits, les entrepreneuses sont beaucoup mieux représentées, notamment au sein de la CPME 82. « Avant, on n’avait que 3 à 4 % de femmes au conseil d’administration et au bureau. Maintenant, c’est 40 %. »

Fabienne Roulleau est engagée affectivement dans son travail. « Quand certains de mes chefs d’entreprise avancent, ça me fait du bien. En ce moment, on voudrait éviter que des gens passent au travers de la raquette, qu’ils aient raté les infos sur les aides. Si une entreprise s’éteint, ça me fait mal. » Avec une déléguée générale aussi impliquée, les adhérents de la CPME sont entre de bonnes mains.

Parcours

1965 Naissance à Trier (Trèves), en Allemagne
1967 Sa famille s’installe à La Châtaigneraie, en Vendée
1983 Après avoir changé d’orientation en première, obtention d’un Bac G. Premier boulot dans une entreprise de textile, puis recrutée quelques semaines plus tard par la SIRF, société de l’agroalimentaire
1986 Mise au monde de Tony, son premier fils
1992 Naissance de Charly, et déménagement à Évreux. Fabienne Roulleau devient femme au foyer
1994 Installation au Lherm, au Sud de Toulouse
1997 Naissance d’Elliot
2002 Commence à travailler dans un tabac-presse pour aider une amie
2007 Déménagement à Montauban et début des démarches pour revenir à une activité professionnelle
2009 Devient déléguée générale de la CPME 82
2010 Lancement de l’entrepreneuriat au féminin