Appels d’offres en chute libre : le cri d’alarme des Travaux Publics

Hervé Noel est le président de la FRTP Champagne-Ardenne.

Les entreprises de Travaux Publics de Champagne-Ardenne constatent une baisse de 40% du nombre d’appels d’offres passés par les donneurs d’ordres publics, avec à la clé des répercussions sur l’emploi et la pérennité de leurs structures.

Pour Hervé Noël, il y a urgence : les collectivités doivent absolument remettre en marche leurs investissements. Si le président de la Fédération des Travaux Publics Champagne-Ardenne lance cette alerte aujourd’hui, c’est parce que les entreprises de TP constatent une baisse drastique des appels d’offres passés par les collectivités locales. Et que cela a des répercussions immédiates sur leur activité et donc sur l’emploi de toute la filière. En effet, la FRTP rappelle que « près de 70% de l’activité du secteur est réalisée pour le compte des collectivités territoriales, cette chute de la commande publique, sans précédent dans l’histoire du secteur, fait peser de lourdes menaces sur l’emploi ». Après une année 2019 correcte au niveau de l’activité, l’année 2020 s’annonce comme une année noire et les professionnels des travaux publics veulent à tout prix que 2021 soit celle du rebond. « Nous savons que les années électorales sont compliquées pour les travaux publics, entre les projets qui s’arrêtent plus tôt et les équipes qui se mettent en place, on enregistre souvent une baisse situées entre -10% et -15% de notre activité », rappelle Hervé Noël. « Mais cela fait maintenant plus d’un trimestre que les collectivités disposent de leur exécutif et que leurs services techniques sont en mesure de décider des travaux et de passer des appels d’offres ».

UN ACTE CITOYEN ATTENDU

Par ailleurs, cette fois, le phénomène s’amplifie avec la crise sanitaire qui est venue s’ajouter à un calendrier déjà bousculé. Résultat, une absence de projet et une activité en berne, qui va obliger les entreprises à prendre des décisions désastreuses pour leur personnel et menacer le recrutement des apprentis. « Dans un mois et demi certaines de nos entreprises n’auront plus de travail et prévoit déjà une baisse de 50% d’activité au premier semestre 2021 ». Au passage, Hervé Noêl rappelle que La Fédération des Travaux Publics Champagne-Ardenne rassemble 170 entreprises de toutes tailles, employant plus de 6 000 salariés. En 2018, ces entreprises ont généré un chiffre d’affaires de plus de 850 millions d’euros sur le territoire de l’ex-Champagne-Ardenne.

En l’état actuel, les perspectives des prochains mois s’annoncent pires que celles de la dernière crise de 2008, selon la FRTP, qui rappelle que les carnets de commande mettent en moyenne entre quatre et six mois pour se régénérer, eu égard aux règles des codes des marchés publics et aux délais légaux de procédure à respecter dans ce cadre. Après avoir rencontré élus et décideurs à la tête des collectivités pour leur faire prendre conscience de l’urgence, Hervé Noël souligne néanmoins un paradoxe : « Tous sont d’accord pour dire qu’il faut investir dès aujourd’hui, d’autant que les collectivités sont vertueuses et se sont désendettées ces dernières années. Elles ont donc de la trésorerie, une capacité d’emprunt et d’autofinancement assez élevée mais elles restent excessivement prudentes et les élus gèrent davantage en bons pères de famille. Pourtant, les besoins en entretien des réseaux et des infrastructures sont énormes, les attentes des citoyens sont fortes, et l’Etat a mobilisé des crédits supplémentaires dans le cadre du Plan de Relance ». Surtout, les entreprises qui estiment avoir largement joué le jeu de la reprise, se sentent désormais un peu seules à l’attaque sur le front de l’économie. « Nous avons joué le jeu à la sortie du confinement, nous attendons que les donneurs d’ordre fassent de même. Investir dans les infrastructures, c’est répondre aux enjeux de la transition écologique et préparer l’avenir de nos territoires. C’est aussi participer à la reconstruction de l’économie et préserver l’emploi. Aujourd’hui encore plus qu’hier, il s’agit d’un acte citoyen ! » Les chiffres sont sans appel : alors qu’il s’était effondré de -60% pendant le confinement, le niveau des appels d’offres publics demeure encore aujourd’hui inférieur de plus de 40 % par rapport à la normale, « avec une baisse de plus de 50% sur le mois de septembre 2020 par rapport à septembre 2019 », souligne le président.