Vincent Martin, président de la Fédération régionale des travaux public (FRTP) Bourgogne Franche-Comté.
Malgré le mouvement de contestation du deuxième semestre 2018 en Bourgogne Franche-Comté et des prises de position de la FNTP, le gouvernement a confirmé la suppression du Gasoil non routier (GNR). Pour mémoire, le GNR est un mélange d’hydrocarbures tracé et coloré en rouge afin de s’assurer que son usage est restreint à des applications industrielles, aux travaux publics et agricoles pour lesquelles l’Union européenne a, dans sa directive de 2003, reconnu la pertinence d’une réduction fiscale. Le gouvernement a validé ces jours derniers la suppression du GNR de manière progressive avec un premier relèvement de taxes au 1er juillet 2020 de 45%, les deux suivants devant intervenir au 1er janvier 2021 et au 1er janvier 2022. Il a par ailleurs affirmé, malgré les nombreuses alertes de la FNTP sur les risques de distorsion d’application de cette mesure dans les filières, que la fiscalité réduite du GNR à destination des entreprises du secteur agricole sera maintenue, créant de surcroît une concurrence déloyale entre les TPE/PME du secteur des travaux publics et celles du secteur agricole. Ces annonces ne sont naturellement pas soutenables pour les TPE/PME, même si la trajectoire proposée par le gouvernement sur trois ans est moins catastrophique que la suppression du jour au lendemain initialement prévue. De surcroît, la profession est dans l’attente du périmètre précis des mesures de compensation promises par le gouvernement. Ces dernières devraient notamment prendre la forme d’un soutien à la trésorerie des entreprises et d’une stimulation à l’investissement pour les collectivités locales. Nous tenons à rappeler que les discussions engagées par la profession avec le gouvernement ont en effet permis d’aboutir à une limitation de l’impact pour les TP à 160 millions d’euros en 2020, contre 700 millions d’euros de recettes attendues l’année dernière sur le GNR.
LES MARCHÉS PUBLICS CONCERNÉS
Ces mêmes discussions ont également permis de garantir la mise en œuvre d’une mesure d’ordre public qui permettra de répercuter obligatoirement la hausse du GNR sur tous les marchés publics et privés en cours qui ne disposeront pas d’une clause de révision de prix à la date du 1er juillet 2020. Sur ce sujet, nous souhaitons alerter les maîtres d’ouvrages publics sur le fait que cette répercussion viendra ipso facto impacter la capacité à investir des collectivités (Communautés de communes, Conseils départementaux). Convaincue que l’entretien et l’aménagement des infrastructures constituent un levier incontestable pour le développement social et économique des territoires, mais également qu’une collectivité dotée d’une stratégie d’entretien planifiée limite la dette qui sera ainsi léguée aux générations futures, la profession invite les collectivités à augmenter d’autant leur effort d’investissement afin de ne pas infléchir la dynamique engagée. La France est passée du premier au septième rang en sept ans au niveau mondial selon de classement de l’OCDE en matière de qualité des infrastructures. Souvenons-nous de la catastrophe survenue sur le pont de Gênes. En France, plus de 25 000 ponts viennent d’être recensés comme ouvrages présentant des problèmes sérieux de sécurité… Au-delà des ponts, les réseaux (routes, réseaux, voies ferrées…) enregistrent des niveaux de vétusté ou de dégradation majeure. Qu’allons nous léguer aux générations futures ? La question est vraiment d’actualité.