AkiNaO, pour une agriculture plus verte et vertueuse

Annabel Levert, PDG d’AkiNaO.

L’entreprise perpignanaise développe un concept de fongicide naturel, un projet récompensé lors du concours Natur’Tech 2020. Elle planche également sur la maladie de la sharka et lance une plateforme de formations en ligne. Tour d’horizon. 

L’entreprise de R & D AkiNaO, basée à Perpignan et spécialisée dans l’analyse et le développement de solutions naturelles pour l’agriculture, n’en finit plus d’explorer de nouveaux horizons. Malgré le ralentissement imposé par la crise, 2020 aura été une année plutôt favorable, qui lui aura permis de booster trois nouveaux pro- jets, au-delà de son activité traditionnelle de biocontrôle. La pépite a par ailleurs reçu mi-octobre le prix thématique « Protection des cultures » du concours Natur’Tech 2020. Ce concours, organisé par le pôle Innov’Alliance (ex Terralia-Pass, le pôle de compétitivité du végétal basé à Avignon), qui récompense des solutions innovantes pour une agriculture plus naturelle et durable, remet ainsi sous les feux des projecteurs son projet Folivarde. Il avait déjà été désigné en février dernier lauréat national des trophées 2020 de la bioéconomie au Salon International de l’Agriculture, dans la catégorie « chimie du végétale ». 

UN SYSTÈME VERTUEUX À 2 M

Depuis une décennie, l’entreprise planche sur un concept de fongicide naturel à partir d’une plante endémique, l’inule visqueuse, qui peut être valorisée sous la forme d’un extrait naturel aux propriétés antifongiques et comme support de culture de type paillis végétal. Un premier brevet, qui a été licencié à un industriel, permet ainsi de traiter les pêchers et les abricotiers sur le territoire des Pyrénées-Orientales. « L’inule visqueuse pousse de façon abondante dans les friches du département. L’enjeu est de mettre en place une filière de mobilisation de la ressource, comprenant récolte et mise en culture, en collaboration avec l’université de Perpignan. Nous mobilisons ainsi l’ensemble des acteurs à l’échelle du territoire autour de cette plante », souligne Annabel Levert, PDG d’AkiNaO. Une innovation en entraînant une autre, l’entreprise a également déposé un brevet pour l’utilisation de cette plante sous forme de paillis. Un système vertueux qui arrive à point nommé, la loi Labbé interdisant depuis 2017 l’utilisation des pesticides dans les poumons verts des communes, une interdiction étendue aux particuliers depuis un an. « Le paillis est lui même un co-produit de la fabrication de la matière active qui entre dans la composition du fongicide. Nous développons ainsi une économie locale circulaire à l’échelle du territoire à travers la création d’une filière qui va de la récolte à la transformation, en passant par la récupération des déchets et la mise sur le marché des deux produits. Pour 100 kg de plantes, nous produisons 10 kg de substance active, d’où l’idée de recycler les déchets », détaille la PDG. Si le biofongicide doit être lancé sur le marché européen d’ici quatre ans, le paillis lui sera commercialisé dès 2021. « Il est actuellement testé avec des partenaires tels que la chambre d’agriculture sur les vignobles en terrasse de Banyuls, ou encore dans le périmètre de la centrale nucléaire de Golfech », précise-t-elle. L’entreprise des- tine ce produit aussi bien aux collectivités qu’aux particuliers. Pour l’heure, cette filière émergente qui représente un budget global de 2 M€, a séduit notamment les arboriculteurs espagnols qui ont testé le produit dans le cadre d’un programme de maraîchage, arboriculture et viticulture. De son côté, la Région soutient le projet à hauteur de 110 000 €.
En marge, l’entreprise met au point une méthodologie de détection précoce du virus de la sharka, une maladie qui touche particulièrement les arbres fruitiers de la région. La seule manière d’arrêter sa propagation est d’arracher les arbres qui ont été touchés. « Depuis deux ans, ce projet fait l’objet d’une thèse. Nous cherchons des molécules émises en réponse à l’attaque du virus. » À court terme, AkiNaO espère faire valider la méthode par les autorités et d’ici trois ans, implanter au plus près des producteurs, un laboratoire dédié aux maladies des vergers. « Quatre de nos collaborateurs travaillent en partenariat avec d’autres acteurs sur cette innovation. Il reste encore des leviers réglementaires à lever », explique la responsable. 

MY GREEN TRAINING BOX 

Outre ces innovations, Aki- NaO étoffe sa palette d’activités avec un volet formation, via une plateforme dédiée au développement durable. Une nouvelle entité a vu le jour récemment en partenariat avec un organisme de formation digitale toulousain, Annabel Levert, prenant ainsi la tête de la nouvelle structure, My Green Training Box. « L’objectif est de fournir des formations d’e-learning accessibles à tous, avec une expertise scientifique. Nous proposons notamment cinq formations sur le biocontrôle destinées aux spécialistes de l’industrie et une formation relative au tourisme durable pour les offices de tourismes, campings, etc. Dès l’année prochaine, nous proposerons un module santé et bien-être à destination du grand public et une formation sur l’autonomie et la résilience énergétique. Le calendrier de sortie est plein jusqu’à fin 2021 au rythme d’une formation par mois », détaille-t-elle. L’entité a fait appel à une soixantaine d’experts afin de muscler les formations et en attend une centaine dès l’année prochaine. La plateforme est d’ores et déjà disponible en français, anglais, italien et espagnol, auxquels s’ajoutera le néerlandais en 2021. « Ce temps de cerveau intelligent », comme le surnomme la PDG, a été soutenu par la Région Occitanie via le dispositif Innov Emploi à hauteur de 60 000 €.
Ainsi, l’entreprise poursuit son expansion dans un secteur porteur. « Le biostimulant est notamment une activité qui fonctionne même si actuellement les budgets de R & D sont en stand by dans les entreprises. C’est un marché florissant mais balbutiant par rapport à la durée de mise sur le marché », conclut Annabel Levert. L’entreprise, qui a généré 250 K€ de chiffre d’affaires l’an passé et réunit cinq collaborateurs et deux associés, espère doubler sa croissance d’ici quatre ans.