À l’assaut des remparts de Saint-Malo

Cité des corsaires, des armateurs, des négociants, des terre-neuvas, des explorateurs, Saint-Malo est une ville fière de son histoire et de ses hommes illustres. Pour la découvrir, le visiteur empruntera ses fameux remparts, qui cernent la ville sur près de deux kilomètres. Un point de vue splendide pour admirer son front de mer changeant au gré des marées et contempler l’architecture imposante de l’intra-muros.

Lorsque pour la première fois vous découvrirez Saint-Malo, vous ne resterez pas indifférent à « ce vaisseau de pierre » réputé imprenable et vous vous direz que cette ville ne ressemble à aucune autre. Vous apercevrez tout d’abord derrière les imposants remparts les hautes maisons de granit avec leurs cheminées géantes. Vous sentirez l’air du large avec ses odeurs d’iode et d’algues, vous ressentirez un besoin d’évasion et de découverte.

D’UN PETIT BOUT DE TERRE NAQUIT UNE FIÈRE CITÉ

La ville n’était à l’origine qu’un rocher relié à la terre par un étroit banc de sable, le sillon. C’est au XIIe siècle que l’évêque Jean de Chatillon y bâtit sa cathédrale et entoura la ville d’un premier rempart. Puis au XVe siècle les ducs de Bretagne construisirent le château pour en faire une place forte. Accolée au mur nord-ouest du château, la tour Quic en Groigne fut érigée au XVIe siècle sur ordre d’Anne de Bretagne, non plus pour protéger la ville, mais pour surveiller des Malouins jugés trop indépendants.

UN VAISSEAU DE PIERRE IMPRENABLE

Pour aborder cette fière cité, montez d’abord au sommet du donjon du château, accessible depuis le musée historique. La vue sur les alignements de cheminées des hôtels d’armateurs donne la mesure de la réussite malouine. Puis en longeant le château sur la droite, accédez au chemin de ronde des remparts par la porte St-Thomas. Vous passerez devant l’école nationale de la Marine Marchande puis vous arriverez à la Tour Bidouane. Cette ancienne poudrière en forme de fer à cheval est l’une des principales tours fortifiées des remparts. De là vous aurez une vue grandiose à 180 degrés sur toute la baie et vous comprendrez que les remparts ne sont pas forcément la seule vraie défense de la cité corsaire.

En effet, outre la myriade de roches et de récifs entourant Saint-Malo, la citadelle est également défendue par le Fort National que les Anglais n’osèrent jamais attaquer, le Fort de la Conchée à l’est de l’île de Cézembre, qui imposa une lourde défaite à la flotte anglaise le 14 juillet 1695 et celui d’Harbour à l’ouest devant Dinard. Les défenses malouines étaient aussi assurées plus près de la ville close par le Petit Bé et le Grand Bé où se trouve la tombe de Chateaubriand accessible à marée basse. Ce grand écrivain romantique mort en 1848, auteur des Mémoires d’Outre-tombe, remua ciel et terre pour être enterré ici et n’entendre que le Vent et la Mer.

DANS LE SILLON DES HOMMES ILLUSTRES

Derrière la tour Bidouane, vous verrez la Maison de nos cousins du Québec. Vous y saluerez la statue du célèbre corsaire Robert Surcouf pointant l’ennemi anglais. Continuez en direction du Bastion de la Hollande où vous pourrez admirer les fortifications de Vauban et de Garangeau. N’oubliez pas de vous arrêter devant la statue de Jacques Cartier qui en 1534 découvrit le Canada. Sur votre chemin, vous tomberez aussi sur la statue du corsaire Duguay-Trouin, connu pour ses victoires contre les Anglais et les Hollandais au cours des deux dernières guerres de Louis XIV.

Redescendez ensuite sur l’esplanade de la Bourse avant d’entamer une dernière ballade sur le Môle des Noires, la longue jetée à l’extérieur de Saint-Malo. Depuis son extrémité vous aurez un point de vue imprenable sur la vieille ville. Fermez les yeux et imaginez assister, dans de magnifiques pièces d’apparat, en compagnie de « ces messieurs de Saint-Malo », aux discussions autour des guerres de courses, aux négoces avec les Indes, la Chine, les Amériques ou à la découverte de nouvelles routes maritimes. Laissez-vous envahir par ces parfums de grand large et cette soif de découvertes et d’aventures. Toutes ces sensations, vous pourrez à nouveau les ressentir au départ de la course transatlantique en solitaire La Route du Rhum ou en assistant au festival du livre et du film Étonnants voyageurs. Bienvenue dans la cité corsaire !

Par Karine Barbé, 7 Jours. pour RésoHebdoÉco, association regroupant 27 titres de presse hebdomadaire économique régionaux en France. facebook.com/resohebdoeco

Incroyables marées

C’est sur l’immense plage du sillon qui s’étend sur quatre kilomètres qu’on mesure le mieux l’importance de la marée. Lors d’une grande marée, la différence du niveau de la mer peut atteindre près de 14 mètres entre la basse mer et la haute mer. À marée basse, il vous faudra faire 500 mètres pour atteindre le bord de l’eau, quelque six heures plus tard les vagues viendront se briser contre la digue qui longe le sillon.


« Ni Français, ni Breton, Malouin suis »

Conscients de leur puissance financière et habitués à commercer avec le monde de l’époque, les Malouins mécontents de l’arrivée d’un roi protestant, Henri IV, n’hésitèrent pas à s’ériger en république indépendante de 1590 à 1594. Les Malouins restaient ainsi fidèles à leur devise : « Ni Français, ni Breton, Malouin suis ». Saint-Malo se rattachera à nouveau à la couronne de France quand Henri IV abjurera en se convertissant au catholicisme. Mais on peut encore sentir l’esprit d’indépendance du rocher à travers son drapeau flottant au sommet du donjon, au-dessus du drapeau français…