50 euros l’hectare pour financer la recherche vitivinicole

François Pierson Président AVC

François Pierson, Président de l'AVC, à propos des 50€ l'hectare : " Je ne lâcherai pas ".

Parce qu’il est urgent de répondre aux aléas climatiques, aux exigences de la transition énergétique et du développement durable, à la nécessaire pérennité de la qualité et de l’image du Champagne, l’Association Viticole Champenoise émet l’idée d’une cotisation recherche.

Parce que la lutte contre le phylloxera et le mildiou est son rôle et l’objet de sa création voici plus de 120 ans, l’Association Viticole Champenoise est focalisée sur la santé de la vigne et du vin. Réchauffement climatique et développement durable sont venus s’inviter à la table des préoccupations urgentes avec des challenges : zéro herbicides d’ici à 2025 et 100% d’exploitations certifiées haute valeur environnementale en 2030 (25% aujourd’hui).

L’Assemblée Générale 2019 de l’AVC a donc fait, comme de coutume, la part belle aux avancées techniques et scientifiques de la vitiviniculture champenoise, au travers de la dernière vendange, des attentes et des constats. Ont ainsi été évoqué les créations variétales de demain (des cépages plus résistants aux maladies et aux aléas climatiques et supposant moins d’intrants) avec ses avancées en termes d’hybridation et de porte-greffes, les modes de pulvérisation, avec quelques mots doux sur les zones de non-traitement, les bonnes et mauvaise herbes avec une robotisation concomitante qui nécessiterait une mutualisation des matériels, d’autres méthodes de plantation (des rangs plus larges et des vignes plus hautes) …

Avec beaucoup d’humour, une marque des assemblées de l’AVC, les collaborateurs du Pôle technique du CIVC sont allés jusqu’à l’impertinence dans les questions de leurs micro-vignes : « Bio ou durable ? Piquets en bois ou en galva ? Glyphosate ou charrue ? Tracteur ou cheval ? » Côté vendange 2019, avec cette boutade d’un vigneron : « On a trouvé plus d’oïdium dans les réseaux sociaux que dans les vignes », plutôt bonne disent l’ensemble des consultés : une excellente qualité, des pertes de volume, entre gel et échaudage (11% de dégâts), des grappes faciles à trier, pas loin de l’appellation, un grossissement surprenant des baies, une maturation record, un état sanitaire excellent…

LES VIGNERONS MAÎTRES DE LEUR AVENIR

Pour son premier discours d’Assemblée Générale, le nouveau Président de l’AVC, en place depuis janvier 2019, n’a pas fait dans la tiédeur. Premier coup de chaud : « Et si nous devenions acteurs de notre avenir et, par conséquent, celui de nos enfants ? Il est temps de se remettre en question et de ne pas nous laisser dicter notre destin, et donc celui de la Champagne, par des gens qui n’ont de cesse de mettre à mal notre viticulture. Des émissions anxiogènes qui mettent l’agriculture et la viticulture au ban des premiers pollueurs. Des réseaux sociaux qui font de l’écologie bobo-médiatico-politique pour faire le buzz. De l’agri-bashing ! Le mot pesticide est prononcé sans arrêt et à tout bout de champ, c’est de l’hystérie médiatique ».

Plus posément, François Pierson entre dans le vif de son message : « L’audace et la recherche sont nos seules chances pour ce XXIe siècle … Il nous faut mieux soutenir et accompagner notre recherche ».

Pas de finances, pas de recherches, remarque le Président de l’AVC. Qu’à cela ne tienne, l’histoire porte de bons exemples. En 1919, Bertrand de Mun fait doubler les cotisations de l’AVC, Jean- Louis Normand, Président entre 2010 et 2014, déclare qu’il appartient aux vignerons de gérer et contrôler leurs recherches.

Le financement de la rubrique « Technique et environnement » du budget 2018 du CIVC (20,7 M€ au total) s’élève à 6 M€, il alimente, entre autres, la recherche vitivinicole. Ce financement dépend des cotisations selon les volumes de raisin et de bouteilles vendus, par les vignerons et les négociants. Il dépend donc de la conjoncture (rendement et vente), une situation qui fait dire à François Pierson : « Il nous faut des moyens financiers autres que les simples cotisations CIVC qui font le yoyo ».

UN BUDGET SUPPLÉMENTAIRE DE 1,7 M

Après le coup de chaud, la vitesse supérieure. Le Président de l’AVC demande fermement l’instauration d’une cotisation de 50 euros par hectare, soit, pour un rendement de 10 000 kg/h, soit 0,005 centime du kilo de raisin. C’est au final, pour les 34 000 hectares en production de la Champagne, une manne de 1,7 M€ pour soutenir de manière pérenne la recherche vitivinicole champenoise.

L’humour pour faire passer la pilule à 50 euros ? « Reconnaissez que cela est dérisoire, mais tellement important, j’avais pensé à 100 €, mais vous avez de la chance, c’est le Black Friday ! ». Et une bonne dose de fermeté : « J’entends déjà les récriminations ! Mais c’est primordial et incontournable et je ne lâcherai pas ». La réponse appartient évidemment à la gouvernance du CIVC.

Il serait assez étonnant que cette demande du Président de l’AVC n’ait pas été précédée d’une concertation avec Jean-Marie Barillère et Maxime Toubart, les deux Présidents du CIVC.