2018, une année mi-figue mi-raisin selon la CCI d’Occitanie

Alain Di Crescenzo, le président de la CCI d’Occitanie.

La chambre consulaire, en partenariat avec la Banque de France d’Occitanie, a présenté le bilan économique de 2018.

Jeudi 14 mars, Alain Di Crescenzo a réuni la presse et les différents présidents de chambres consulaires à la CCI d’Occitanie pour présenter le bilan de l’enquête annuelle de conjoncture pour 2018. Menée conjointement auprès de 5 000 chefs d’entreprise, en partenariat avec la direction régionale de la Banque de France, elle fait dire au président de la CCI d’Occitanie que « prise isolément, l’année 2018 a été pas trop mal ; mais si je regarde dans le rétroviseur, elle s’est quand même moins bien passée que les autres années » ; y compris en se comparant aux autres régions ; l’Occitanie ayant l’habitude, pour reprendre le mot chéri d’Alain Di Crescenzo, de « surperformer » – terme que, d’ailleurs, le nouveau directeur régional de la Banque de France, Stéphane Latouche, également présent ce jour-là, semble désormais avoir adopté.

Premier enseignement de l’étude, le chiffre d’affaires tous secteurs confondus a augmenté de 2,6 %, et les effectifs de 2,9 %. Un résultat qui a été tiré en particulier « par la construction avec 3,4 % de hausse de l’activité et les services avec + 3,5 % », détaille Alain Di Crescenzo, qui ajoute qu’en toute logique, la croissance des effectifs a là aussi été alimentée par ces deux secteurs : + 4 % pour la construction et + 4,7 % pour les services. En revanche, « lorsqu’on regarde les prévisions pour 2019, les entreprises se montrent conservatrices ». À la différence qu’en 2019, le chiffre d’affaires pourrait être tiré par l’industrie (+ 2,7 % de croissance attendue), le commerce (+2,8%) et les services (+3,2%) tandis que l’hôtellerie-restauration, à la croissance atone l’année dernière, devrait repartir à + 0,7 %. Sauf qu’Alain Di Crescenzo avoue franchement « ne pas croire à cette croissance du commerce, à cause de la prolongation des effets » des manifestations de Gilets jaunes. Quant aux effectifs, « bien qu’on préfère rester prudents, les services prévoient 4,5 % d’augmentation, et un ramollissement de la construction avec seulement + 1,9 % ».

Pour autant, le président de la CCI d’Occitanie ne s’est pas satisfait de ces chiffres car, a-t- il rappelé, « si aujourd’hui nous sommes à 2,6 % de croissance, l’année dernière nous étions à 3,8 %. Et depuis que je fais ces études », y compris à l’époque où il n’était encore que président de la CCI de Haute- Garonne, « c’est la première fois que la croissance est inférieure aux prévisions », puisque pour 2018, l’étude pariait sur une hausse de 3 %. Ce qui, au demeurant, n’est pas si surprenant que cela puisque « nous sommes dans une tendance nationale, et quand on passe en France d’un PIB en croissance de +2,3% en 2017 à +1,5% en 2018, il y a forcément des effets de bord » – un terme qu’emprunte à l’informatique celui qui est aussi président de l’éditeur de logiciels IGE+XAO : autrement dit, un effet secondaire. « Mais l’Occitanie s’est moins bien comportée qu’auparavant : les années précédentes, on était sensiblement meilleurs que les autres régions, surtout dans la construction, l’industrie et les services ».

DES EFFORTS EN PERSPECTIVE POUR TOUS LES SECTEURS

« L’industrie, par exemple, est une vraie déception, quand on passe de 4,4% en 2017 à 2,4% d’évolution du chiffre d’affaires, alors qu’on attendait + 3 %. Et encore heureux que nous ayons eu les belles livraisons (89 Airbus dont une majorité d’A320, 11 A350 XWB et 2 A380) du dernier trimestre ! ». Maigre point positif, l’industrie reste « le seul domaine qui conserve ses marges » : pour preuve, l’étude de conjoncture met en lumière un bilan « favorable » chez 40 % des dirigeants interrogés, contre 28 % le considérant comme « stable » et 32 % « défavorable ». Quant à l’évolution de la rentabilité, les choses sont légèrement plus mitigées, 25 % des sondés estimant qu’elle augmentera, 25 % qu’elle baissera, et 50 % qu’elle sera stable.

« Donc globalement, la santé financière du monde industriel est bonne » ; Alain Di Crescenzo en profitant pour lui faire passer un message : « Attention ! Vous avez des moyens de production qui sont obsolètes par rapport à ceux du Japon et de l’Allemagne. Nous avons des statistiques qui montrent que nous ne sommes pas très bons en termes de robotisation. Donc il est temps d’investir, d’autant que le crédit n’est pas cher ! » – un message qui fera sûrement plaisir au cluster régional Robotics Place, qui la veille de cette conférence de presse, propageait exactement le même message…

Concernant la construction, le secteur, « après avoir détruit des emplois pendant des années, connaît un renouveau depuis deux ans et la demande reste forte ». La santé financière est là aussi semble-t-il bonne, seules 20 % des sociétés interrogées s’estimant fragiles, 60 % considérant au contraire se trouver dans une situation saine. Cependant, poursuit Alain Di Crescenzo, « on voit venir une pression de plus en plus forte sur les marges du fait de la négociation et de la concurrence », alors que la rentabilité devrait être stable cette année pour l’ensemble des chefs d’entreprise. Plus inquiétant, dans les travaux publics, « les beaux jours sont finis, et les chefs d’entreprise prévoient une baisse d’activité jusqu’en 2022 », du fait de l’arrivée dès l’année prochaine d’échéances électorales qui, classiquement, mettent les projets de chantiers en pause.

Dans le domaine des services, qui en région représentent plus de 40 % des emplois tous secteurs confondus, « la demande est forte, même si elle est en baisse » : le chiffre d’affaires, qui avait augmenté de 5 % en 2017, n’a plus progressé que de 3,5 % l’année dernière, et la prévision pour 2019 ne la porte qu’à 3,2 %. Le solde des marges, lui, « est à peine positif, à plus d’1 %, une érosion due à une concurrence de plus en plus grande, que ce soit dans les services à la personne ou marchands ». Enfin, l’hôtellerie-restauration continue de souffrir, tant en raison là aussi de la concurrence ( notamment celle d’Airbnb) que des difficultés de recrutement… et aussi de l’impact des manifestations récentes ; aussi, « nous avons besoin de nous creuser la tête, avec les petits moyens des chambres de commerce, pour soutenir le tourisme » dont dépendent fortement les hôtels et les restaurants. Vaste programme…